sçût qu'il la cherchoit, ni 
qu'elle fût l'objet de sa curiosité. Elle lui apprit les obligations qu'elle 
avoit à Mgr. le Duc d'Orléans, qui payoit sa pension depuis qu'il l'avoit 
vue en passant à Châlons au retour de Metz en 1744. Elle témoigna 
beaucoup de regret d'avoir été détournée de profiter des offres que ce 
Prince charitable lui avoit faites alors, de la faire venir dans un Couvent 
de Paris. M. de la Condamine promit à Mlle le Blanc d'être l'interprète 
de ses sentimens auprès de S. A. S. En effet, le Prince informé par lui 
de la situation de la Dlle le Blanc, & sur le témoignage que le grand 
Vicaire de Châlons rendit de sa conduite, la fit venir à Paris, la plaça 
aux Nouvelles Catholiques de la rue Sainte Anne, l'y alla voir & 
l'interrogea lui-même pour savoir si elle étoit bien instruite. Ce fut là 
qu'elle fit sa première Communion & qu'elle fut confirmée. Transferée 
depuis à la Visitation de Chaillot, toujours sous les auspices de feu Mgr. 
le Duc d'Orléans, elle se disposoit à se faire Religieuse, lorsqu'un coup 
qu'elle reçut à la tête, par la chute d'une fenêtre, & une longue maladie 
qui suivit cet accident, la mirent dans le plus grand danger. On 
désespéra de sa vie, & sur l'avis du Médecin, envoyé par le Prince, elle 
fut transportée par son ordre à Paris aux Hospitalieres du Faubourg S.
Marceau, où elle étoit plus à portée des secours qu'exigeoit son état. 
Mgr. le Duc d'Orleans eut la bonté de la recommander à la Supérieure 
& aux Infirmieres, & de s'engager à payer outre sa pension, tous les 
remèdes & les secours qui seroient jugés nécessaires. Ce Prince a reçu 
sans doute le prix de sa charité en l'autre monde; mais Mlle le Blanc 
n'en a pas beaucoup profité en celui-ci. Elle se trouvoit en quelque sorte 
abandonnée dans une maison où l'on avoit eu l'espérance d'avoir par 
son moyen un Prince pour Protecteur, & en lui une bonne caution pour 
la pension; mais restée infirme & languissante dans ce même lieu, où 
l'on avoit perdu ces points-de-vûe, sans aucune ressource de famille ni 
d'amis, pour l'assister pendant sa maladie, ni même au cas qu'elle revint 
en santé, je laisse à juger quelles pouvoient être ses refléxions, & 
combien d'inattentions, de mortifications même, elle eut à essuyer de la 
part de ceux qui craignoient de n'être pas payés de ce qu'ils avançoient 
pour elle. C'est dans de si tristes circonstances que je la vis pour la 
première fois au mois de Novembre 1752. Elles n'étoient guères plus 
favorables, lorsqu'ayant recouvré un peu de force, elle put me venir dire 
elle-même que Mgr. le Duc d'Orléans, héritier des vertus de son pere, 
s'étoit chargé de payer les neuf mois de sa pension échus depuis la mort 
de ce Prince, & qu'on lui faisoit espérer qu'elle seroit comprise sur l'état 
de S. A. S. pour 200 liv. de pension viagère; à quoi elle ajouta, que 
comme ce dernier article ne seroit décidé que dans le mois de Janvier 
suivant, elle avoit accepté en attendant une petite chambre, qu'une 
personne qu'elle me nomma lui avoit offerte. Mais, lui dis-je, de quoi 
vivre dans cette chambre pendant deux mois, & peut-être plus, 
convalescente comme vous êtes? Pourquoi, dit-elle, avec une confiance 
qui m'étonna, Dieu me seroit-il venu chercher & tirer d'entre les bêtes 
farouches, & me faire Chrétienne? Seroit-ce pour m'abandonner quand 
je le suis, & pour me laisser mourir de faim? Cela n'est pas possible. Je 
ne connois que lui; il est mon pere; la Ste. Vierge est ma mere: ils 
auront soin de moi. Le plaisir que j'ai à rapporter cette réponse, me 
paye avec usure de la peine que j'ai prise à mettre en ordre tout ce que 
l'on vient de lire, & que je terminerai par donner un extrait des réponses 
de Mlle le Blanc aux différentes questions que je lui ai faites depuis 
que je la connois, sur ce qu'elle a pû se rappeller de ses premières 
années. J'y joindrai les conjectures que j'ai promises sur le païs où elle 
est née, & sur les événemens qui ont pû la conduire en France, &
préparer l'avanture singulière de sa découverte & de sa prise. 
Mlle le Blanc avoue qu'elle n'a commencé à réfléchir que depuis qu'elle 
a reçu quelque éducation; & que tout le temps qu'elle a passé dans les 
bois, elle n'avoit presque d'autres idées que le sentiment de ses besoins, 
& le désir de les satisfaire. Elle n'a mémoire ni de pere ni de mere, ni 
d'aucune personne de sa Patrie, ni presque de ton païs même; si ce n'est, 
qu'elle ne se rappelle point d'y avoir vû des maisons, mais seulement 
des trous en terre, & des espèces de huttes comme des    
    
		
	
	
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