la 
partage avec luy,
De l'Etat l'un, & l'autre, & la force, & l'appuy:
Pisandre avant sa mort en parolles expresses,
Avoit reglé le sort de 
nos belles Princesses,
Et cét ordre du Roy caché soigneusement,
Est 
manifeste à tous d'aujourd'huy seulement,
J'en garde une copie, & je 
puis vous la lire,
Si vous le souhaittez. 
SEBASTE. 
Je n'osois vous le dire. 
CLARICE. 
J'ordonne que ma fille Elise,
Regne en Cypre apres mon trespas,
Et 
je veux aussi qu'elle élise,
Pour Espoux le Prince Amintas.
Si 
méprisant ce que j'ordonne
Sur un Prince estranger elle jette les yeux,
Je veux que sa soeur Alcione,
Espousant Amintas succede à ma 
Couronne;
C'est mon dernier vouloir apres celuy des Dieux. 
Elise ne s'est point sur son choix declarée,
Encore qu'elle soit de ce 
Prince adorée,
Et ce fidelle Amant de ce choix incertain,
Attendant 
son mauvais ou son heureux Destin,
Ne sçait à qui des deux d'Elise 
ou d'Alcione,
Il devra le bonheur d'une double Couronne;
Cypre, & 
la Cilicie, où nous donnons des Loix,
Où Lisandre a vaincu le dernier 
de ses Roys
Et s'il eust eu du Ciel une plus longue vie,
Il eust 
poussé plus loin sa conqueste en Asie.
SEBASTE. 
Des peuples asservis le zele est toûjours feint,
Et naturellement l'on 
hait ce que l'on craint,
Comme Cilicien je sçay qu'en cette terre
Pisandre eust eu bien-tost à soûtenir la guerre. 
CLARICE. 
Son frere Nicanor politique, & prudent:
Ferme dans ses desseins; 
ambitieux; ardent,
Chef d'un party puissant; absolu dans les villes,
Peut jetter cét Estat en des guerres civiles,
Si méprisant son fils, & les 
ordres du Roy,
Elise disposoit du Royaume, & de soy,
Elle est 
incessamment de Nicanor pressée,
De découvrir enfin sa secrette 
pensée,
Et pour la découvrir elle a choisi ce jour,
En peu de mots, 
voila l'Estat de nostre Cour. 
SEBASTE. 
Cét himen peut avoir sa raison politique;
Elise peut aussi le trouver 
tirannique,
Si cét objet forcé de son affection,
N'a jamais attiré que 
son aversion,
Ou si quelque autre amant regne en son coeur fidelle
Amintas pourroit-il estre heureux avec elle;
Et quand elle tiendroit 
son sceptre d'Amintas,
D'un époux qui déplaist les dons ne plaisent 
pas,
Contrainte en son amour, & contrainte en sa haine,
Amante 
malheureuse, & malheureuse Reine,
D'un choix violenté le souvenir 
cruel,
Luy feroit de son Trosne un supplice eternel.
Le sceptre, & 
les tresors qu'apporte un himenée
N'en fait point icy bas l'heureuse 
Destinée,
On n'est pas moins captif pour l'estre avec esclat,
Et les 
raisons d'amour ne le sont point d'Estat. 
CLARISE. 
Amintas est bien-fait, genereux; plein de gloire,
Son bras s'est signalé 
par plus d'une victoire,
Il est aymé du peuple, adoré de la Cour,
De 
moindres qualités donneroient de l'amour.
Mais la Princesse vient,
retirez vous; possible
Vas-je la disposer à vous estre visible. 
SCENE II. 
ELIZE, CLARICE. 
ELIZE. 
Quel est cét estranger? 
CLARICE. 
C'est un Cilicien,
Pour qui je vous demande un secret entretien. 
ELIZE. 
Et que peut me vouloir cét étranger, Clarice? 
CLARICE. 
Vous rendre à ce qu'il dit un important service. 
ELIZE. 
Qu'il vienne; mais s'il veut quelque grace de moy,
Je n'ay plus de 
pouvoir depuis la mort du Roy.
Faittes luy donc sçavoir qu'Amintas, 
& son Pere
Sont aujourd'huy les Dieux que la Cypre revere. 
SCENE III. 
ELISE. 
Princesse malheureuse, & qu'un indigne sort,
Contraint des sa 
jeunesse à souhaiter sa mort:
Le Ciel ne te fit don d'une illustre 
naissance,
Que pour faire aux mortels redouter sa puissance,
Il te 
ravit un Throsne à ta naissance acquis:
De tes propres sujets il fait tes 
ennemis,
Et du choix d'un Espoux t'ostant le privilege,
Il te rend 
vers ton Pere ingrate, & sacrilege;
Mais des ordres d'un Pere on se
peut dispenser,
Quand une foy promise, est honteuse à fausser.
On 
me peut faire choir d'un Trosne hereditaire,
Mais me rendre 
inconstante, on ne le sçauroit faire:
Je t'aymeray tousiours, soit que 
loin de ces lieux,
Ton ame dans le Ciel ait place entre les Dieux,
Soit qu'entre les mortels, où tu vis plein de gloire
Tu conserves 
encore Elise en ta memoire;
Soit qu'un ingrat oubly la chasse de ton 
coeur,
Je t'aymeray tousiours d'une constante ardeur,
Prince qui 
meritois une autre destinée,
Prince le seul espoir d'Elise infortunée. 
SCENE IV. 
CLARICE, ELISE, SEBASTE. 
CLARICE. 
Voicy cet étranger. 
ELISE. 
Que voulez vous de moy? 
SEBASTE. 
Orosmane des Mers le redoutable Roy,
Qui sur mille vaisseaux 
portant par tout la guerre,
Fait respecter son nom aux Maistres de la 
terre,
Vous offre sa valeur contre vos ennemis,
Et vingt mille 
soldats à vos ordres soûmis,
Quand vous l'ordonnerez, d'une 
puissante Armée,
Vous verrez à l'instant cette ville enfermée;
Vous 
verrez les Tyrans qui vous donnent la loy,
La recevoir de vous, & 
trembler sous mon Roy 
ELISE. 
On a mal informé vostre vaillant Corsaire,
Et son secours icy ne m'est 
point necessaire;
Mais d'où peuvent venir les soins officieux,
D'un 
homme si funeste à la paix de ces lieux,
Plus craint de nos vaisseaux
que les plus grands orages, Qui tient nos ports bloquez, desole nos 
rivages,
Et qui laissant en paix le reste des humains,
Nous choisit 
pour l'objet de ses faits inhumains; 
SEBASTE. 
Orosmane n'est pas tout ce qu'il paroist estre,
Et possible le temps le 
fera mieux connoistre,
Mais troublast-t'il la Cypre encor plus qu'il ne 
fait,
Il vous distingue fort de ces    
    
		
	
	
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