moi, redevenu libre grâce aux redoutables 
insurrections des Enfants du Gui, m'a légué la liberté, ce bien le plus 
précieux de tous; je te le lèguerai aussi. 
Notre chère patrie a donc, à force de luttes, de persévérance contre les 
Romains, successivement reconquis, au prix du sang de ses enfants, 
presque toutes ses libertés. Un fragile et dernier lien nous attache 
encore à Rome, aujourd'hui notre alliée, autrefois notre impitoyable 
dominatrice; mais ce fragile et dernier lien brisé, nous retrouverons 
notre indépendance absolue, et nous reprendrons notre antique place à 
la tête des grandes nations du monde. 
Avant de te faire connaître certaines circonstances de ma vie, mon 
enfant, je dois suppléer en quelques lignes au vide que laisse dans 
l'histoire de notre famille l'abstention de ceux de nos aïeux qui, par 
suite de leur manque d'instruction et du malheur des temps, n'ont pu 
ajouter leurs récits à notre légende. Leur vie a dû être celle de tous les 
Gaulois qui, malgré les chaînes de l'esclavage, ont, pas à pas, siècle à 
siècle, conquis par la révolte et la bataille l'affranchissement de notre 
pays. 
Tu liras, dans les dernières lignes écrites par notre aïeul Fergan, époux 
de Geneviève, que, malgré les serments des Enfants du Gui et de 
nombreux soulèvements, dont l'un, et des plus redoutables, eut à sa tête 
Sacrovir, ce digne émule du chef des cent vallées, la tyrannie de Rome, 
imposée depuis César à la Gaule, durait toujours. En vain Jésus de 
Nazareth avait prophétisé les temps où les fers des esclaves seraient
brisés, les esclaves traînaient toujours leurs chaînes ensanglantées; 
cependant notre vieille race, affaiblie, mutilée, énervée ou corrompue 
par l'esclavage, mais non soumise, ne laissait passer que peu d'années 
sans essayer de briser son joug; les secrètes associations des Enfants du 
Gui couvraient le pays et donnaient d'intrépides soldats à chacune de 
nos révoltes contre Rome. 
Après la tentative héroïque de Sacrovir, dont tu liras la mort sublime 
dans les récits de notre aïeul Fergan[1], le chétif et timide esclave 
tisserand, d'autres insurrections éclatèrent sous les empereurs romains 
Tibère et Claude; elles redoublèrent d'énergie pendant les guerres 
civiles qui, sous le règne de Néron, divisèrent l'Italie. Vers cette époque, 
l'un de nos héros, VINDEX, aussi intrépide que le CHEF DES CENT 
VALLÉES ou que Sacrovir, tint longtemps en échec les armées 
romaines. CIVILS, autre patriote gaulois, s'appuyant sur les prophéties 
de VELLÉDA, une de nos druidesses, femme virile et de haut conseil, 
digne de la vaillance et de la sagesse de nos mères, souleva presque 
toute la Gaule, et commença d'ébranler la puissance romaine. Plus tard, 
enfin, sous le règne de l'empereur Vitellius, un pauvre esclave de 
labour, comme l'avait été notre aïeul Guilhern, se donnant comme 
Messie et libérateur de la Gaule, de même que Jésus de Nazareth s'était 
donné comme Messie et libérateur de la Judée, poursuivit avec une 
patriotique ardeur l'oeuvre d'affranchissement commencée par le chef 
des cent vallées, et continuée par Sacrovir, Vindex, Civilis et tant 
d'autres héros. Cet esclave laboureur, nommé MARIK, âgé de 
vingt-cinq ans à peine, robuste, intelligent, d'une héroïque bravoure, 
était affilié aux Enfants du Gui; nos vénérés druides, toujours 
persécutés, avaient parcouru la Gaule pour exciter les tièdes, calmer les 
impatients et prévenir chacun du terme fixé pour le soulèvement. Il 
éclate; Marik, à la tête de dix mille esclaves, paysans comme lui, armés 
de fourches et de faux, attaque, sous les murs de Lyon, les troupes 
romaines de Vitellius. Cette première tentative avorte; les insurgés sont 
presque entièrement détruits par l'armée romaine, trois fois supérieure 
en nombre. Loin d'accabler les insurgés gaulois, cette défaite les exalte; 
des populations entières se soulèvent à la voix des druides prêchant la 
guerre sainte: les combattants semblent sortir des entrailles de la terre; 
Marik se voit bientôt à la tête d'une nombreuse armée. Doué par les
dieux du génie militaire, il discipline ses troupes, les encourage, leur 
inspire une confiance aveugle, marche vers les bords du Rhin, où 
campait, protégée par ses retranchements, la réserve de l'armée romaine, 
l'attaque, la bat, et force des légions entières, qu'il fait prisonnières, à 
changer leurs enseignes pour notre antique coq gaulois. Ces légions 
romaines, devenues presque nos compatriotes par leur long séjour dans 
notre pays, entraînées par l'ascendant militaire de Marik, se joignent à 
lui, combattent les nouvelles cohortes romaines venues d'Italie, les 
dispersent ou les anéantissent. L'heure de la délivrance de la Gaule 
allait sonner... Marik tombe entre les mains de l'immonde empereur 
Vespasien, par une lâche trahison... Ce nouveau héros de la Gaule, 
criblé de blessures, est livré aux animaux du cirque, comme notre aïeul 
Sylvest. 
La mort de ce martyr de la liberté exaspéra les populations; sur tous les 
points de la Gaule, de nouvelles insurrections éclatent. La parole de 
Jésus de Nazareth, proclamant l'esclave l'égal de son maître, 
commence à    
    
		
	
	
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