Sacountala (1858) | Page 2

Théophile Gautier
du Malini; elle est formée d'arbres des Banians, d'amras, de malicas, de madhavis que rejoignent des lianes. A droite, s'élève une petite pagode; à gauche, l'on aper?oit dans les feuillages les cabanes de roseaux des richis (ermites); au fond, des marches de marbre descendent à un étang sacré (Thirtà).
SCèNE PREMIèRE.
Canoua, chef des brahmes, assisté de brahmalcharis, est en prière devant le temple. Une flamme brille sur l'autel, la fanfare et le bruit d'une chasse se font entendre, des profanes ont pénétré dans la forêt. Canoua éteint la flamme, et envoie un brahmatchari voir qui est assez hardi pour troubler la retraite et les dévotions des saints ermites.
SCèNE II.
Le roi Douchmanta, à cheval, un arc à la main, suivi de chasseurs, fait son entrée; il a été entra?né à la poursuite d'une antilope, et son intention n'est pas de violer l'enceinte consacrée à Brahma. Il descend de sa monture, relève avec bonté Canoua qui a fléchi le genou devant lui, et renvoie ses courtisans; lui-même, il veut prier devant l'autel, et dépouille ses ornements royaux par humilité.
SCèNE III.
Douchmanta, resté seul, s'incline et offre des fleurs et des fruits sur l'autel; mais il se relève bient?t avec curiosité. Des sons harmonieux annoncent l'arrivée de personnages plus aimables que les mounis et les richis (ascètes). Pour les voir sans être vu, et ne pas les gêner de sa présence, il cherche une cachette et la trouve dans le temple.
SCèNE IV.
Les jeunes filles qui desservent le temple et soignent les fleurs de la forêt sacrée apparaissent portant des vases qu'elles vont remplir d'eau; Suconntala, fille de la nymphe Ménaca et de Wisaoumitra, élevée par les soins de Canoua, le chef des brahmes, entre en dansant et re?oit les salutations affectueuses de ses compagnes.
Elle va, penchant sur les fleurs des madhavis et des sirichas les urnes que lui présentent ses amies Priyamwada et Anousouya. Tout à coup, du calice d'une malica s'élance une abeille qui voltige autour de la jeune fille, la prenant pour une autre fleur. Sacountala, redoutant l'aiguillon de l'abeille, cherche à l'éviter ou à la chasser.
Ses bonds effrayés la conduisent près du temple, d'où sort Douchmanta, qui fait fuir l'abeille et retient sur son coeur Sacountala palpitante. De sa retraite, le roi a observé les graces de la jeune fille, et il sent l'amour s'emparer de son ame.
La présence subite de Douchmanta étonne les jeunes filles, et rend Sacountala confuse; elle reste rougissante et les mains croisées sur sa poitrine, mais déjà troublée par la beauté et l'air noble de l'étranger.
Sacountala, un peu remise de sa frayeur, interroge Douchmanta. Le roi lui répond qu'il est un jeune brahmatchari (élève brahme), qui vient étudier les védas (livres saints) dans la retraite des pieux solitaires. Comme il a dépouillé les insignes de la royauté, cette réponse n'a rien que de plausible.
Dès cet instant, Douchmanta est admis comme un h?te dans la forêt sacrée. Sur l'ordre de Sacountala, Priyamwada, Anousouya et leurs compagnes, après avoir conduit le roi à un banc de mousse, lui présentent des corbeilles de fleurs et de fruits; Sacountala va elle-même puiser de l'eau, et l'offre à Douchmanta, dans une écorce de grenade.
Pendant qu'on lui rend tous ces soins, le roi fixe sur la jeune fille des yeux enflammés; il se lève, se rapproche d'elle, et veut lui exprimer sa passion. Sacountala l'évite, avec une coquetterie pudique, mais il finit par la rejoindre, et danser avec elle un pas de deux qu'il termine en la pressant sur son coeur, comme ivre d'amour.
SCèNE V.
Un des chasseurs, portant l'arc du roi, entre sur la scène; il s'incline devant Douchmanta, et lui dit qu'un éléphant furieux ravage la forêt. Les flèches du roi, qui n'ont jamais manqué leur but, peuvent seules en avoir raison. A lui appartient l'honneur d'abattre le monstre. Douchmanta saisit l'arc, et s'éloigne en faisant signe à Sacountala et aux jeunes filles qu'il reviendra bient?t.
SCèNE VI.
Le roi parti, Sacountala redescend la scène, toute pensive. Elle porte la main à son coeur comme pour en comprimer les battements. L'amour qui l'agite lui fait peur: celui qu'elle prenait pour un simple brahmatchari est un roi puissant. Du retour à son palais, sans doute il oubliera bient?t l'humble fille rencontrée dans la forêt des ermites. Accablée par cette idée douloureuse, elle se laisse tomber sur un banc de gazon: ses compagnes l'entourent et tachent de la rassurer; elles la complimentent sur l'amour qu'elle a inspiré au roi; mais Sacountala, oppressée et br?lante, cache sa tête dans ses mains. Pour calmer la fièvre laquelle elle est en proie, ses amies l'éventent doucement, lui jettent des fleurs fra?ches, et, voyant le sommeil descendre sur ses yeux, s'éloignent avec précaution sur la pointe du pied.
SCèNE VII.
Après avoir tué l'éléphant, le roi revient; inquiet de ne pas voir Sacountala, il parcourt la scène à grands pas. Il aper?oit
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