et retourna dans son gîte, pour ruminer son plan. 
Le blaireau, dans son terrier, s'ennuyait à mourir. A quelque temps de 
là, le lièvre vint le voir: 
--Camarade, lui dit-il en entrant, que se passe-t-il donc? On ne te voit 
plus dans les champs. Serais-tu par hasard malade? 
Le blaireau ne voulut pas expliquer à son visiteur le vrai motif pour 
lequel il se tenait caché, et lui répondit qu'en effet, il se sentait un peu 
malade. 
--Mon cher, repartit alors le lièvre, ce n'est pas en restant ainsi enfermé 
que tu te guériras. Regarde quel temps splendide nous avons 
aujourd'hui! Voyons! ne viens-tu pas faire avec moi un tour de 
promenade? Nous irons à la montagne où nous ramasserons du menu 
bois. 
Le blaireau, d'un côté, s'ennuyait à mourir. De l'autre, il n'avait aucun 
motif de soupçonner le joli lièvre blanc de lui vouloir du mal. Ce fut 
donc sans hésiter qu'il accepta la proposition. Ils partent bras dessus 
bras dessous, s'en vont dans la montagne, ramassent de menus 
branchages, en font des fagots et se les attachent mutuellement sur le 
dos. Puis, ils se disposent à redescendre. Le lièvre avait apporté un 
briquet: car le lièvre avait son plan. Profitant d'un moment où son 
compagnon est distrait, il passe doucement, derrière lui, bat le briquet 
pour en tirer du feu: «Katchikatchi», fait le briquet. 
Le blaireau entend, et sans se retourner: 
--Lièvre, demande-t-il, qu'est-ce qui a fait «Katchikatchi» derrière moi? 
--Ce n'est rien, répond l'autre. La montagne où nous sommes s'appelle
Katchikatchi; c'est son nom que tu as cru entendre! 
Tout en parlant ainsi, le lièvre a mis le feu au fagot du blaireau. La 
flamme en crépitant fait «Ka-pika». Le blaireau demande encore: 
--Qu'est-ce qui a fait «Ka-pika» derrière moi? 
--Oh! ce n'est rien, répond le lièvre. La montagne où nous sommes 
s'appelle aussi Ka-pika; c'est son nom que tu as cru entendre! 
Le fagot brûlait... La flamme atteignit bientôt les poils du blaireau. A la 
première sensation de la douleur, celui-ci poussa un cri d'effroi! Puis, la 
souffrance devenant de plus en plus cuisante, il se roula sur le sol, avec 
des contorsions horribles; enfin, n'en pouvant plus, il se précipita au bas 
de la montagne, et s'enfuit dans sa tanière, où il passa la nuit dans 
d'affreuses tortures. 
Le lendemain matin, le lièvre vint lui faire une seconde visite: 
--Camarade, lui dit-il, avec une tendresse feinte, il t'est survenu hier une 
aventure fort désagréable! J'ai eu pitié de toi. Je suis allé trouver un 
pharmacien de mes amis. Il m'a remis ce remède. Bois-le ce soir, avant 
de t'endormir, et demain tes souffrances auront complètement disparu. 
Et il lui tendit une petite fiole, laquelle contenait un poison très violent, 
qu'il avait lui-même préparé avec des herbes de la montagne. Le 
blaireau, qui ne soupçonnait pas son ami d'avoir à son égard de 
mauvaises intentions, accepta sans méfiance aucune le soi-disant 
remède. Le lièvre lui souhaita alors bonne chance, et le saluant 
profondément, retourna dans son gîte, jouissant en son coeur du succès 
de sa ruse. 
Le blaireau avala le poison. Aussitôt il éprouva dans tout son corps une 
brûlure épouvantable. Il se tordit comme un ver, au milieu d'atroces 
souffrances et se mit à pousser des cris déchirants. Le lendemain, à 
l'aurore, le lièvre vint voir si le blaireau était mort. Celui-ci n'était pas 
mort encore, car les blaireaux ont la vie dure. Il était couché et souffrait 
horriblement.
Le lièvre jugea alors que l'occasion était on ne peut plus favorable pour 
assouvir sa vengeance: 
--Blaireau, lui cria-t-il, tu te souviens sans doute de la vieille Tora, que 
tu as assommée et fait manger à son mari. Eh bien, apprends que les 
dieux punissent toujours le crime. C'est moi qu'ils ont choisi comme 
instrument de leur vengeance. C'est moi qui ai mis le feu à ton fagot de 
bois au mont Katchikatchi. Ce remède que je t'ai apporté hier est un 
violent poison que je t'avais moi-même préparé pour te faire mourir. 
Meurs donc! Et que Gombéiji et Tora soient vengés! 
Il dit, et saisissant une grosse pierre, il en assomma le blaireau, qui ne 
tarda pas à rendre le dernier soupir... 
[Illustration: Le blaireau ne tarda pas à rendre le dernier soupir] 
Le lièvre, après avoir accompli sa mission, se rendit de ce pas chez le 
vieux et la vieille qui l'attendaient dans leur cabane. Il leur raconta dans 
tous les détails l'histoire de la vengeance. Les braves gens furent bien 
heureux d'apprendre la mort de leur ennemi. Grande fut leur 
reconnaissance à l'égard du joli lièvre blanc qui les avait vengés. Ils 
l'adoptèrent pour leur fils, l'appelèrent Usagidono, l'aimèrent et le 
traitèrent bien. Le lièvre commença dès lors à leur rendre toutes sortes 
de services. 
La veuve du blaireau vivait, avec ses deux enfants, dans    
    
		
	
	
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