La vie errante

Guy de Maupassant
La vie errante

The Project Gutenberg EBook of La vie errante, by Guy de Maupassant
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Title: La vie errante
Author: Guy de Maupassant
Release Date: January 24, 2005 [EBook #14793]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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ERRANTE ***

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(BnF/Gallica)

LA VIE ERRANTE
PAR

GUY DE MAUPASSANT
[Illustration]

LA VIE ERRANTE
DU MÊME AUTEUR
LES SOEURS RONDOLI. MONSIEUR PARENT. LE HORLA.
PIERRE ET JEAN. CLAIR DE LUNE. LA MAIN GAUCHE. FORT
COMME LA MORT.
En préparation:
NOTRE COEUR.

LA VIE ERRANTE
PAR
GUY DE MAUPASSANT
PARIS PAUL OLLENDORFF, ÉDITEUR 28 bis, RUE DE
RICHELIEU
1890
Tous droits de traduction et de reproduction réserves pour tous les pays
y compris la Suède et la Norvège.
IL A ÉTÉ TIRÉ À PART
105 EXEMPLAIRES SUR PAPIER DE LUXE NUMÉROTÉS À LA
PRESSE
Cinq exemplaires sur papier du Japon, 1 à 5; Cent exemplaires sur

papier de Hollande, 6 à 105.

LA VIE ERRANTE

I
LASSITUDE
J'ai quitté Paris et même la France, parce que la tour Eiffel finissait par
m'ennuyer trop.
Non seulement on la voyait de partout, mais on la trouvait partout, faite
de toutes les matières connues, exposée à toutes les vitres, cauchemar
inévitable et torturant.
Ce n'est pas elle uniquement d'ailleurs qui m'a donné une irrésistible
envie de vivre seul pendant quelque temps, mais tout ce qu'on a fait
autour d'elle, dedans, dessus, aux environs.
Comment tous les journaux vraiment ont-ils osé nous parler
d'architecture nouvelle à propos de cette carcasse métallique, car
l'architecture, le plus incompris et le plus oublié des arts aujourd'hui, en
est peut-être aussi le plus esthétique, le plus mystérieux et le plus nourri
d'idées?
Il a eu ce privilège à travers les siècles de symboliser pour ainsi dire
chaque époque, de résumer, par un très petit nombre de monuments
typiques, la manière de penser, de sentir et de rêver d'une race et d'une
civilisation.
Quelques temples et quelques églises, quelques palais et quelques
châteaux contiennent à peu près toute l'histoire de l'art à travers le
monde, expriment à nos yeux mieux que des livres, par l'harmonie des
lignes et le charme de l'ornementation, toute la grâce et la grandeur
d'une époque.

Mais je me demande ce qu'on conclura de notre génération si quelque
prochaine émeute ne déboulonne pas cette haute et maigre pyramide
d'échelles de fer, squelette disgracieux et géant, dont la base semble
faite pour porter un formidable monument de Cyclopes et qui avorte en
un ridicule et mince profil de cheminée d'usine.
C'est un problème résolu, dit-on. Soit,--mais il ne servait à rien!--et je
préfère alors à cette conception démodée de recommencer la naïve
tentative de la tour de Babel, celle qu'eurent, dès le douzième siècle, les
architectes du campanile de Pise.
L'idée de construire cette gentille tour à huit étages de colonnes de
marbre, penchée comme si elle allait toujours tomber, de prouver à la
postérité stupéfaite que le centre de gravité n'est qu'un préjugé inutile
d'ingénieur et que les monuments peuvent s'en passer, être charmants
tout de même, et faire venir après sept siècles plus de visiteurs surpris
que la tour Eiffel n'en attirera dans sept mois, constitue, certes, un
problème,--puisque problème il y a,--plus original que celui de cette
géante chaudronnerie, badigeonnée pour des yeux d'Indiens.
Je sais qu'une autre version veut que le campanile se soit penché tout
seul. Qui le sait? Le joli monument garde son secret toujours discuté et
impénétrable.
Peu m'importe, d'ailleurs, la tour Eiffel. Elle ne fut que le phare d'une
kermesse internationale, selon l'expression consacrée, dont le souvenir
me hantera comme le cauchemar, comme la vision réalisée de l'horrible
spectacle que peut donner à un homme dégoûté la foule humaine qui
s'amuse.
Je me garderai bien de critiquer cette colossale entreprise politique,
l'Exposition universelle, qui a montré au monde, juste au moment ou il
fallait le faire, la force, la vitalité, l'activité et la richesse inépuisable de
ce pays surprenant: la France.
On a donné un grand plaisir, un grand divertissement et un grand
exemple aux peuples et aux bourgeoisies. Ils se sont amusés de tout
leur coeur. On a bien fait et ils ont bien fait.

J'ai seulement constaté, dès le premier jour, que je ne suis pas créé pour
ces plaisirs-là.
Après avoir visité avec une admiration profonde la galerie des
machines et les fantastiques découvertes de
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