Oeuvres de André Lemoyne

André Lemoyne
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Oeuvres de André Lemoyne

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Title: Oeuvres de André Lemoyne Une Idylle normande.--Le Moulin
des Prés.--Alise d'Évran.
Author: André Lemoyne
Release Date: December 9, 2005 [EBook #17271]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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DE ANDRÉ LEMOYNE ***

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OEUVRES DE ANDRÉ LEMOYNE
_Une Idylle normande.--Le Moulin des Prés.--Alise d'Évran_.
PARIS ALPHONSE LEMERRE, ÉDITEUR 27-31, PASSAGE
CHOISEUL, 27-31 M DCCC LXXXVI
IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE:
10 exemplaires sur papier Whatman. 15 exemplaires sur papier de
Chine.
_Tous ces exemplaires sont numérotés et paraphés par l'Éditeur_.

UNE IDYLLE NORMANDE
_Ouvrage couronné par l'Académie française_
A Jules Sandeau.

UNE IDYLLE NORMANDE
I
Le comte Henri de Morsalines avait sa trentaine sonnée depuis deux
mois et cinq jours, le 15 avril 1860. Son père, ancien armateur du
Havre, n'avait pas cru trop déroger en gagnant, à grande vitesse, en
toute probité du reste, l'argent fiévreux des affaires. De larges
entreprises maritimes, confiées à d'intelligents capitaines et favorisées
d'une heureuse étoile et d'un bon vent, l'avaient promptement enrichi. Il
avait eu l'esprit de se retirer en veine de gain, et d'acheter écus
comptants plusieurs grosses fermes dans la haute et la basse Normandie;
son fils unique n'avait eu que la peine de naître, en vrai fils de roi, dans
la plume de grèbe. Comme ceux à qui tout vient à souhait, il n'avait
presque jamais rien désiré. Ayant reçu une très belle éducation, du reste,
au collège Henri IV, et fait son droit comme tout le monde, il se

trouvait à sa majorité possesseur de trois cent bonnes mille livres de
rentes, en revenus de bien-fonds, qui ne roulent pas comme des pièces
d'or et ne s'envolent pas comme des billets. Dans ces conditions, on est
à peu près libre, de nos jours. Sans être un homme de génie, il était fort
intelligent, d'aptitudes variées, et, très heureusement pour un petit
monde d'élite, accusait une préférence marquée pour les belles oeuvres
d'art, surtout les toiles de paysagistes. Il ne ressemblait en rien à
quelques-uns de nos riches prudhommes contemporains qui furètent
sans pudeur les ateliers, achètent peu et parfois gratifient l'artiste d'un
sourire de commisération gouailleuse à faire lever les épaules des plus
humbles. Lui, admirait sérieusement, et payait fort bien. On dit même
que plus d'un peintre en détresse avait pu recevoir sans rougir quelque
sérieux service de ses belles mains généreuses. Dans le monde des Arts,
on ne parlait de lui qu'avec la plus courtoise déférence. Savoir donner
de bonne grâce est vraiment si rare, qu'on s'étonne parfois du petit
nombre des ingrats.
L'homme physique était grand, vif, alerte, robuste, prompt à la réplique.
Un jour de marché, un gars un peu aviné, s'étant permis quelques
paroles outrecuidantes sur la fille d'un de ses fermiers, avait été
vivement appréhendé au corps, et fait à genoux amende honorable
devant la pauvre fille rougissante et confuse. Dans son monde à lui,
pour deux ou trois petites affaires d'honneur dont j'oublie l'incident, il
s'était fort correctement comporté. De sorte que, si les paysannes le
regardaient comme un bon et solide garçon, courageux et bienveillant,
les dames du meilleur monde le considéraient comme un parfait
gentilhomme. A son âge, il avait un peu navigué, un peu chevauché, un
peu joué, un peu aimé, dans le hasard des jours, sans s'être jamais ni
trop amusé, ni trop ennuyé. Presque sans s'en apercevoir, il avait tout
doucement coulé dans la trentaine en restant garçon. A ceux qui lui
demandaient pourquoi il ne s'était pas encore marié, il répondait qu'il
n'avait pas eu le temps d'y songer. A ce parfait gentleman, il manquait
pourtant quelque chose, je ne sais quoi, un rien, une lueur dans la
physionomie; sa mère était morte en lui donnant la vie. Le sourire et le
regard maternels n'avaient pas éclairé son berceau.
Ce jour-là, le comte avait passé la matinée à tuer des lapins entre

Ravenoville et Saint-Marcouf, dans un pays accidenté dont les vieilles
futaies dominent les hauteurs et regardent de fort loin moutonner la
grande nappe bleue de la mer, étalée magnifiquement depuis la pointe
de la Hougue jusqu'aux grèves amoncelées de la Vire. «Une guerre aux
lapins, se disait-il, saint Hubert me
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