Le marchand de Venise | Page 8

William Shakespeare
�� ton ennemi. S'il manque �� son engagement, tu auras meilleure grace �� exiger sa punition.
SHYLOCK.--Eh! mais voyez donc comme vous vous emportez! Je voudrais ��tre de vos amis, gagner votre affection, oublier les avanies que vous m'avez faites, subvenir �� vos besoins pr��sents, et ne pas exiger un denier d'usure pour mon argent, et vous ne voulez pas m'entendre! L'offre est pourtant obligeante.
ANTONIO.--Ce serait, en effet, par obligeance.
SHYLOCK.--Et je veux l'avoir cette obligeance; venez avec moi chez un notaire, me signer un simple billet, et pour nous divertir, nous stipulerons qu'en cas que vous ne me rendiez pas, �� tels jour et lieu d��sign��, la somme ou les sommes exprim��es dans l'acte, vous serez condamn�� �� me payer une livre juste de votre belle chair, coup��e sur telle partie du corps qu'il me plaira choisir.
ANTONIO.--J'y consens sur ma foi, et, en signant un pareil billet, je dirai que le Juif est rempli d'obligeance.
BASSANIO.--Vous ne ferez pas pour mon compte un billet de la sorte; j'aime mieux rester dans l'embarras.
ANTONIO.--Eh! ne craignez rien, mon cher: je n'encourrai pas la condamnation. Dans le courant de ces deux mois-ci, c'est-��-dire encore un mois avant l'��ch��ance du billet, j'attends des retours pour neuf fois sa valeur.
SHYLOCK.--O p��re Abraham! ce que c'est que ces chr��tiens, comme la duret�� de leurs proc��d��s les rend soup?onneux sur les intentions des autres! Dites-moi, s'il ne payait pas au terme marqu��, que gagnerais-je en exigeant qu'il rempl?t la condition propos��e? Une livre de la chair d'un homme, prise sur un homme, ne me serait pas si bonne ni si profitable que de la chair de mouton, de boeuf ou de ch��vre. C'est pour m'acqu��rir ses bonnes graces que je lui fais cette offre d'amiti��: s'il veut l'accepter, �� la bonne heure! sinon, adieu; et je vous prie de ne pas mal interpr��ter mon attachement.
ANTONIO.--Oui, Shylock, je signerai ce billet.
SHYLOCK.--En ce cas, allez m'attendre chez le notaire; donnez-lui vos instructions sur ce billet bouffon. Je vais prendre les ducats, donner un coup d'oeil �� mon logis que j'ai laiss�� sous la garde tr��s-peu s?re d'un n��gligent coquin, et je vous rejoins dans l'instant.
(Il sort.)
ANTONIO.--D��p��che-toi, aimable Juif. Cet H��breu se fera chr��tien; il devient traitable.
BASSANIO.--Je n'aime pas de belles conditions accord��es par un mis��rable.
ANTONIO.--Allons: il ne peut y avoir rien �� craindre; mes vaisseaux arriveront un mois avant le terme.
FIN DU PREMIER ACTE.

ACTE DEUXI��ME
SC��NE I
A Belmont.
Fanfare de cors. Entrent LE PRINCE DE MAROC avec sa suite, PORTIA, N��RISSA, et plusieurs autres personnes de sa suite.
LE PRINCE DE MAROC.--Ne vous choquez point de la couleur de mon teint: c'est la sombre livr��e de ce soleil �� la brune chevelure dont je suis voisin, et pr��s duquel je fus nourri. Faites-moi venir le plus beau des enfants du Nord, o�� les feux de Phoebus d��g��lent �� peine les gla?ons suspendus aux toits, et faisons sur nous une incision en votre honneur, pour savoir quel sang est le plus rouge du sien ou du mien. Dame, je puis te le dire, cette figure a intimid�� le brave. Je jure, par mon amour, que les vierges les plus honor��es de nos climats en ont ��t�� ��prises. Je ne voudrais pas changer de couleur, �� moins que ce ne f?t pour vous d��rober quelques pens��es, mon aimable reine.
PORTIA.--Je ne me laisse pas conduire dans mon choix par la seule d��licatesse des yeux d'une fille. D'ailleurs la loterie �� laquelle est remis mon sort ?te �� ma volont�� le droit d'une libre d��cision. Mais mon p��re n'e?t-il pas circonscrit mon choix, et n'e?t-il pas, dans sa sagesse, d��termin�� que je me donnerais pour femme �� celui qui m'obtiendra par les moyens que je vous ai dits, vous me para?triez, prince renomm��, tout aussi digne de mon affection qu'aucun de ceux que j'aie vus jusqu'ici se pr��senter.
LE PRINCE DE MAROC.--Je vous en rends graces. Je vous prie, conduisez-moi �� ces coffres, pour y essayer ma fortune. Par ce cimeterre, qui a tu�� le sophi et un prince de Perse, et qui a gagn�� trois batailles sur le sultan Soliman, je voudrais, pour t'obtenir, foudroyer de mes regards l'oeil le plus farouche, vaincre en bravoure le coeur le plus intr��pide de l'univers, arracher les petits ours des mamelles de leur m��re; que dis-je? insulter au lion rugissant apr��s sa proie. Mais, h��las! cependant, quand Hercule et Lichas joueront aux d��s pour d��cider lequel vaut le mieux des deux, le plus haut point peut sortir de la main la plus faible; et voil�� Hercule vaincu par son page. Et moi, conduit de m��me par l'aveugle fortune, je puis manquer ce qu'obtiendra un moins digne, et en mourir de douleur.
PORTIA.--Il vous en faut courir les chances, et renoncer �� choisir; ou, avant de choisir, il faut jurer que si vous choisissez mal, vous ne parlerez �� l'avenir de mariage ��
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