Scènes de mer, Tome I

Édouard Corbière
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Scènes de mer, Tome I, by édouard Corbière

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Title: Scènes de mer, Tome I
Author: édouard Corbière
Release Date: April 3, 2006 [EBook #18111]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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Scènes de mer.
Par Edouard Corbière.
PARIS.
HIPPOLYTE SOUVERAIN, éDITEUR,
RUE DES BEAUX-ARTS, 3 BIS.
1835.
OUVRAGES
DE
EDOUARD CORBIèRE.
Le négrier La mer et les marins Les pilotes de l'iroise Les contes de bord Le prisonnier de guerre Les aspirans de marine Deux lions pour une femme

I. DEUX LIONS POUR UNE FEMME.

CHAPITRE PREMIER.
Les Deux Jocondes Marins.
Le désir de réaliser quelques bons projets de spéculation avait réuni à bord du même brick deux individus d'humeur et d'espèces différentes.
L'un était le capitaine Sautard;
L'autre, le subrécargue Laurenfuite.
Le capitaine Sautard était un de ces hommes qui, ayant usé de tout un peu et n'ayant abusé de rien, allait au positif par tous les chemins possibles, hors ceux des douces illusions. Quand une bonne occasion se rencontrait sur sa route, il cherchait à la saisir, en vrai corsaire, comme il aurait fait d'une prise richement chargée. Mais quand la fortune qu'il aurait été bien aise de tater semblait vouloir le faire courir long-temps après elle, il laissait là la fortune, sans se décider à faire cent pas pour la ramener à lui.
Figurez-vous un gros petit être un peu plus que blond, un peu moins que rouge, d'une physionomie commune et riante, agé à peu près d'une quarantaine d'années, et vous aurez approximativement une idée de l'exté-rieur d'homme dans lequel se reflétait le caractère du capitaine Sautard.
Quant à M. Laurenfuite, le subrécargue, c'était une tout autre affaire.
M. Laurenfuite savait chanter faux avec une prétention ridicule que l'on ne pouvait comparer qu'à l'inexorable sottise avec laquelle il faisait grincer sous ses doigts une guitare ordinairement montée en la majeur. Tous les instans qu'il ne donnait pas à sa toilette, il les consacrait à la musique, et sa passion philharmonique avait cela de malheureux, qu'il lui suffisait de prendre son instrument ou de roucouler une tendre romance pour mettre tout un équipage de la plus mauvaise humeur possible. Les matelots même allaient jusqu'à attribuer aux accens de ce malheureux Amphion un pouvoir fatal, que n'avaient certes pas les accords de sa lyre, quelque redoutables qu'ils fussent, sous sa main recouverte de trois ou quatre gros diamans. Quand le vent venait à changer et à contrarier le capitaine, et quand l'azur du ciel commen?ait à se couvrir de sombres nuages annon?ant la tempête, les oracles du gaillard d'avant du brick l'Aimable-Zéphyr se disaient entre eux:
--C'est encore le subrécargue qui aura voulu dérouiller sa guimbarde que le diable confonde! Voilà déjà du vent à deux ris! Que Lucifer l'enlève!
--Oui, ajoutait le ma?tre de quart; ?a vous a une voix à crier à la garde! et ?a veut encore faire le troubadour en nous chantant: A peine au sortir de l'enfance, sur l'air de: Tu n'auras pas ma rose!
--Ah ?a! répliquait un troisième interlocuteur, je voudrais bien savoir si le cap'taine, qui est ma?tre après Dieu à son bord, n'aurait pas le droit d'empêcher M. Laurenfuite de miauler comme il le fait avec accompagnement de guitare? Les ordonnances de la subordination à bord des navires ne sont-elles pas faites tout aussi bien pour le subrécargue que pour nous et les passagers? Or, qui manque aux ordonnances doit être puni; ainsi on peut par conséquent empêcher le chant et les accompagnemens à bord de nous, par ordre du cap'taine.
--Je t'en fiche, avec tes ordonnances! Crois-tu que les ordonnances aient jamais parlé du cas des cordes de guitare et du manquement au service du tremblement de voix? Et puis, quand bien même, par supposition, la loi ne voudrait pas cela, est-ce que jamais notre capitaine voudrait faire de la peine à cet homme qui peut-être a été comédien, et qui miaule encore, c'est possible, par routine de son ancien métier? On dit bien si j'étais capitaine, je ferais ci, je ferais ?a; mais entre eux les gros ne se mangent pas, c'est la règle. Le capitaine boit et fume, mange et dort, et il laisse l'autre se débarbouiller avec de l'eau de Cologne, et se gargariser le gosier avec des chansons tant qu'il peut: c'est des égards qu'ils ont l'un pour l'autre, quoi! et voilà tout.
--C'est vrai ce que tu dis là; mais il n'en est pas moins
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