me feront point de 
mal. 
- Madelon - 
Ma chère, c'est le caractère enjoué. 
- Cathos - 
Je vois bien que c'est un Amilcar (11). 
- Madelon - 
Ne craignez rien : nos yeux n'ont point de mauvais desseins, et votre 
coeur peut dormir en assurance sur leur prud'homie. 
- Cathos - 
Mais de grâce, Monsieur, ne soyez pas inexorable à ce fauteuil qui vous
tend les bras il y a un quart d'heure ; contentez un peu l'envie qu'il a de 
vous embrasser. 
- Mascarille - 
(après s'être peigné et avoir ajusté ses canons.) 
Eh bien, Mesdames, que dites-vous de Paris ? 
- Madelon - 
Hélas ! qu'en pourrions-nous dire ? Il faudrait être l'antipode de la 
raison, pour ne pas confesser que Paris est le grand bureau des 
merveilles, le centre du bon goût, du bel esprit, et de la galanterie. 
- Mascarille - 
Pour moi, je tiens que hors de Paris il n'y a point de salut pour les 
honnêtes gens. 
- Cathos - 
C'est une vérité incontestable. 
- Mascarille - 
Il y fait un peu crotté ; mais nous avons la chaise. 
- Madelon - 
Il est vrai que la chaise est un retranchement merveilleux contre les 
insultes de la boue et du mauvais temps. 
- Mascarille - 
Vous recevez beaucoup de visites ? Quel bel esprit est des vôtres ? 
- Madelon - 
Hélas ! nous ne sommes pas encore connues ; mais nous sommes en 
passe de l'être ; et nous avons une amie particulière qui nous a promis 
d'amener ici tous ces messieurs du Recueil des pièces choisies. 
- Cathos - 
Et certains autres qu'on nous a nommés aussi pour être les arbitres 
souverains des belles choses. 
- Mascarille - 
C'est moi qui ferai votre affaire mieux que personne ; ils me rendent 
tous visite ; et je puis dire que je ne me lève jamais sans une 
demi-douzaine de beaux esprits. 
- Madelon - 
Eh ! mon Dieu ! nous vous serons obligées de la dernière obligation, si 
vous nous faites cette amitié ; car enfin il faut avoir la connaissance de 
tous ces messieurs-là, si l'on veut être du beau monde. Ce sont ceux qui 
donnent le branle à la réputation dans Paris ; et vous savez qu'il y en a
tel dont il ne faut que la seule fréquentation pour vous donner bruit de 
connaisseuse, quand il n'y aurait rien autre chose que cela. Mais, pour 
moi, ce que je considère particulièrement, c'est que, par le moyen de 
ces visites spirituelles, on est instruite de cent choses qu'il faut savoir 
de nécessité, et qui sont de l'essence d'un bel esprit. On apprend par là 
chaque jour les petites nouvelles galantes, les jolies commerces de 
prose et de vers. On sait à point nommé : Un tel a composé la plus jolie 
pièce du monde sur un tel sujet ; une telle a fait des paroles sur un tel 
air ; celui-ci a fait un madrigal sur une jouissance ; celui-là a composé 
des stances sur une infidélité ; monsieur un tel écrivit hier au soir un 
sixain à Mademoiselle une telle, dont elle lui a envoyé la réponse ce 
matin sur les huit heures ; un tel auteur a fait un tel dessein ; celui-là en 
est à la troisième partie de son roman ; cet autre met ses ouvrages sous 
la presse. C'est là ce qui vous fait valoir dans les compagnies, et si l'on 
ignore ces choses, je ne donnerais pas un clou de tout l'esprit qu'on peut 
avoir. 
- Cathos - 
En effet, je trouve que c'est renchérir sur le ridicule, qu'une personne se 
pique d'esprit, et ne sache pas jusqu'au moindre petit quatrain qui se fait 
chaque jour ; et pour moi, j'aurais toutes les hontes du monde, s'il fallait 
qu'on vînt à me demander si j'aurais vu quelque chose de nouveau que 
je n'aurais pas vu. 
- Mascarille - 
Il est vrai qu'il est honteux de n'avoir pas des premiers tout ce qui se 
fait ; mais ne vous mettez pas en peine : je veux établir chez vous une 
académie de beaux esprits, et je vous promets qu'il ne se fera pas un 
bout de vers dans Paris, que vous ne sachiez par coeur avant tous les 
autres. Pour moi, tel que vous me voyez, je m'en escrime un peu quand 
je veux ; et vous verrez courir de ma façon dans les belles ruelles (12) 
de Paris, deux cents chansons, autant de sonnets, quatre cents 
épigrammes et plus de mille madrigaux, sans compter les énigmes et 
les portraits. 
- Madelon - 
Je vous avoue que je suis furieusement pour les portraits : je ne vois 
rien de si galant que cela. 
- Mascarille - 
Les portraits sont difficiles, et demandent un esprit profond : vous    
    
		
	
	
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