n'y a dans toute l'Islande aucune miniere de quelque metal ou 
mineral que ce soit, si ce n'est de soufre, qui est tres commun dans 
toute l'Isle; mais que l'on tire en plus grande abondance d'une 
Montagne nommée Hecla, qui est le Montgibel de l'Islande; car elle 
jete des flames qui causent de grâns embrazemâns aux environs. Cete 
Montagne est du costé de la partie Oriàntale, declinant à la 
Meridionale, & assez proche de la mer. Blefkenius dit, que ce Mont ne
jete pas seulement des flames, mais des torrâns d'eau, qui brulent 
comme eau de vie. Il jete par fois aussi, des cendres noires, & une 
quantité prodigieuse de pierres ponce. La tàmpeste qui agite ce Mont, 
cesse au vànt d'Oüest, qui est le Zephire des anciens. Tant que ce vànt 
soufle, ceux qui connoissent ce Mont, & qui en savent les chemins seurs, 
montent hardiment à son plus haut sommet, & à l'endroit par où il rànd 
ses flames; où ils jetent de grosses pierres, que le Mont rejete avec 
furie, & comme une Mine fait voler les esclats d'un mur qu'elle emporte. 
Il est tres dangereux d'en aprocher, à ceux qui n'en connoissent pas les 
avenües. Parce que la terre qui brule au dessous, venant à fondre, a 
bien souvent englouti des hommes vivans, dans des fournaises 
ardàntes. 
X. Les habitans de l'Isle croyent que cete Montagne est le lieu où les 
ames des dannez sont tourmàntées. Dequoy ils font de plaisâns contes. 
Car ils voyent quelque fois, à ce qu'ils disent, comme des fourmilieres 
de Diables, qui entrent dans la gueule de ce Mont, chargez d'ames 
dannées; & qui en ressortent, pour en aler chercher d'autres. Et 
Blefkenius raporte, que lors que cela a paru, on a remarqué qu'il s'est 
donné une sanglante bataille en quelque endroit. Les Islandois croyent 
aussi, que le bruit que font les glaces, quand elles heurtent & 
s'atachent à leurs rivages, sont les cris & les gemissemâns des dannez, 
pour le grand froit qu'ils endurent. Car ils croyent qu'il y a des ames 
condannées à geler eternelement, comme il y en a qui brulent 
eternelement. Et le suplice seroit egal; en ce que, penetrabile frigus 
adurit; & qu'il est vray qu'un grand froit brule comme du feu. 
XI. Le mesme Blefkenius dit, qu'estant en Islande, sur la fin du mois de 
Novàmbre, & à minuit; on vit un grand feu sur la mer du Mont Hecla, 
& que ce feu esclaira toute l'Isle. Ce qui estonna tous les habitans. Les 
plus experimàntez & les plus sànsez asseuroient, que cete lueur venoit 
du Mont Hecla. Une heure apres l'Isle tràmbla. Et ce tràmblemànt fut 
suivy d'un esclat comme de tonnerre, si espouvàntable & si terrible, 
que tous ceux qui l'ouïrent, crurent que ce devoit estre la cheute du 
monde. On sût peu de jours apres, que la mer avoit tary à l'endroit où 
le feu avoit paru; & qu'elle s'estoit retirée à deux lieües de là.
XII. Les Islandois ne vàndent & n'achetent quoy que ce soit, car il n'y a 
pas d'argent monnoyé parmy eux. On leur aporte des farines, de la 
biere, du vin, de l'eau de vie, du fer, des drâs, & du linge. Ils baillent en 
eschange ce qu'ils ont, qui est; des poissons secs, du beurre, des suifs, 
des drâs grossiers, du soufre, & des peaux de renârs, d'ours, & de loûs 
cerviers. Blefkenius dit, que les Alemans qui trafiquent en Islande, 
dressent des tàntes pres des havres où ils ont abordé, & qu'ils y 
estalent leurs Marchandises, qui sont; manteaux, souliers, miroirs, 
couteaux, & quantité de bagateles, qu'ils eschangent avec ce que les 
Islandois leur aportent. Des filles qui sont fort beles dans cete Isle, 
mais fort mal vestües, vont voir ces Alemans; & ofrent à ceux qui n'ont 
pas de fàme, de coucher avec eux, pour du pain, pour du biscuit, & 
pour quelqu'autre chose de peu de valeur. Les Peres mesmes 
presàntent leurs filles aux Estrangers. Et si leurs filles deviennent 
grosses, ce leur est un grand honneur. Car elles sont plus considerées, 
& plus recherchées par les Islandois, que les autres: Et il y a de la 
presse à les avoir. 
XIII. Quand les Islandois ont acheté, (c'est à dire eschangé) du vin, ou 
de la biere, des Marchâns estrangers: Ils convient leurs paràns, leurs 
amis, & leurs voisins, à boire l'un & l'autre: Et ne se quitent point que 
tout ne soit beu. Ils chantent en beuvant, les faits heroïques de leurs 
Capitaines. Leur musique est sans regle, & sans art, que l'on apele, 
Musique enragée. C'est une incivilité parmy eux, que de sortir de table, 
quand ils boivent, pour aler faire de l'eau. Des filles qui ne sont pas 
laides en ce païs-là, comme j'ay dit, coulent sous les treteaux, & 
presàntent des    
    
		
	
	
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