que 
tous ses camarades. 
-- Nous vous laissons aller pour cette fois, Harrison, dit-il. Sont-ce là 
vos fils? 
-- Celui-ci est mon neveu, maître. 
-- Voici une guinée pour lui. Il ne pourra pas dire que je l'aie privé de 
son oncle. 
Et ayant mis ainsi les rieurs de son côté par la façon gaie de prendre les 
choses, il fit claquer son fouet et l'on partit à fond de train pour faire en 
moins de cinq heures le trajet de Londres, tandis que Harrison, son fer 
non achevé à la main, rentrait chez lui en sifflant. 
II -- LE PROMENEUR DE LA FALAISE ROYALE 
Tel était donc le champion Harrison. 
Il faut maintenant que je dise quelques mots du petit Jim, non 
seulement parce qu'il fut mon compagnon de jeunesse, mais parce qu'en 
avançant dans la lecture de ce livre, vous vous apercevrez que c'est son 
histoire encore plus que la mienne et qu'il arriva un temps où son nom 
et sa réputation furent sur les lèvres de tout le peuple anglais. 
Vous prendrez donc votre parti de m'entendre vous exposer son 
caractère, tel qu'il était à cette époque, et particulièrement vous raconter 
une aventure très singulière qui n'est pas de nature à s'effacer jamais de 
notre mémoire à tous deux. 
On était bien surpris en voyant Jim avec son oncle et sa tante, car il 
avait l'air d'appartenir à une race, à une famille bien différentes de la 
leur. 
Souvent, je les ai suivis des yeux quand ils longeaient les bas- côtés de 
l'église le dimanche, tout d'abord l'homme aux épaules carrées, aux 
formes trapues, puis la petite femme à la physionomie et aux regards 
soucieux et enfin ce bel adolescent aux traits accentués, aux boucles
noires, dont le pas était si élastique et si léger qu'il ne paraissait tenir à 
la terre que par un lien plus mince que les villageois à la lourde allure 
dont il était entouré. 
Il n'avait point encore atteint ses six pieds de hauteur, mais pour peu 
qu'on se connût en hommes (et toutes les femmes au moins s'y 
entendent) il était impossible de voir ses épaules parfaites, ses hanches 
étroites, sa tête fière posée sur son cou, comme un aigle sur son 
perchoir, sans éprouver cette joie tranquille que nous donnent toutes les 
belles choses de la nature, cette sorte de satisfaction de soi que l'on 
ressent, en leur présence, comme si l'on avait contribué à leur création. 
Mais nous avons l'habitude d'associer la beauté chez un homme avec la 
mollesse. 
Je ne vois aucune raison à cette association d'idées; en tout cas, la 
mollesse n'apparut jamais chez Jim. 
De tous les hommes que j'ai connus, il n'en est aucun dont le coeur et 
l'esprit rappelassent davantage la dureté du fer. 
En était-il un seul parmi nous qui fût capable d'aller de son pas ou de le 
suivre, soit à la course, soit à la nage? 
Qui donc, dans toute la campagne des environs, aurait osé se pencher 
par-dessus l'escarpement de Wolstonbury et descendre jusqu'à cent 
pieds du bord, pendant que la femelle du faucon battait des ailes à ses 
oreilles, en de vains efforts, pour l'écarter de son nid. 
Il n'avait que seize ans et ses cartilages ne s'étaient pas encore ossifiés, 
quand il se battit victorieusement avec Lee le Gypsy, de Burgess Hill, 
qui s'était donné le surnom de Coq des dunes du sud. 
Ce fut après cela que le champion Harrison entreprit de lui donner des 
leçons régulières de boxe. 
-- J'aimerais autant que vous renonciez à la boxe, petit Jim, dit- il, et 
madame est de mon avis, mais puisque vous tenez à mordre, ce ne sera 
pas ma faute si vous ne devenez pas capable de tenir tête à n'importe 
qui du pays du sud. 
Et il ne mit pas longtemps à tenir sa promesse. 
J'ai déjà dit que le petit Jim n'aimait guère ses livres, mais par là 
j'entendais des livres d'école, car dès qu'il s'agissait de romans de 
n'importe quel sujet qui touchait de près ou de loin aux aventures, à la 
galanterie, il était impossible de l'en arracher, avant qu'il eût fini. 
Lorsqu'un livre de cette sorte lui tombait entre les mains, Friar's Oak et
la forge n'étaient plus pour lui qu'un rêve et sa vie se passait à parcourir 
l'Océan, à errer sur les vastes continents, en compagnie des héros du 
romancier. 
Et il m'entraînait à partager ses enthousiasmes, si bien que je fus 
heureux de me faire le Vendredi de ce _Crusoé_, quand il décida que le 
petit bois de Clayton était une île déserte et que nous y étions jetés pour 
une semaine. 
Mais lorsque je m'aperçus qu'il s'agissait de coucher en plein air, sans 
abri, toutes les nuits, et qu'il proposa de nous nourrir de moutons des 
dunes, (de chèvres sauvages,    
    
		
	
	
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