Hollande, car la politique anglaise est un peu comme le sabre de M. Prudhomme ?pour défendre ses amis, et au besoin pour les combattre?. Elle la conserva si bien qu'elle l'a gardée jusqu'à ce jour.
Tous ses efforts s'appliquèrent dès lors à rendre le séjour intolérable aux Boers, peuple de paysans, comme le nom l'indique, formé des colons des Provinces-Unies (la Compagnie hollandaise s'était installée auprès de Mount-Table en 1848) avec un fort apport de calvinistes fran?ais, jetés hors de leur pays par la révocation de l'édit de Nantes. Le général Joubert est un descendant de ceux-ci, et une infinité d'autres noms fran?ais subsistent au Transvaal. Reconnaissant la vie impossible pour eux sous la domination anglaise, les Boers, s'éloignant du rivage, franchirent le seuil montagneux et longtemps ils errèrent avec leurs troupeaux à travers la lande sud-africaine, dans la vaillante rudesse et la pastorale frugalité des Hébreux en Chanaan. Ce fut le grand trekk de 1833, où figurait Krüger adolescent. Dans leur lutte incessante contre les animaux, dont les plus redoutables et les plus abondants étaient les Cafres et les Zoulous (le Hottentot est paisible), la race fut vite aguerrie, puis les Anglais se chargèrent de l'amener progressivement à une véritable perfection dans l'art de la guerre contre les armes européennes. En 1848, on la pourchasse, on la défait à la bataille de Boomplatz et on prétend imposer la souveraineté britannique sur la région de l'Orange-River; pour échapper à une domination odieuse, les Boers les plus vaillants s'en vont au delà du Natal, sous la conduite de Pretorius, retrouver les hardis pionniers qui disputaient à la férocité des Matébélés cette marche sud-africaine, où le sol du Witwatersrand, exploité aujourd'hui jusqu'à plus de trois mille pieds par la plus rémunératrice industrie qui soit au monde, était alors foulé par des lions et par des rhinocéros. Combattant d'un c?té les noirs et de l'autre les Anglais, les Boers eurent bient?t démontré à ceux-ci que le nouveau peuple d'Isra?l ne se laisserait pas réduire en servitude, et le gouvernement britannique prit le parti de reconna?tre, au traité de Sand-River (1852), la République sud-africaine du Transvaal.
On n'attribuait alors à ces terres sauvages pas plus de valeur que lord Salisbury n'en accordait à ces sables dans lesquels, selon son impertinente appréciation, le coq gaulois se pla?t à picorer. Un beau jour, il se trouva des diamants à Kimberley, chez les Boers de l'Orange: presque aussit?t la région de Kimberley était annexée à la Couronne (1871). On découvrit peu après les mines d'or du Rand; le Transvaal prit aussit?t le plus vif intérêt aux yeux de l'Angleterre qui se l'annexa sans autre forme de procès (1877), et, il faut le dire aussi, sans résistance effective des Boers, épuisés de forces et de ressources par leurs luttes meurtrières contre les peuplades noires sur lesquelles ils avaient conquis ce pays. Le commissaire anglais Shepstone n'eut qu'à se montrer pour prendre possession, par ordre du gouverneur général du Cap, sir Bartle Frère, dont la déclaration fut confirmée l'an suivant par son successeur lord Wolseley, au mépris du traité de 1852. L'Angleterre triomphait.
Elle a déchanté depuis ce temps. Après de vains et persistants efforts pour obtenir justice à Londres, les Boers, exaspérés par l'intolérance maladroite des fonctionnaires locaux, comprirent qu'il n'y avait à compter que sur la force; dans une réunion solennelle des burghers à Pardekraal, le 16 décembre 1880, ils mirent à leur tête le triumvirat Krüger, Brand et Joorissen, qui confia la direction des opérations militaires au général Joubert. Les Anglais furent battus à Potchefstroom, les passes du Drakenberg furent occupées sur la frontière du Natal et les journées de Laings Neck et d'Iniogo, suivies de la double victoire de Majuba-Hill, mirent en déroute l'armée du général sir Pomeroy Colley, qui fut trouvé parmi les morts. Le bruit courut qu'il s'était br?lé la cervelle.
Des droits que l'on défendait avec une telle vigueur d'argumentation étaient dignes de l'attention du gouvernement anglais; il le comprit tout de suite, étant de ceux-là qui pensent que bon accommodement est préférable à mauvais procès, et l'accommodement fut tout à son avantage, car, à la faveur d'un ingénieux artifice diplomatique, il maintenait le protectorat sur le peuple qui venait d'infliger un si rude échec à son protecteur. Les Boers protestèrent là contre, tant et si bien, qu'à la suite de la mission en Europe de MM. Krüger, devenu président de la République, Jacob du Toit et général Smit, lord Derby, devant l'insistance de M. Gladstone, substitua à la convention antérieure le traité de 1884, dans lequel étaient nettement réglés les rapports de l'Angleterre avec la République sud-africaine et qui ne portait plus trace d'une suzeraineté, dont la suppression faisait la base du nouvel accord. Le Transvaal était réintégré dans tous ses droits nationaux, sous cette seule réserve que l'Angleterre bénéficierait d'une faculté de veto sur

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