le
fils de Sémélé,
Hercule, que la Nymphe aux yeux de violette
Qui
bondit en chantant sur les flancs de l'Hymette!
Rester vierge est mon
lot...--pour apaiser ma faim
Allons chercher des fruits, de la crème et
du pain.
_Il sort tristement._
SCÈNE II
ALECTON entre joyeusement. Elle est métamorphosée en nymphe; ses
bras sont nus et ses cheveux retombent librement sur ses épaules. Type
de beauté perverse et cruelle.
ALECTON.
Je viens de me mirer dans l'eau d'une fontaine.
Pluton n'a pas menti:
la beauté souveraine
Me revêt de splendeur.--La Furie Alecton,
Noire comme la nuit, sèche comme un bâton,
Serait méconnaissable à
l'oeil le plus sagace;
Elle est Nymphe de pied en cap, Nymphe de race!
--Lasse à la fin de faire endurer des tourments
Aux morts, je veux
aussi tourmenter les vivants,
Et l'amour malheureux est leur plus
grand supplice!
C'est pourquoi j'ai voulu la beauté.--Mon caprice
A
fait rire Pluton sur son trône de jais.
--Je te donne congé, m'a-t-il dit.
Va-t'en! mais
Crains les jeunes amants dont la fierté superbe
Fleurira sur tes pas comme chardons dans l'herbe!
Qu'un seul prenne
un baiser sur ton joli menton
Et la Nymphe aussitôt redevient Alecton.
--Un baiser! et pourquoi le laisserais-je prendre?
Parce que je suis
belle, en serai-je plus tendre?
Je méprise l'amour: son charme tant
vanté
Me semble fade ainsi que l'eau du froid Léthé.
Des feux
s'allumeront aux rayons de ma face,
Mais ils ne fondront pas mon
coeur: il est de glace
À jamais...
SCÈNE III
ALECTON, BOTRIOCÉPHALE, qui rentre tenant une corbeille de
fruits.
BOTRIOCÉPHALE, _à part._
--Une Nymphe au regard inconnu!
ALECTON, _à part._
Un Faune au ventre énorme, au vaste front cornu!
BOTRIOCÉPHALE, _à part._
Vient-elle de l'Olympe ou des bois du Taygète?
ALECTON, _à part, avec une curiosité bienveillante_.
Comme il est gros et lourd! la monstrueuse tête!
BOTRIOCÉPHALE, _à part._
O Vénus! qu'elle est belle!
ALECTON, _à part, avec admiration._
O Pluton! qu'il est laid!
Je n'ai jamais vu rien...
BOTRIOCÉPHALE, _toujours à part._
Une jatte de lait...
ALECTON, _toujours à part._
D'aussi difforme...
BOTRIOCÉPHALE.
...Est moins blanche que son visage...
ALECTON.
Même aux enfers...
BOTRIOCÉPHALE.
Mais quoi, si je ne suis pas sage,
Elle me chantera bientôt turlututu
Comme les autres; mieux vaut se taire.
ALECTON, _à Botriocéphale._
Où vas-tu,
Faune?
BOTRIOCÉPHALE, _toujours à part._
Brillants et purs, ses yeux sont deux étoiles.
ALECTON, _à part._
L'araignée est moins laide au milieu de ses toiles.
BOTRIOCÉPHALE.
Je n'oserai jamais...
ALECTON, _à Botriocéphale._
Tu ne me réponds pas,
Jeune Faune?
BOTRIOCÉPHALE, _à Alecton._
J'allais faire un léger repas,
Du laitage, des fruits... bien que depuis
l'aurore
Je sois dans la forêt, n'étant pas carnivore
Ce peu que je
tiens là me suffit.
ALECTON, _à Botriocéphale._
Près de moi
Viens!
BOTRIOCÉPHALE.
Mais... je...
ALECTON.
Suis-je faite à donner de l'effroi?
BOTRIOCÉPHALE, _à part._
Comment!... elle m'appelle!... Ah! ce n'est pas possible,
Je rêve...
ALECTON, _à Botriocéphale._
Viens!
_À part, charmée._
Il est parfaitement horrible!
BOTRIOCÉPHALE, _à part._
Je ne lui fais pas peur... ma foi, profitons-en!
Comme sera plus tard
don César de Bazan
Soyons hardi...
_Il s'approche d'Alecton qui s'assied sur un tronc d'arbre et l'invite à
s'asseoir près d'elle.--À Alecton._
--Du bois le feuillage est humide,
N'est-ce pas? il y fait bien frais.
ALECTON, _à part, avec indulgence._
Il est timide.
BOTRIOCÉPHALE, _à Alecton._
On entend murmurer la fontaine ici près
Sur un beau lit de mousse, à
l'ombre des cyprès.
ALECTON, _à Botriocéphale._
Je l'entends murmurer.
BOTRIOCÉPHALE.
Le vol des hirondelles
Dans l'azur éclatant met des battements d'ailes.
ALECTON.
Je les vois.
BOTRIOCÉPHALE.
Et les fleurs, parure de l'été....
ALECTON, _l'interrompant._
Tu ne me parles pas, Faune, de ma beauté!
BOTRIOCÉPHALE.
Je n'ose pas.
ALECTON.
Pourquoi?
BOTRIOCÉPHALE.
C'est que... c'est la première
Fois qu'une Nymphe à l'oeil ruisselant de
lumière
Consent à m'écouter.
ALECTON.
Pourquoi?
BOTRIOCÉPHALE.
Je suis si laid!
ALECTON.
Eh! qu'importe si l'on n'est pas beau, quand on plaît?
BOTRIOCÉPHALE.
Vous ne vous moquez pas?... avec ces bras de neige,
Ces cheveux
d'or...
ALECTON.
Mais non, et pourquoi le ferais-je?
BOTRIOCÉPHALE.
Vous me trouvez...
ALECTON, _affectueusement_.
Affreux; je l'ai dit, tu me plais.
Et toi, n'aimes-tu pas la laideur?
BOTRIOCÉPHALE.
Je la hais!
ALECTON, _s'éloignant de Botriocéphale, à part._
Gare au baiser! s'il voit ma véritable forme
Il fuira.--
_À Botriocéphale._
Conte-moi des douceurs, Faune énorme!
En prose, en vers, fais-moi
d'amoureux compliments
Qui reflètent ta flamme et peignent tes
tourments!
Tu me feras plaisir.
BOTRIOCÉPHALE.
Hélas! on me rabroue
Quand près de la beauté je veux faire la roue;
Si bien que je n'ai pas su prendre encor le ton
Des choses qu'on
enroule autour d'un mirliton.
Mais si dans mes discours je parais
indigeste,
Peut-être je saurai mieux parler par le geste;
Laisse-moi
commencer par un baiser.
ALECTON.
Non pas!
BOTRIOCÉPHALE.
Si je te plais, pourquoi refuser?
ALECTON.
Le trépas
Alors. Faune, vois-tu, ma pudeur est si forte
Que je
craindrais, sous ton baiser, de tomber morte.
BOTRIOCÉPHALE, _à part._
La pudeur est un fleuve, il faut qu'elle ait son cours;
Patience.
ALECTON.
Si tu ne fais pas de discours,
Au moins dis-moi ton nom.
BOTRIOCÉPHALE, _toussant pour s'éclaircir la voix._
Hum!
_D'une voix tonnante._
Botriocéphale!
ALECTON.
Il

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