Contes de Caliban 
 
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Title: Contes de Caliban 
Author: Emile Bergerat 
Release Date: May 12, 2004 [EBook #12332] 
Language: French 
Character set encoding: ISO-8859-1 
*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK CONTES DE CALIBAN *** 
 
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ÉMILE BERGERAT 
CONTES 
DE 
CALIBAN 
 
1909 
 
CONTES FACÉTIEUX 
 
BÉJAREC LE FAISEUR D'ENFANTS 
Vous rappelez-vous l'aventure de cette Américaine extravagante qui amena un jour ses 
deux filles à Victor Hugo pour que le grand poète daignât semer un peu de la graine de
génie lyrique dans la race yankee? Malgré les affirmations les plus positives, je n'avais 
jamais beaucoup cru à cette histoire paradoxale. Mais j'avoue que je suis très ébranlé 
depuis que je connais Béjarec, «le faiseur d'enfants». 
Yan Béjarec a aujourd'hui soixante-seize ans passés; il n'exerce plus. Mais pendant trente 
années, il a propagé l'espèce humaine dans nos villages. Comment vous expliquer cela, ô 
raffinés de la ville, dont tant de romans subtils et de comédies bourgeoises ont faussé la 
philosophie naturelle et dévoyé le sens moral? Magistrats de mon pays qui, en pleine 
crise de dépopulation, autorisez encore le mari infertile à tuer les amants de sa femme, et 
vous, prédicateurs de la scène, qui ne voulez pas voir que l'adultère n'est, le plus souvent, 
qu'une reprise normale de la nature, souffrez que je vous présente ce vieux Celte d'Yan 
Béjarec, coq des poules qui n'en ont pas, et le plus honnête des hommes. 
Pour avoir le prétexte de lui laisser quelque monnaie dans la main, car il est pauvre, je lui 
fais quelquefois poser la barbe et les cheveux, qu'il a encore magnifiques. Par la 
surabondance pileuse, il ressemble au Jupiter Olympien de Phidias, ce type indétrônable 
de la beauté mâle, et le père de tous les dieux. Béjarec, à trente ans, devait être prodigieux, 
et rien de ce qu'on en raconte ici ne m'étonne. Or, la nature, toujours inexorablement 
logique, avait doublé sa puissance attractive d'une vertu d'étalon qui en était l'expression 
même, si j'ose pénétrer ses mystères, et lui fatalisait sa destinée terrestre. Il était de toute 
éternité créé pour tenir tête au malthusianisme. Quant au reste, zéro, et le vieux Yan est 
plus bête encore que cent choux qui pomment! Qu'eût-il fait de l'esprit, le bon être, 
puisque c'est, de nos attributs, celui que la femme prise le moins? 
Béjarec fut d'abord marié. Son mariage même avait, sinon désuni, du moins séparé deux 
soeurs jumelles qui s'adoraient et ne s'étaient point quittées une minute depuis leur 
enfance. L'une s'appelait Marie-Anne et l'autre Anne-Marie. Cette dernière se maria à son 
tour, et le sort voulut que, tandis que Marie-Anne moulait tous les neuf mois un petit ou 
une petite Béjarec, Anne-Marie demeurât désastreusement stérile. C'est une grande 
douleur dans nos campagnes et une honte, et les paysans, quoique chrétiens, ont là-dessus 
des idées du plus pur paganisme. Et Marie-Anne se désolait du chagrin de la chère soeur 
bréhaigne. 
Elle s'en ouvrit un soir à celui qu'elle appelait par badinage son «à-tout-coup», et, de fil 
en aiguille, elle en vint à lui suggérer de s'en mêler un peu. Cela resterait en famille et 
elle n'était pas jalouse d'Anne-Marie. Peut-on l'être de sa chair même? Et puis, elle en 
avait son compte, étant grosse du onzième, et vraiment sa pauvre bessonne était trop 
déshéritée, avec son mari invalide! 
--Si tu veux, mon Yan, lui dit-elle, j'arrangerai la chose, et personne n'en saura rien que le 
bon Dieu et nous. 
--Vère, fit gravement le brave Béjarec, car il trouvait, lui aussi, sa belle-soeur fort 
malheureuse. 
Marie-Anne s'y prit avec toute l'habileté que son affection fraternelle lui inspirait. Une 
bonne décoction de pavot endormit Anne-Marie pendant une absence de son homuncule
de mari, et neuf mois après, jour pour jour, Béjarec eut un neveu. Toute la famille était 
aux anges. Et tel fut le premier essai que Yan fit de sa vocation génésique hors de son 
nid. 
Comment l'aventure transpira, voilà ce qu'il n'a jamais su, car, certes, il n'était pas homme 
à révéler ce secret de famille et c'était un coeur trop simple pour s'enorgueillir du service 
rendu. Peut-être sa femme ne put-elle dissimuler assez sa fierté? Toujours est-il qu'à 
quelque temps de là, un autre mari ridicule et sans progéniture le défia, au cabaret, entre 
quatre bolées, de renouveler l'exploit à son bénéfice. L'enjeu était d'une vache laitière.    
    
		
	
	
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