Cham et Japhet | Page 9

Ausone de Chancel
(Coran.)
?Pardonnez à votre esclave soixante-dix fois par jour, si vous voulez mériter la bonté divine.? (Hadits.)
?Ne dites jamais: mon esclave, car nous sommes tous esclaves de Dieu;--dites: mon serviteur ou ma servante.? (Abou-Harira.)
?Si le ma?tre commet envers son esclave une action blamable et patente, il lui donne par là droit à la liberté; par exemple, s'il lui coupe un doigt, s'il lui arrache un ongle, s'il lui fend une oreille, s'il lui br?le une partie quelconque du corps, s'il lui arrache une on plusieurs dents.? (Cheikh ben Salomon.)
Une esclave est-elle vendue en état de grossesse du fait de son ma?tre, l'enfant na?t libre et il hérite du père.
Celle qui a donné un enfant à son ma?tre a désormais sa place et un logement dans la tente ou dans la maison. On la désigne par une qualification particulière, qui, sans l'élever au rang d'épouse, la place au-dessus de sa première condition: elle s'appelle oum el ouled, la mère de l'enfant; et son enfant jouit de tous les droits de liberté et d'héritage, comme ses frères légitimes.
Un ma?tre ne peut forcer deux soeurs à s'unir à lui ni à être ses concubines.
Un ma?tre a-t-il maltraité son esclave, lui refuse-t-il la nourriture, le vêtement; lui a-t-il promis la liberté et manque-t-il à sa parole; l'a-t-il associé à son commerce et lui retient-il sa quote-part de gain, le cadi prononce.
Est-il prouvé qu'un ma?tre ne peut nourrir ses esclaves; qu'en partant pour un voyage il ne leur a pas laissé le nefka, somme nécessaire à leur entretien, le cheikh El Blad les fait vendre[21].
[Note 21: Général Daumas et Ausone de Chancel, le Grand Désert. En note: le Code des Esclaves, 1845.]
En quelques mots enfin, la loi musulmane prescrit et définit, avec un soin scrupuleux, les formes et les conditions de vente et d'achat des esclaves; de leurs mariages, de leurs divorces, de la tutelle de leurs enfants, et les modes d'affranchissement qu'elle a faits très-nombreux. Il est même accepté en principe qu'un esclave, après dix ans de services, doit être rendu à la liberté, ?parce que son travail a payé son prix.? Les bons musulmans affranchissent également celui qui sait lire dans le Coran et qui peut demander son affranchissement par écrit. Les docteurs ont donné cette interprétation à la parole de Mohamed que j'ai citée plus haut.
La loi mahométane a plus fait pour les esclaves que les traités de 1815, la suppression de la traite et l'émancipation.
J'ai sous la main bien des textes à l'appui de ce que j'avance; j'en choisirai un anglais pour qu'il soit moins suspect.
?Une fois installé dans la maison de l'acheteur, l'esclave, s'il est fidèle, est bient?t considéré comme un membre de la famille. Les plus intelligents apprennent à lire et à écrire, et acquièrent plus tard quelque teinture du Coran. Celui qui est parvenu à en lire et à en comprendre un chapitre recouvre dès ce moment sa liberté. Il en est dont l'intelligence se refuse à comprendre les principaux fondements de la religion musulmane; ceux-ci ne sont affranchis qu'au bout de huit ou dix ans. Le musulman consciencieux regarde le nègre comme un domestique. Il est remarquable que le fait de l'émancipation de l'esclave est tout à fait volontaire de la part du ma?tre, et j'ai vu des noirs si attachés à leurs ma?tres, qu'ils préféraient rester esclaves auprès d'eux plut?t que d'accepter la liberté qui leur était offerte.
?Il ne faudrait pas cependant s'imaginer que les Arabes et les Maures soient tous dans des dispositions aussi bienfaisantes à l'égard de cette race dégradée; quelques-uns, dans la classe du peuple la moins considérée, font des noirs un trafic infame: ils les achètent et les marient pour revendre ensuite leurs enfants[22].?
[Note 22: Jackson, Voyage au Maroc.]
Ce fait, constaté par M. Léo de Laborde[23] sur les rives du Nil, et par le voyageur anglais dans le Maroc, se reproduit malheureusement sur tous les grands marchés d'esclaves; mais, comme cet autre fait déplorable, la mise en vente impudente et brutale de la marchandise humaine dans les bazars, il n'inculpe pas autrement la loi mahométane que les atrocités des négriers n'inculpent notre loi.
[Note 23: Léo de Laborde, Chasse aux hommes dans le Cordofan. 1844.]
De ces deux législations, il faut bien l'avouer, n'en déplaise à notre forfanterie de civilisés, la n?tre n'était qu'humaine, la musulmane est toute paternelle. Le musulman accueille à son foyer le nègre qu'il achète, et ne lui fait, ni à la mosquée ni au cimetière, place à part des croyants. Chez lui, la femme esclave se rachète par la maternité, l'homme par l'éducation; et l'affranchi, rentré dans la vie normale, n'y est point, comme chez nous, poursuivi par ce préjugé que toute notre raison est impuissante à vaincre; il se fond dans la société blanche, sans que son origine et sa couleur soient un stigmate d'infamie qui le désigne au
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