Spiridion

George Sand
Spiridion

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Title: Spiridion
Author: George Sand
Release Date: March 2, 2005 [EBook #15239]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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GEORGE SAND
SPIRIDION

NOTICE
Spiridion a été écrit en grande partie, et terminé dans la Chartreuse de
Valdemosa, aux gémissements de la bise dans les cloîtres en ruines.
Certes, ce lieu romantique eût mieux inspiré un plus grand poète.
Heureusement le plaisir d'écrire ne se mesure pas au mérite de l'oeuvre,

mais à l'émotion de l'artiste; sans des préoccupations souvent
douloureuses, j'aurais été bien satisfaite de cette cellule de moine dans
un site sublime, où le hasard, ou plutôt la nécessité résultant de
l'absence de tout autre asile, m'avait conduite et mise précisément dans
le milieu qui convenait au sujet de ce livre commencé à Nohant.
GEORGE SAND. Nohant, 25 août 1855.

A M. PIERRE LEROUX.
Ami et frère par les années, père et maître par la vertu et la science,
agréez l'envoi d'un de mes contes, non comme un travail digue de vous
être dédié, mais connue un témoignage d'amitié et de vénération.

Lorsque j'entrai comme novice au couvent des Bénédictins, j'étais à
peine âgé de seize ans. Mon caractère doux et timide sembla inspirer
d'abord la confiance et l'affection; mais je ne tardai pas à voir la
bienveillance des frères se changer en froideur; et le père trésorier, qui
seul me conserva un peu d'intérêt, me prit plusieurs fois à part pour me
dire tout bas que, si je ne faisais attention à moi-même, je tomberais
dans la disgrâce du Prieur.
Je le le pressais en vain de s'expliquer; il mettait un doigt sur ses lèvres,
et, s'éloignant d'un air mystérieux, il ajoutait pour toute réponse:
«Vous savez bien, mon cher fils, ce que je veux dire.»
Je cherchais vainement mon crime. Il m'était impossible, après le plus
scrupuleux examen, de découvrir en moi des torts assez graves pour
mériter une réprimande. Des semaines, des mois s'écoulèrent, et
l'espèce de réprobation tacite qui pesait sur moi ne s'adoucit point. En
vain je redoublais de ferveur et de zèle; en vain je veillais à toutes mes
paroles, à toutes mes pensées; en vain j'étais le plus assidu aux offices
et le plus ardent au travail; je voyais chaque jour la solitude élargir un
cercle autour de moi. Tous mes amis m'avaient quitté. Personne ne
m'adressait plus la parole. Les novices les moins réguliers et les moins
méritants semblaient s'arroger le droit de me mépriser. Quelques-uns
même, lorsqu'ils passaient près de moi, serraient contre leur corps les
plis de leur robe, comme s'ils eussent craint de toucher un lépreux.
Quoique je récitasse mes leçons sans faire une seule faute, et que je

fisse dans le chant de très-grands progrès, un profond silence régnait
dans les salles d'étude quand ma timide voix avait cessé de résonner
sous la voûte. Les docteurs et les maîtres n'avaient pas pour moi un seul
regard d'encouragement, tandis que des novices nonchalants ou
incapables étaient comblés d'éloges et de récompenses. Lorsque je
passais devant l'abbé, il détournait la tête, comme s'il eût eu horreur de
mon salut.
J'examinais tous les mouvements de mon coeur, et je m'interrogeais
sévèrement pour savoir si l'orgueil blessé n'avait pas une grande part
dans ma souffrance. Je pouvais du moins me rendre ce témoignage que
je n'avais rien épargné pour combattre toute révolte de la vanité, et je
sentais bien que mon coeur était réduit à une tristesse profonde par
l'isolement où on le refoulait, par le manque d'affection, et non par le
manque d'amusements et de flatteries.
Je résolus de prendre pour appui le seul religieux qui ne pût fuir mes
confidences, mon confesseur. J'allai me jeter à ses pieds, je lui exposai
mes douleurs, mes efforts pour mériter un sort moins rigoureux, mes
combats contre l'esprit de reproche et d'amertume qui commençait à
s'élever en moi. Mais quelle fut ma consternation lorsqu'il me répondit
d'un ton glacial:
«Tant que vous ne m'ouvrirez pas votre coeur avec une entière sincérité
et une parfaite soumission, je ne pourrai rien faire pour vous.
--O père Hégésippe! lui répondis-je, vous pouvez lire la vérité au fond
de mes entrailles; car je ne vous ai jamais rien caché.»
Alors il se leva et me dit avec un accent terrible:
«Misérable pécheur!
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