enfants, mais 
confiant dans le Dieu qui prend soin de ses créatures et jusqu'au plus 
petit de ses oiseaux, le prie de vouloir bien vous accorder encore des 
jours calmes et heureux. Si nous n'avions pas d'autre destinée, je vous 
dirais adieu! oui un adieu qui, peut-être, serait éternel; mais à des 
chrétiens, à ceux qui croient en la parole sainte, je vous dis au revoir! 
Oui, encore une fois, au revoir!...." 
La scène qui suivit se conçoit plutôt qu'elle ne se décrit. Nous nous 
permettrons d'emprunter à M. Rameau le récit que fait M. Ney, sur le 
lamentable événement du lendemain: 
"Le 10 septembre fut le jour fixé pour l'embarquement. Dés le point du 
jour les tambours résonnèrent dans les villages, et à huit heures le triste 
son de la cloche avertit les pauvres Français que le moment de quitter 
leur terre natale était arrivé. Les soldats entrèrent dans les maisons et en 
firent sortir tous les habitants, qu'on rassembla sur la place. Jusque là 
chaque famille était restée réunie et une tristesse indicible régnait parmi 
le peuple. Mais quand le tambour annonça l'heure de l'embarquement, 
quand il leur fallut abandonner pour toujours la terre où ils étaient nés, 
se séparer de leurs mères, de leurs parents, de leurs amis, sans espoir de 
les revoir jamais; emmenés par des étrangers leurs ennemis; dispersés 
parmi ceux dont ils différaient par le langage, les coutumes, la religion; 
alors accablés par le sentiment de leurs misères, ils fondirent en larmes 
et se précipitèrent dans les bras les uns des autres dans un long et 
dernier embrassement."
"Mais le tambour battait toujours et on les poussa vers les bâtiments 
stationnés dans la rivière. 260 jeunes gens furent désignés d'abord pour 
être embarqués sur le premier bâtiment, mais ils s'y refusèrent, 
déclarant qu'ils n'abandonneraient pas leurs parents, et qu'ils, ne 
partiraient qu'au milieu de leurs famille. Leur demande fut rejetée! les 
soldats croisèrent la baïonnette et marchèrent sur eux; ceux qui 
voulurent résister furent blessés, et tous furent obligés de se soumettre à 
cette horrible tyrannie." 
"Depuis l'église jusqu'au lieu de l'embarquement, la route était bordée 
d'enfants, de femmes qui, à genoux, au milieu de pleurs et de sanglots, 
bénissaient ceux qui passaient, faisaient leurs tristes adieux à leurs 
maris, à leurs fils, leur tendant une main tremblante, que leurs parents 
parvenaient quelquefois à saisir, mais le soldat brutal venait bientôt les 
séparer. Les jeunes gens furent suivis par les hommes plus âgés, qui 
traversèrent aussi, à pas lents, cette scène déchirante; toute la 
population mâle des Mines fut jetée à bord de cinq vaisseaux de 
transport stationnés dans la rivière Gaspareaux. Chaque bâtiment était 
sous la garde de 6 officiers et de 80 soldats. A mesure que d'autres 
navires arrivèrent, les femmes et les enfants y furent embarqués et 
éloignés ainsi, en masse, des champs de la Nouvelle-Écosse. Le sort 
aussi déplorable qu'inouï de ces exilés excita la compassion de la 
soldatesque même.... Pendant plusieurs soirées consécutives les 
bestiaux se réunirent autour des ruines fumantes, et semblaient y 
attendre le retour de leurs maîtres, tandis que les fidèles chiens de garde 
hurlaient près des foyers déserts." 
M. St.-Aubin, comme toutes les autres notabilités, fut l'objet d'une 
surveillance particulière. Malgré les efforts héroïques de Jean Renousse, 
malgré les ruses et les stratagèmes qu'il employa pour sauver son 
maître de la proscription, Celui-ci fut obligé de subir la loi cruelle du 
plus fort. Blessé grièvement dans la lutte qui venait d'avoir lieu, ce ne 
fut qu'avec peine que Jean Renousse lui-même réussit à se soustraire 
aux mains des ravisseurs. Il gravit une petite éminence, et ce fut là, la 
mort dans l'âme, qu'il fut témoin des scènes de violence et de brutalité 
qui viennent d'être racontées. Malgré son état de faiblesse, il suivit d'un 
oeil morne et désespéré la chaloupe qui emportait son bienfaiteur, se
reprochant amèrement de n'avoir pas réussi à le sauver. En dépit des 
tristes préoccupations auxquelles il était en proie, Jean Renousse ne pût 
s'empêcher de remarquer un point noir qui suivait l'embarcation. C'était 
Phédor. Le noble animal, quoique blessé, avait voulu suivre son maître, 
pour le protéger et le défendre au besoin. Il réalisait une fois de plus 
l'idée du peintre qui représente un chien suivant seul le corbillard qui 
conduit son maître à sa dernière demeure. C'est le dernier ami qui reste 
quand nous avons tout perdu du côté des hommes! Il vit tout-à-coup un 
matelot se lever et asséner un coup de rames sur la tête du fidèle 
serviteur, celui-ci poussa un gémissement plaintif et disparut. C'en était 
trop, épuisé par le sang qu'il avait perdu et par les émotions de la 
journée, Jean Renousse perdit connaissance. Lorsqu'il revint à lui, 
Phédor, couché auprès de lui, léchait son visage et ses mains. comme 
s'il eut voulu le rappeler à la    
    
		
	
	
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