et le menton 
nouvellement fauché, offrant l'aspect d'un champ de chaume après la 
moisson; il était parfumé comme une lingère. Entre son pouce et l'index, 
il tenait une petite boite de senteur que de temps en temps il portait et 
ôtait à son nez, qui en reniflait d'humeur, quand je m'approchai de 
lui[14]. Et en même temps il ne cessait de sourire et de babiller; et 
comme les soldats passaient près de lui, emportant les corps morts, il 
les traitait d'impertinents coquins et de mal-appris, de venir apporter 
ainsi un sale et vilain cadavre entre le vent et sa grandeur. Il me 
questionna en termes arrangés et d'un ton de jolie femme: entre autres
choses, il me demanda mes prisonniers au nom de Votre Majesté. Moi, 
dans ce moment, tout irrité, avec mes blessures refroidies, de me sentir 
ainsi harcelé par un perroquet, dans mon ressentiment et mon 
impatience, je lui répondis, sans y faire attention, je ne sais pas quoi... 
qu'il les aurait ou qu'il ne les aurait pas: car il me mettait en fureur 
quand il venait si sautillant, sentant si bon, me parler dans le langage 
d'une femme de chambre de cour, de canons, de tambours et de 
blessures; me dire, Dieu sait à quel propos, qu'il n'y avait rien au monde 
de si admirable que le spermaceti pour des contusions internes... et que 
c'était grand'pitié qu'on allât déterrer, dans les entrailles de la terre 
innocente, ce traître de salpêtre qui a détruit lâchement plus d'un bon et 
robuste compagnon, et que sans ces détestables armes à feu il aurait été 
guerrier comme les autres. C'est, je vous le dis, mon prince, à ce plat 
bavardage, aux propos décousus qu'il me tenait, que je répondis 
indirectement; et je vous en conjure, que son rapport ne soit pas regardé 
ici comme d'assez de valeur pour m'accuser, et venir se mettre entre 
mon attachement et votre haute Majesté. 
[Note 14: 
Who there with angry, When I next came there Took it in snuff. 
Take in snuff répond à ce que nous appelons se sentir monter la 
moutarde au nez. Hotspur joue ici sur l'expression, et prétend que le 
nez du lord qui respirait cette odeur, took it in snuff, le prenait en guise 
de tabac; ce qui veut dire aussi: le prenait avec colère, angry.] 
BLOUNT.--En considérant les circonstances, mon bon seigneur, tout ce 
qu'Henri Percy aura dit à un pareil personnage, en pareil lieu, et dans 
un pareil moment, peut bien, avec tout ce qu'on vous a rapporté, périr 
dans un juste oubli, sans jamais être relevé pour lui nuire, ou fonder 
aucun motif d'accusation; ce qu'il a dit alors, il le désavoue maintenant. 
LE ROI.--Mais cependant il refuse encore ses prisonniers, à moins que 
l'on n'accepte ses réserves, ses conditions, qui sont que nous payerons 
sur-le-champ, à nos frais, la rançon de son beau-frère, de l'extravagant 
Mortimer[15], qui, sur mon âme, a volontairement livré la vie des 
soldats qu'il a menés au combat contre cet indigne magicien et damné
Glendower[16] dont la fille, à ce que nous apprenons, vient tout 
récemment d'épouser le comte des Marches[17]. Ainsi nous viderons 
nos coffres pour racheter un traître et le remettre dans le pays; nous 
irons solder la trahison, et traiter avec la peur quand elle s'est perdue et 
livrée elle-même! Non, qu'il périsse de faim sur les montagnes stériles! 
Jamais je ne regarderai comme mon ami l'homme dont la voix me 
demandera de dépenser un penny pour délivrer et faire rentrer dans mes 
États le rebelle Mortimer. 
[Note 15: Edmond Mortimer, comte des Marches, n'était pas le 
beau-frère, mais le neveu d'Hotspur, par la femme de celui-ci, soeur de 
Roger Mortimer, père d'Edmond. Dans la première scène du troisième 
acte Mortimer, en parlant de lady Percy, femme d'Hotspur, l'appelle sa 
tante.] 
[Note 16: Owen Glendower, ou Glindour Dew, du lieu de sa naissance 
(Glindourure, sur les bords de la Dee), était fils d'un gentilhomme du 
pays de Galles; il avait d'abord étudié à Londres pour suivre la carrière 
du barreau; mais n'ayant pu obtenir justice de lord Ruthwen, qui lui 
retenait les terres provenant de l'héritage de son père, il résolut de se la 
faire par les armes, ravagea les propriétés du lord, emmena ses bestiaux, 
tua ses vassaux, et finit par le faire prisonnier lui-même. Il parvint à une 
telle puissance qu'il se fit en 1402 couronner prince de Galles. Il fut 
mêlé à tous les troubles qui désolèrent le règne de Henri IV; et, après 
des succès divers, mais qui le laissaient toujours sur pied et toujours 
redoutable, il fut enfin totalement défait et réduit à vivre dans les bois 
et dans les cavernes; il y mourut de misère en 1420. Il était regardé 
comme magicien.] 
[Note 17: Hollinshed et les autres chroniqueurs ont parlé de ce prétendu 
mariage.]    
    
		
	
	
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