hai, hai.
- Jodelet -
Notre connaissance s'est faite à l'armée ; et la première fois que nous nous v?mes, il commandait un régiment de cavalerie sur les galères de Malte.
- Mascarille -
Il est vrai ; mais vous étiez pourtant dans l'emploi avant que j'y fusse ; et je me souviens que je n'étais que petit officier encore, que vous commandiez deux mille chevaux.
- Jodelet -
La guerre est une belle chose ; mais, ma foi, la cour récompense bien mal aujourd'hui les gens de service comme nous.
- Mascarille -
C'est ce qui fait que je veux pendre l'épée au croc.
- Cathos -
Pour moi, j'ai un furieux tendre pour les hommes d'épée.
- Madelon -
Je les aime aussi ; mais je veux que l'esprit assaisonne la bravoure.
- Mascarille -
Te souvient-il, vicomte, de cette demi-lune que nous emportames sur les ennemis au siége d'Arras ?
- Jodelet -
Que veux-tu dire, avec ta demi-lune ? C'était bien une lune toute entière.
- Mascarille -
Je pense que tu as raison.
- Jodelet -
Il m'en doit bien souvenir, ma foi ! j'y fus blessé à la jambe d'un coup de grenade, dont je porte encore les marques. Tatez un peu, de grace ; vous sentirez quelque coup c'était là.
- Cathos -
(après avoir touché l'endroit.)
Il est vrai que la cicatrice est grande.
- Mascarille -
Donnez-moi un peu votre main, et tatez celui-ci ; là, justement au derrière de la tête. Y êtes-vous ?
- Madelon -
Oui, je sens quelque chose.
- Mascarille -
C'est un coup de mousquet que je re?us, la dernière campagne que j'ai faite.
- Jodelet -
(découvrant sa poitrine.)
Voici un autre coup qui me per?a de part en part à l'attaque de Gravelines (17).
- Mascarille -
(Mettant la main sur le bouton de son haut-de-chausses.)
Je vais vous montrer une furieuse plaie.
- Madelon -
Il n'est pas nécessaire : nous le croyons sans y regarder.
- Mascarille -
Ce sont des marques honorables qui font voir ce qu'on est.
- Cathos -
Nous ne doutons point de ce que vous êtes.
- Mascarille -
Vicomte, as-tu là ton carrosse ?
- Jodelet -
Pourquoi ?
- Mascarille -
Nous mènerions promener ces dames hors des portes, et leur donnerions un cadeau (18).
- Madelon -
Nous ne saurions sortir aujourd'hui.
- Mascarille -
Ayons donc les violons pour danser.
- Jodelet -
Ma foi, c'est bien avisé.
- Madelon -
Pour cela, nous y consentons : mais il faut donc quelque surcro?t de compagnie.
- Mascarille -
Holà ! Champagne, Picard, Bourguignon, Cascaret, Basque, la Verdure, Lorrain, Proven?al, la Violette ! Au diable soient tous les laquais ! Je ne pense pas qu'il y ait gentilhomme en France plus mal servi que moi. Ces canailles me laissent toujours seul.
- Madelon -
Almanzor, dites aux gens de monsieur le marquis qu'ils aillent quérir des violons, et nous faites venir ces messieurs et ces dames d'ici près, peupler la solitude de notre bal.
(Almanzor sort.)
- Mascarille -
Vicomte, que dis-tu de ces yeux ?
- Jodelet -
Mais toi-même, marquis, que t'en semble ?
- Mascarille -
Moi, je dis que nos libertés auront peine à sortir d'ici les braies (19) nettes. Au moins, pour moi, je re?ois d'étranges secousses, et mon coeur ne tient plus qu'à un filet.
- Madelon -
Que tout ce qu'il dit est naturel ! Il tourne les choses le plus agréablement du monde.
- Cathos -
Il est vrai qu'il fait une furieuse dépense en esprit.
- Mascarille -
Pour vous montrer que je suis véritable, je veux faire un impromptu là-dessus.
(Il médite.)
- Cathos -
Hé ! je vous en conjure de toute la dévotion de mon coeur, que nous oyons quelque chose qu'on ait fait pour nous.
- Jodelet -
J'aurais envie d'en faire autant ; mais je me trouve un peu incommodé de la veine poétique, pour la quantité des saignées que j'y ai faites ces jours passés.
- Mascarille -
Que diable est-ce là ? Je fais toujours bien le premier vers, mais j'ai peine à faire les autres. Ma foi, ceci est un peu trop pressé : je vous ferai un impromptu à loisir, que vous trouverez le plus beau du monde.
- Jodelet -
Il a de l'esprit comme un démon.
- Madelon -
Et du galant, et du bien tourné.
- Mascarille -
Vicomte, dis-moi un peu, y a-t-il longtemps que tu n'as vu la comtesse ?
- Jodelet -
Il y a plus de trois semaines que je ne lui ai rendu visite.
- Mascarille -
Sais-tu bien que le duc m'est venu voir ce matin, et m'a voulu mener à la campagne courir un cerf avec lui ?
- Madelon -
Voici nos amies qui viennent.
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SCèNE XIII. - Lucile, Célimène, Cathos, Madelon, Mascarille, Jodelet, Marotte, Almanzor, violons.
- Madelon -
Mon Dieu, mes chères (20), nous vous demandons pardon. Ces messieurs ont eu fantaisie de nous donner les ames des pieds, et nous vous avons envoyé quérir pour remplir les vides de notre assemblée.
- Lucile -
Vous nous avez obligées, sans doute.
- Mascarille -
Ce n'est ici qu'un bal à la hate ; mais l'un de ces jours, nous vous en donnerons un dans les formes. Les violons sont-ils venus    
    
		
	
	
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