il la surchargea d'une telle responsabilité, qu'il la fit pressante 
et indispensable. De là sa précipitation pour l'atteindre, afin de sortir 
d'une position si critique. 
Au reste, qu'on ne se presse point de juger un génie aussi grand et aussi 
universel: bientôt on l'entendra lui-même; on verra combien de 
nécessités le précipitèrent, et qu'en admettant même que la rapidité de 
son expédition ait été téméraire, le succès l'aurait vraisemblablement 
couronnée, si l'affaiblissement précoce de sa santé eût laissé, aux forces
physiques de ce grand homme toute la vigueur qu'avait conservée son 
esprit. 
 
CHAPITRE II. 
QUANT à la Prusse, dont Napoléon était le maître, on ne sait si ce fut 
son incertitude sur le sort qu'il lui réservait, ou sur l'époque de la guerre, 
qui lui fit refuser, en 1810, l'alliance qu'elle lui proposait, et dont il 
dicta lui-même les, conditions en 1812. 
Son éloignement pour Frédéric-Guillaume était remarquable. On avait 
souvent entendu Napoléon reprocher au cabinet prussien ses traités 
avec la république française. «C'était, disait-il, avoir abandonné la 
cause des rois.». Selon lui, «les négociations de la cour de Berlin avec 
le directoire décelaient une politique timide, intéressée, sans noblesse, 
qui sacrifiait sa dignité et la cause générale des trônes à de petits 
agrandissemens.» Chaque fois, que, sur ses cartes, il suivait le tracé des 
frontières prussiennes, il s'irritait de les voir encore si étendues, et 
s'écriait: «Se peut-il que j'aie laissé à cet homme tant de pays!» 
Cette aversion pour un prince pacifique et doux étonnait. Comme rien 
dans Napoléon n'est indigne de l'histoire, on doit en rechercher les 
causes. Quelques-uns en font remonter l'origine aux refus que le 
premier consul éprouva de Louis XVIII quand il lui fit offrir des 
arrangemens par l'intermédiaire du roi de Prusse: ils croient que 
Napoléon; s'en prit au médiateur de l'inutilité de sa médiation. D'autres 
l'attribuent à l'enlèvement de l'agent anglais Rumbolt, que Napoléon fit 
saisir à Hambourg, et que Frédéric, protecteur de la neutralité du nord 
de l'Allemagne, l'obligea de rendre. Jusque-là une correspondance 
secrète avait lié Frédéric et Napoléon; elle était si intime qu'ils se 
confiaient jusqu'à des détails de leur intérieur: cet événement la fit, 
dit-on, cesser. 
Cependant, au commencement de 1805, la Russie, l'Autriche et 
l'Angleterre cherchaient encore vainement à engager Frédéric dans leur 
troisième coalition contre la Finance. La cour de Berlin, les princes, la
reine, Hardenberg, et toute la jeunesse militaire prussienne, excités par 
l'ardeur de faire valoir l'héritage de gloire que leur avait laissé le grand 
Frédéric, ou par le désir d'effacer la honte de la campagne de 1792, 
s'unissaient au voeu de ces trois puissances; mais la politique pacifique 
de Frédéric et de son ministre Haugwitz leur résistait, quand la 
violation du territoire prussien vers Anspach, par le passage d'un corps 
français, exaspéra tellement toutes les passions prussiennes, que leur cri 
de guerre prévalut. 
Alexandre était alors en Pologne; on l'appelle à Postdam; il y court, et, 
le 3 novembre 1805, il engage Frédéric dans la troisième coalition. 
Aussitôt l'armée prussienne s'éloigne des frontières russes, et M. de 
Haugwitz se rend à Brünn pour en menacer Napoléon. Mais la bataille 
d'Austerlitz lui impose silence, et, quatorze jours après, l'habile 
ministre, s'étant agilement retourné vers le vainqueur, signe avec lui le 
partage des fruits de la victoire. 
Cependant Napoléon dissimule son mécontentement; car il a son armée 
à réorganiser, le grand-duché de Berg à donner à Murat son beau-frère, 
Neufchâtel à Berthier, Naples à conquérir pour son frère Joseph, la 
Suisse à médiatiser, le corps germanique à dissoudre, la confédération 
du Rhin à former: il veut s'en faire déclarer protecteur; changer en un 
royaume la république hollandaise et la donner à son frère Louis; c'est 
pourquoi, le 15 décembre, il a cédé le Hanovre à la Prusse, en échange 
d'Anspach, de Clèves et de Neufchâtel. 
D'abord la possession du Hanovre séduisit Frédéric; mais, quand il 
fallut signer, sa pudeur hésita: il ne voulut accepter cette province qu'à 
demi et comme un dépôt. Napoléon, ne put concevoir une politique si 
timide. «Ce prince, s'écria-t-il, n'ose donc faire ni la paix ni la guerre? 
Me préfère-t-il les Anglais? est-ce encore une coalition qui se prépare? 
méprise-t-on mon alliance?» Cette supposition l'indigne, et le 8 mars, 
par un nouveau traité, il force, Frédéric à déclarer la guerre à 
l'Angleterre, à s'emparer du Hanovre, et à recevoir des garnisons 
françaises dans Wesel et dans Hameln. 
Le roi de Prusse se soumet seul; sa cour, ses sujets s'exaspèrent; ils 
reprochent à leur roi de s'être laissé vaincre sans avoir osé combattre, et,
s'exaltant de leurs souvenirs, ils se croient seuls appelés à triompher du 
vainqueur de l'Europe. Dans leur impatience ils insultent le ministre de 
Napoléon: ils ont aiguisé leurs armes sur le seuil de sa porte; Napoléon 
lui-même, ils l'outragent. Leur reine elle-même, si brillante de grâces et 
d'attraits, revêt un    
    
		
	
	
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