Bas les coeurs!

Georges Darien
Bas les coeurs!, by Georges Darien

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Title: Bas les coeurs!
Author: Georges Darien
Release Date: July 27, 2006 [EBook #18918]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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ÉVREUX, IMPRIMERIE CHARLES HÉRISSEY
GEORGES DARIEN

BAS LES COEURS!

PARIS NOUVELLE LIBRAIRIE PARISIENNE ALBERT SAVINE, ÉDITEUR 12, Rue
des Pyramides, 12
1889

BAS LES COEURS

I
La guerre a été déclarée hier. La nouvelle en est parvenue à Versailles dans la soirée.
M. Beaudrain, le professeur du lycée qui vient me donner des leçons tous les jours, de
quatre heures et demie à six heures, m'a appris la chose dès son arrivée, en posant sa
serviette sur la table.
Il a eu tort. Moi qui suis à l'affût de tous les prétextes qui peuvent me permettre de ne rien
faire, j'ai saisi avec empressement celui qui m'était offert.
--Ah! la guerre est déclarée! Est-ce qu'on va se battre bientôt, monsieur?
--Pas avant quelques jours, a répondu M. Beaudrain avec suffisance. Un de mes amis,
capitaine d'artillerie, que j'ai rencontré en venant ici, m'a dit que nous ne passerions guère
le Rhin avant un huitaine de jours.
--Alors, nous allons passer le Rhin?
--Naturellement. Il est nécessaire de franchir ce fleuve pour envahir la Prusse.
--Alors, nous envahirons la Prusse?
--Naturellement, puisque nous avons 1813 et 1815 à venger.
--Ah! oui, 1813 et 1815! Après Waterloo, n'est-ce pas, monsieur? Quand Napoléon a été
battu?...
--Napoléon n'a pas été battu. Il a été trahi, a fait M. Beaudrain en hochant la tête d'un air
sombre. Mais donnez-moi donc votre devoir; c'est un chapitre des Commentaires, je
crois?
--Oui, monsieur... J'ai vu chez M. Pion...
--... Les Commentaires... Ah! c'était un bien grand capitaine que César! Eh! eh! nous
suivons ses traces. Seulement nous n'aurons pas besoin de perdre trois jours, comme lui, à
jeter un pont sur le Rhin; nous irons un peu plus vite, eh! eh!... Qu'est-ce que vous avez
vu, chez M. Pion?
--Une gravure qui représente Napoléon partant pour Sainte-Hélène et prononçant ces
mots: «O France...»
Le professeur m'a coupé la parole d'un geste brusque; et, passant la main droite dans son
gilet, la main gauche derrière le dos, il a murmuré d'une voix lugubre en levant les yeux
au plafond:
--«O France, quelques traîtres de moins et tu serais encore la reine des nations!»...

--C'est sur le Bellérophon, n'est-ce pas, monsieur, que l'Empereur était embarqué?
--Je vous apprendrai cela plus tard, mon ami. Pour le moment, nous n'en sommes qu'à
l'histoire grecque... à la Tyrannie des Trente... Mais donnez-moi votre devoir.
J'ai tendu sans peur la feuille de papier. M. Beaudrain me l'a rendue dix minutes après
avec un trait de crayon bleu à la onzième ligne et une croix en marge:
--Un non-sens, mon ami, un non-sens. Hier, vous n'aviez qu'un contre-sens. Somme tout,
ce n'est pas mal, car le passage n'est pas commode. Je m'étonne que vous vous en soyez si
bien tiré.
Ça ne m'étonne pas, pour une bonne raison: je copie tout simplement mes versions,
depuis deux mois, sur une traduction des Commentaires que j'ai achetée dix sous au
bouquiniste de la rue Royale. Les jours pairs, je glisse traîtreusement un tout petit
contre-sens dans le texte irréprochable; les jours impairs, j'y introduis un non-sens. Hier,
c'était le 17.
Mon père est entré.
--Bonjour, monsieur Beaudrain. Eh bien! votre élève?...
--Ma foi, monsieur Barbier, j'en suis vraiment bien content, je lui faisais justement des
éloges... A propos, dites donc, ça y est.
--Ça y est, a répété mon père, et ce n'est vraiment pas trop tôt. Ces canailles de Prussiens
commençaient à nous échauffer les oreilles. Ça ne vaut jamais rien de se laisser marcher
sur les pieds. Avant un mois nous serons à Berlin.
--Un mois environ, a fait M. Beaudrain. Il faut bien compter un mois. Un de mes amis,
capitaine d'artillerie, que j'ai rencontré en venant ici, m'a dit que nous ne passerions guère
le Rhin avant une huitaine de jours.
--Oui, oui, les préparatifs... les... les... les préparatifs. On n'a jamais pensé à tout...
--Oh! pardon, pardon, papa! s'est écriée ma soeur Louise qui a ouvert la porte, un journal
déplié à la main, le maréchal Le Boeuf a affirmé que tout était prêt
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