nouvelle preuve que ce commerce est plus onéreux que profitable. 
5°. La Traite des Noirs est nuisible à la Marine & à la Navigation par la 
perte qui en résulte d'un grand nombre de Matelots; puisqu'il est 
démontré qu'il périt dix ou douze fois plus de Matelots à proportion 
dans les Voyages de cette espèce, que dans les autres navigations,
pertes presque uniquement occasionnées par le mauvais air, la 
mauvaise nourriture, & les autres circonstances destructives qui 
existent nécessairement dans les Vaisseaux Négriers. 
6°. Ce commerce est encore d'une mauvaise politique, parce qu'il nous 
fait délaisser plusieurs branches de spéculations intéressantes sur divers 
produits de l'Afrique; qu'il s'oppose à nous faire connoître l'intérieur & 
les ressources de ce Continent, même la plus petite partie de ses côtes 
que nous ne connoissons que sous un rapport infâme; que ce commerce 
d'esclaves nous fait ainsi dédaigner & ignorer une des vastes parties du 
monde, & la plus à notre portée. 
7°. La Traite des Esclaves est une honte à l'humanité, une tache à notre 
Nation, une contradiction ouverte avec nos principes & notre 
constitution. 
Il est remarquable que la loi abusive de commerce qui a autorisé 
l'esclavage dans nos Colonies n'a permis de traiter des Noirs que depuis 
tel Cap jusqu'à tel autre dans la côte d'Afrique; que ce qui est permis 
dans tel parage & dans telle latitude, redevient un crime dans un autre 
canton; que le Gouvernement a puni sévèrement des Capitaines qui 
s'étoient permis de prendre des Noirs à cheveux longs, des teints moins 
basanés, dans d'autres lieux que ceux ordinaires de la Traite. Quel droit 
avoit-on de plus sur les uns que sur les autres? 
Il est bien remarquable encore que (par une de ces contradictions trop 
communes dans l'esprit humain) les Hollandois ont un mépris singulier 
pour une espèce d'hommes qui en Hollande recrutent & engagent des 
Blancs pour leurs Colonies, les appelant _vendeurs d'ames_; & on ne 
s'est pas apperçu qu'ils eussent jamais témoigné une opinion fâcheuse 
des agens de la Traite des Noirs. 
Il n'est que trop prouvé que c'est les Européens qui ont presque par tout 
excité & encouragé le commerce des Esclaves; on a su de M. Poivre, 
cet Administrateur humain & éclairé, qu'au commencement de ce siècle, 
ce commerce & toutes les horreurs qui en sont les compagnes 
nécessaires ont été introduits pour la première fois dans l'Isle de 
Madagascar, & que l'esclavage étoit absolument inconnu des naturels 
du pays avant la fréquentation des Européens. 
§.2. _La suppression de la Traite des Noirs ne fera aucun tort aux 
propriétaires d'habitations dans les Colonies._ 
1°. Il est connu qu'un nombre d'habitans se ruinent, & rendent leurs
libération & liquidation impossibles par les pertes qu'ils font de Nègres 
nouveaux. 
2°. Les Colons perdant ce moyen de recruter leurs Atteliers, 
soigneroient davantage cette population; elle s'accroîtroit par un régime 
plus humain & plus attentif: on le fait par l'expérience de plusieurs 
habitations qui ont maintenu, augmenté même leur population par le 
seul effet d'un traitement plus raisonnable sans avoir recours à des 
achats de nouveaux esclaves. 
Il est reconnu que le régime trop dur de l'esclavage, ou l'insouciance & 
le mépris de l'humanité qui l'accompagnent si souvent, causent une 
perte constante à la population des Nègres dans toutes les Colonies 
prises en masse, & dans chacune en particulier, même là où l'esclavage 
est plus modéré par la loi; tandis que ceux des habitans qui ont mis 
l'attention convenable à encourager & conserver la population de leurs 
esclaves & à modérer autant qu'il étoit en eux la loi de l'esclavage, l'ont 
vu s'augmenter ou au moins se soutenir au même nombre. On en cite un 
qui a doublé le nombre de ses esclaves en quatorze ans par sa propre 
population. 
3°. Si l'État économisait par an quatre millions de livres, de primes & 
encouragemens qu'il donne ou propose aujourd'hui à la Traite des Noirs 
pour la porter à toute l'étendue nécessaire aux remplacemens des pertes 
d'esclaves, & au maintien des Colonies sous le régime de l'esclavage, 
les Colons de leur côté épargneroient en masse vingt ou vingt-cinq 
millions qu'ils dépensent annuellement en achats de Nègres nouveaux. 
4°. Les moeurs des Colons, & de toute la partie de la Nation qui a des 
rapports avec eux, ainsi que les moeurs des Nègres de nos Colonies, 
gagneroient très-sensiblement à ce changement. 
5°. Les travaux des habitations, leur population, & les Colonies en 
général s'amélioreroient à toute sorte d'égards, n'étant plus composées 
que de Nègres Créoles. 
6°. Les Colonies seroient plus en sûreté, & mieux policées; elles 
deviendroient d'un entretien moins coûteux par une forte diminution, 
sinon la suppression totale, des dépenses de police, de justice, de 
détachemens, de la Caisse des Nègres suppliciés ou tués en marronage, 
des frais de géole, etc. 
Il est donc certain que la Traite des    
    
		
	
	
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