La fille du pirate | Page 2

Émile Chevalier
le capitaine en passant la lunette �� son second.
D��s que celui-ci eut regard�� il palit.
--Le Corbeau! murmura-t-il.
--Le Corbeau! r��p��t��rent, en se signant, des matelots qui se trouvaient pr��s du lieutenant.
--Mais qu'est-ce que cela signifie! dit Charles, frapp�� de la stupeur qui se peignait sur le visage des assistants.
--C'est le Corbeau!
--Mais encore, capitaine...
--Allons, il faut nous pr��parer �� mourir. Avoir travers�� le grain pour tomber sous la griffe du Corbeau, mille sabords!
--Mais, persista le fils de l'armateur, expliquez-moi au moins de quoi il s'agit.
--Il s'agit, monsieur, r��pliqua le vieux marin, de faire vos dispositions testamentaires. Tenez, voici le Corbeau qui croasse; comprenez-vous!
Comme le capitaine pronon?ait ces mots, un ��clair illumina les ondes de l'Atlantique, puis une d��tonation se fit entendre et deux boulets ram��s balay��rent le pont de l'Alcyon.
--C'est un corsaire! s'��cria Charles avec imp��tuosit��, il faut nous battre. Nous avons des armes et des munitions...
Le capitaine haussa les ��paules.
--Une embarcation �� la mer! ordonna-t-il.
Quand le canot eut ��t�� mis �� flots, le commandant y descendit, accompagn�� de quatre vigoureux rameurs.
--Mais qu'est-ce que cela signifie? r��p��tait Charles ��tonn�� d'un incident aussi extraordinaire.
--Cela signifie, monsieur, que dans une heure nous servirons probablement de pature aux requins, lui r��pliqua le troisi��me.
--Pourquoi ne pas nous d��fendre?
--Se d��fendre contre le Corbeau! examinez un peu cette machoire!
IV
La corvette, pouss��e par une fra?che brise nord-ouest, nageait rapidement, toutes voiles d��ferl��es, depuis ses royales jusqu'�� ses focs et ses bonnettes hautes et basses.
C'��tait un magnifique navire de guerre cambr��, svelte, ��lanc�� comme un yacht, portant fi��rement son encolure, et plus fi��rement encore ses trois fl��ches qui ployaient comme des baleines sous le fardeau de ses toiles gonfl��es.
A la proue un immense corbeau, les ailes d��ploy��es, semblait pr��t �� fondre sur sa proie.
Deux caronades, du plus fort calibre, avan?aient leurs gueules b��antes au-dessus de l'envergure au mena?ant volatile, perch�� imm��diatement sous le beaupr��.
Les vingt sabords du Corbeau ��taient garnis de vingt canons.
La gueule de ces vingt canons avait ��t�� peinte en rouge comme la ligne de la pr��ceinte.
Sur le pont, au pied des mats, se tenaient des groupes d'hommes arm��s jusqu'aux dents.
Tous ��taient v��tus de chemises rouges, �� large collet rabattu, bord�� d'un filet noir, et de pantalons gris de fer, serr��s �� la taille par une ceinture de cuir, dans laquelle ��taient pass��s des pistolets, un poignard, et une hache �� double tranchant.
Ils avaient la t��te et les bras nus.
Au moment o�� le canot d��tach�� de l'Alcyon approchait du Corbeau, ce dernier amenait sa voilure et pr��parait ses grappins d'abordage.
Le capitaine Fran?ois h��la, et peu apr��s son esquif ��tait hiss�� par les palans du Corbeau.
Un homme se promenait seul sur la dunette.
Il avait la physionomie dure, le visage bronz��, les yeux pleins d'un feu sombre et une ��paisse barbe noire. Sa stature ��tait ��lev��e, ses membres nou��s �� des attaches souples, nerveuses, ses mouvements brusques, imp��rieux.
Un chapeau de toile cir��e, sans ornement, couvrait son chef, mais sa veste en velours brun, ainsi que son pantalon, de m��me ��toffe, ��taient galonn��s d'argent.
A son c?t�� pendait un sabre turc, et �� la main droite il tenait un porte-voix.
Ce personnage paraissait avoir trente ans environ.
Le capitaine de l'Alcyon marcha bravement �� lui.
--Comment s'appelle ta coquille de noix? fit le pirate avec un accent gascon tr��s-prononc��.
--L'Alcyon.
--De quoi se compose la cargaison!
--De vins.
--Et puis?
--Des conserves.
--As-tu des passagers?
--Une vingtaine, pour lesquels je suis venu r��clamer votre piti��.
Le forban sourit ironiquement.
--O�� allais-tu?
--A la Nouvelle-Orl��ans. Mais le mauvais temps...
--Et tu venais!
--De Marseille.
--Ah! de Marseille, fit l'autre avec une certaine ��motion.
Ensuite, il se tourna, leva un doigt en l'air; et quatre hommes se jet��rent sur le capitaine Fran?ois, le terrass��rent et lui garott��rent les pieds et les poings. Les rameurs qui l'avaient suivi subirent le m��me sort.
V
D��j�� le Corbeau accostait l'Alcyon.
Le premier de ces vaisseaux mit en panne et amarra le second �� ses flancs.
Les flibustiers se pr��cipit��rent sur leur victime comme des vautours sur un cadavre. Nul parmi les matelots du batiment marchand n'osa leur opposer de r��sistance. La terreur qu'inspirait le nom seul du Corbeau avait glac�� d'effroi les plus braves. Tous furent li��s et transbord��s, ainsi que les passagers, �� l'exception du fils de l'armateur.
Charles, maudissant la lachet�� de ces gens, s'��tait arm�� d'une paire de pistolets, et, adoss�� au gouvernail, il mena?ait de br?ler la cervelle �� quiconque tenterait de s'emparer de sa personne. D'abord intimid��s par cette attitude d��termin��e, les forbans recul��rent, puis ils se ru��rent, comme des furieux, contre l'intr��pide jeune homme. Mais celui-ci fit feu de ses deux coups et deux pirates tomb��rent; leurs compagnons pouss��rent un cri de vengeance et fondirent en masse sur Charles, qui, sans perdre son sang-froid, s'��tait empar�� d'une barre de cabestan et la faisait voltiger autour de lui avec une redoutable dext��rit��.
D��j�� son levier avait mis hors de combat nombre des assaillants, lorsqu'un officier du Corbeau, impatient�� de cette lutte compromettante pour les siens,
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