Niels Henrik Abel | Page 2

G. Mittag-Leffler
les plus remarquables du nord
scandinave, Abel était fils de prêtre. Son père s'appelait Soeren Georg
Abel, et sa mère Anna Marie Simonsen. Sa famille ne peut pas
toutefois, comme il arrive si souvent en pareil cas, être rattachée par
deux ou trois générations à la classe des paysans-propriétaires. Le
grand-père paternel, Hans Mathias Abel, était aussi prêtre, et descendait
d'une famille considérée de fonctionnaires dano-norvégiens,
probablement originaire du Slesvig danois, dont le premier membre
norvégien, Mathias Abel, mourut comme employé dans l'administration
préfectorale à Trondhjem en 1664. La femme de celui-ci, Karen fille de
Rasmus, descendait de vieilles familles nobles norvégiennes. La mère
d'Abel, Anna Marie Simonsen, appartenait à une famille norvégienne
de négociants aisés.
La famille d'Abel compte de nombreux membres qui se sont distingués
par leurs talents et leur intérêt pour les choses d'ordre intellectuel.
L'aspect extérieur d'Abel est un héritage ancien dans la famille Abel, et
ne vient pas du côté maternel, comme le prouve la ressemblance
frappante entre Abel lui-même et le frère cadet de son père, le
sous-préfet (lensmand) M. C. Abel. Celui-ci, malgré son intelligence,
qui a dû dépasser de beaucoup, si son apparence ne trompe pas, la
mesure ordinaire, n'a guère acquis de célébrité, sinon que, lorsqu'il
passa de la sous- préfecture d'Onsoe à celle d'Aremark, il reçut un
sucrier d'argent et un pot à crème avec l'inscription: « En
reconnaissance de quatorze années de bons services comme sous-préfet

d'Onsoe, de la part d'une partie de la population », et qu'il épousa une
femme très bien douée. Le grand- père paternel d'Abel était un homme
énergique et remarquable, dont l'oeuvre principale paraît avoir été une
action efficace contre le vice de l'époque, l'ivrognerie. Lui-même, afin
de pouvoir poursuivre cette lutte avec un plus grand succès, devint un
abstentionniste absolu, et a sans doute été un des premiers précurseurs
de ce mouvement dans le Nord.
Le père d'Abel, s'il ne possédait pas la force de caractère du grand-père,
a été manifestement un homme très distingué à beaucoup d'égards,
ayant du goût pour l'action et pour les intérêts généraux, et d'une
capacité peu commune. Il fut membre du Storting extraordinaire qui se
réunit le 7 octobre 1814, et il y prit place dans l'odelsting. [Note:
L'Odelsting est formé de membres du Storting, élus par leurs collègues.
Les lois sont discutées publiquement, en Norvège, d'abord dans
l'Odelsting, puis dans les séances plénières du Storting.] Il parla en
faveur de l'union avec la Suède, mais soutint que les Norvégiens étaient
encore un peuple libre et indépendant, et devaient agir comme tel sous
tous les rapports:
La Suède n'avait donc aucun droit d'attendre, continuait-il, que nous
adoptions ses principes fondamentaux pour une union éventuelle; c'est
à nous qu'il appartenait de proposer à ce royaume les conditions dans
lesquelles les libres Norvégiens pourraient appeler les Suédois leurs
frères. Lorsque par ces résolutions nous aurons pris les précautions
convenables pour notre honneur national, notre liberté et nos droits
civiques; lorsque nous aurons ainsi pris garde que toute oppression
possible de quelque manière que ce soit, devienne impossible pour
quelque régent que ce soit; alors soyons les premiers à tendre au peuple
suédois une loyale main fraternelle; alors, comme une nation libre,
offrons à Charles XIII le sceptre qui jusqu'alors ne lui était pas destiné.
Oublions tout ce qui s'est passé, et souvenons-nous qu'à celui qui
pardonne il sera pardonné. Si la constitution, pour la rédaction de
laquelle nul n'a qualité, plus que les citoyens du pays qui doivent lui
obéir, est rejetée par un régent en ce cas manifestement despotique,
alors toute la puissance de la Norvège demeure: avec elle nous pouvons
vaincre, avec elle nous pouvons mourir, et dans les deux cas nous

pourrons par elle recouvrer notre honneur.
Dans le Storting de 1818, il fut un des rares qui luttèrent en faveur de
l'enseignement de la langue maternelle et des sciences naturelles
concurremment avec les langues classiques. Il trouvait « singulier que
l'on voulût indéfiniment exclure la matière d'enseignement qui intéresse
le plus les jeunes gens, les sciences naturelles ou la description de la
nature ».
La mère d'Abel était louée pour son exceptionnelle beauté. Elle était
née dans une famille qui menait vie joyeuse et large, et elle se laissa
aller, dès l'âge de quinze ans, à l'abus de l'alcool. La conséquence fut
une grande faiblesse de caractère et une vie de ménage malheureuse. Le
père intelligent lutta longtemps contre l'ivrognerie, mais finit, sous
l'influence de la mère, par en devenir lui-même une victime. Ainsi la
maison du fils devint un foyer de ce vice que le père avait consacré sa
vie à combattre. Ce vice fut transmis aux frères d'Abel, qui semblent
tous avoir succombé à l'ivrognerie. Trois des frères moururent
célibataires, déchus, et l'esprit plus ou moins égaré. Le quatrième frère,
qui fut le camarade d'études
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