nécessaires au service du lendemain, et ils sortaient tout humides des 
presses de la république. La plus grande incertitude régnait sur les 
approvisionnemens, et pendant plusieurs jours on n'avait pu distribuer 
que quelques onces de pain ou de riz au peuple. 
La première demande fut une demande de fonds. D'après la constitution 
nouvelle, il fallait que toute dépense fût précédée d'une demande de 
fonds, avec allocation à chaque ministère. Les deux conseils 
accordaient la demande, et alors la trésorerie, qui avait été rendue 
indépendante du directoire, comptait les fonds accordés par le décret 
des deux conseils. Le directoire demanda d'abord trois milliards en 
assignats, qu'on lui accorda, et qu'il fallut échanger sur-le-champ contre 
du numéraire. Était-ce la trésorerie ou le directoire qui devait faire la 
négociation en numéraire? c'était là une première difficulté. La 
trésorerie, en faisant elle-même des marchés, sortait de ses attributions 
de simple surveillance. On résolut cependant la difficulté en lui 
attribuant la négociation du papier. Les trois milliards pouvaient 
produire au plus vingt ou vingt-cinq millions écus. Ainsi ils pouvaient 
suffire tout au plus aux premiers besoins courans. Sur-le-champ on se 
mit à travailler à un plan de finances, et le directoire annonça aux deux 
conseils qu'il le leur soumettrait sous quelques jours. En attendant il 
fallait faire vivre Paris, qui manquait de tout. Il n'y avait plus de 
système organisé de réquisition; le directoire demanda la faculté 
d'exiger, par voie de sommation, dans les départemens voisins de celui 
de la Seine, la quantité de deux cent cinquante mille quintaux de blé, à 
compte sur l'impôt foncier payable en nature. Le directoire songea 
ensuite à demander une foule de lois pour la répression des désordres 
de toute espèce, et particulièrement de la désertion, qui diminuait 
chaque jour la force des armées. En même temps il se mit à choisir les 
individus qui devaient composer l'administration. Merlin (de Douai) fut 
appelé au ministère de la justice; on fit venir Aubert-Dubayet de
l'armée des côtes de Cherbourg pour lui donner le portefeuille de la 
guerre; Charles Lacroix fut placé aux affaires étrangères; Faypoult aux 
finances; Benezech, administrateur éclairé, à l'intérieur. Le directoire 
s'étudia ensuite à trouver, dans la multitude de solliciteurs qui 
l'assiégeaient, les hommes les plus capables de remplir les fonctions 
publiques. Il n'était pas possible que dans cette précipitation il ne fît de 
très mauvais choix. Il employa surtout beaucoup de patriotes, trop 
signalés pour être impartiaux et sages. Le 13 vendémiaire les avait 
rendus nécessaires, et avait fait oublier la crainte qu'ils inspiraient. Le 
gouvernement entier, directeurs, ministres, agens de toute espèce, fut 
donc formé en haine du 13 vendémiaire, et du parti qui avait provoqué 
cette journée. Les députés conventionnels eux-mêmes ne furent pas 
encore rappelés de leurs missions; et pour cela le directoire n'eut qu'à 
ne pas leur notifier son installation; il voulait ainsi leur donner le temps 
d'achever leur ouvrage. Fréron, envoyé dans le Midi pour y réprimer les 
fureurs contre-révolutionnaires, put continuer sa tournée dans ces 
contrées malheureuses. Les cinq directeurs travaillaient sans relâche, et 
déployaient dans ces premiers momens le même zèle qu'on avait vu 
déployer aux membres du grand comité de salut public, dans les jours à 
jamais mémorables de septembre et octobre 1793. 
Malheureusement, les difficultés de cette tâche étaient aggravées par 
des défaites. La retraite à laquelle l'armée de Sambre-et-Meuse avait été 
obligée donnait lieu aux bruits les plus alarmans. Par le plus vicieux de 
tous les plans, et la trahison de Pichegru, l'invasion projetée en 
Allemagne n'avait pas du tout réussi, comme on l'a vu. On avait voulu 
passer le Rhin sur deux points, et occuper la rive droite par deux 
armées. Jourdan, parti de Dusseldorf, après avoir passé le fleuve avec 
beaucoup de bonheur, s'était trouvé sur la Lahn, serré entre la ligne 
prussienne et le Rhin, et manquant de tout dans un pays neutre, où il ne 
pouvait pas vivre à discrétion. Cependant cette détresse n'aurait duré 
que quelques jours s'il avait pu s'avancer dans le pays ennemi, et se 
joindre à Pichegru, qui avait trouvé, par l'occupation de Manheim, un 
moyen si facile et si peu attendu de passer le Rhin. Jourdan aurait 
réparé, par cette jonction, le vice du plan de campagne qui lui était 
imposé; mais Pichegru, qui débattait encore les conditions de sa 
défection avec les agens du prince de Condé, n'avait jeté au-delà du 
Rhin qu'un corps insuffisant. Il s'obstinait à ne pas passer le fleuve avec
le gros de son armée, et laissait Jourdan seul en flèche au milieu de 
l'Allemagne. Cette position ne pouvait pas durer. Tous ceux qui avaient 
la moindre notion de la guerre tremblaient pour Jourdan. Hoche, qui, 
tout en commandant en Bretagne, jetait un regard d'intérêt sur les 
opérations des autres armées, en écrivait à tout le monde. Jourdan fut 
donc obligé de se retirer    
    
		
	
	
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