Une vie

Guy de Maupassant
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Une vie

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Title: Une vie
Author: Guy de Maupassant
Release Date: January 4, 2006 [EBook #17457]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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Guy de Maupassant
UNE VIE
(1883)

-- I --
Jeanne, ayant fini ses malles, s'approcha de la fen��tre, mais la pluie ne cessait pas.
L'averse, toute la nuit, avait sonn�� contre les carreaux et les toits. Le ciel, bas et charg�� d'eau, semblait crev��, se vidant sur la terre, la d��layant en bouillie, la fondant comme du sucre. Des rafales passaient, pleines d'une chaleur lourde. Le ronflement des ruisseaux d��bord��s emplissait les rues d��sertes o�� les maisons, comme des ��ponges, buvaient l'humidit�� qui p��n��trait au-dedans et faisait suer les murs de la cave au grenier.
Jeanne, sortie la veille du couvent, libre enfin pour toujours, pr��te �� saisir tous les bonheurs de la vie dont elle r��vait depuis si longtemps, craignait que son p��re h��sitat �� partir si le temps ne s'��claircissait pas, et pour la centi��me fois depuis le matin elle interrogeait l'horizon.
Puis, elle s'aper?ut qu'elle avait oubli�� de mettre son calendrier dans son sac de voyage. Elle cueillit sur le mur le petit carton divis�� par mois, et portant au milieu d'un dessin la date de l'ann��e courante, 1819, en chiffres d'or. Puis, elle biffa �� coups de crayon les quatre premi��res colonnes, rayant chaque nom de saint jusqu'au 2 mai, jour de sa sortie du couvent.
Une voix, derri��re la porte, appela:
-- Jeannette!
Jeanne r��pondit:
-- Entre, papa.
Et son p��re parut.
Le baron Simon-Jacques Le Perthuis des Vauds ��tait un gentilhomme de l'autre si��cle, maniaque et bon. Disciple enthousiaste de J.-J. Rousseau, il avait des tendresses d'amant pour la nature, les champs, les bois, les b��tes.
Aristocrate de naissance, il ha?ssait par instinct quatre-vingt- treize; mais, philosophe par temp��rament et lib��ral par ��ducation, il ex��crait la tyrannie d'une haine inoffensive et d��clamatoire.
Sa grande force et sa grande faiblesse, c'��tait la bont��, une bont�� qui n'avait pas assez de bras pour caresser, pour donner, pour ��treindre, une bont�� de cr��ateur, ��parse, sans r��sistance, comme l'engourdissement d'un nerf de la volont��, une lacune dans l'��nergie, presque un vice.
Homme de th��orie, il m��ditait tout un plan d'��ducation pour sa fille, voulant la faire heureuse, bonne, droite et tendre.
Elle ��tait demeur��e jusqu'�� douze ans dans la maison, puis, malgr�� les pleurs de la m��re, elle fut mise au Sacr��-Coeur.
Il l'avait tenue l�� s��v��rement enferm��e, clo?tr��e, ignor��e et ignorante des choses humaines. Il voulait qu'on la lui rend?t chaste �� dix-sept ans pour la tremper lui-m��me dans une sorte de bain de po��sie raisonnable; et, par les champs, au milieu de la terre f��cond��e, ouvrir son ame, d��gourdir son ignorance �� l'aspect de l'amour na?f, des tendresses simples des animaux, des lois sereines de la vie.
Elle sortait maintenant du couvent, radieuse, pleine de s��ves et d'app��tits de bonheur, pr��te �� toutes les joies, �� tous les hasards charmants que, dans le d��soeuvrement des jours, la longueur des nuits, la solitude des esp��rances, son esprit avait d��j�� parcourus.
Elle semblait un portrait de V��ron��se avec ses cheveux d'un blond luisant qu'on aurait dit avoir d��teint sur sa chair, une chair d'aristocrate �� peine nuanc��e de rose, ombr��e d'un l��ger duvet, d'une sorte de velours pale qu'on apercevait un peu quand le soleil la caressait. Ses yeux ��taient bleus, de ce bleu opaque qu'ont ceux des bonshommes en fa?ence de Hollande.
Elle avait, sur l'aile gauche de la narine, un petit grain de beaut��, un autre �� droite, sur le menton, o�� frisaient quelques poils si semblables �� sa peau qu'on les distinguait �� peine. Elle ��tait grande, m?re de poitrine, ondoyante de la taille. Sa voix nette semblait parfois trop aigu?; mais son rire franc jetait de la joie autour d'elle. Souvent, d'un geste familier, elle portait ses deux mains �� ses tempes comme pour lisser sa chevelure.
Elle courut �� son p��re et l'embrassa, en l'��treignant:
-- Eh bien, partons-nous? dit-elle.
Il sourit, secoua ses cheveux d��j�� blancs et qu'il portait assez longs, et, tendant la main vers la fen��tre:
-- Comment veux-tu voyager par un temps pareil?
Mais elle le priait, caline et tendre:
-- Oh! papa, partons, je t'en supplie. Il fera beau dans l'apr��s- midi.
-- Mais ta m��re n'y consentira jamais.
-- Si, je te le promets, je m'en charge.
-- Si tu parviens �� d��cider ta m��re, je veux bien, moi.
Et elle se pr��cipita vers la chambre de la baronne. Car elle avait attendu ce jour du d��part avec une impatience
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