Oeuvres Complètes de Alfred de Musset - Tome 7.

Alfred de Musset
Œuvres Complètes De Alfred De
Musset (Tome
by Alfred De
Musset

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Musset (Tome
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Title: Œuvres Complètes De Alfred De Musset (Tome Septième)
Author: Alfred De Musset
Release Date: August 19, 2004 [EBook #13221]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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COMPLÈTES DE ALFRED ***

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OEUVRES COMPLÈTES
DE
ALFRED DE MUSSET
ÉDITION ORNÉE DE 28 GRAVURES
D' APRÈS LES DESSINS DE BIDA
D'UN PORTRAIT GRAVÉ PAR FLAMENG D'APRÈS L'ORIGINAL
DE LANDELLE
ET ACCOMPAGNÉE D'UNE NOTICE SUR ALFRED DE MUSSET
PAR SON FRÈRE
TOME SEPTIÈME
NOUVELLES ET CONTES
II
PARIS
ÉDITION CHARPENTIER
L. HÉBERT, LIBRAIRE
7, RUE PERRONET, 7
1888

CROISILLES
1839

I
Au commencement du règne de Louis XV, un jeune homme nommé
Croisilles, fils d'un orfèvre, revenait de Paris au Havre, sa ville natale.
Il avait été chargé par son père d'une affaire de commerce, et cette
affaire s'était terminée à son gré. La joie d'apporter une bonne nouvelle
le faisait marcher plus gaiement et plus lestement que de coutume; car,
bien qu'il eût dans ses poches une somme d'argent assez considérable, il
voyageait à pied pour son plaisir. C'était un garçon de bonne humeur, et
qui ne manquait pas d'esprit, mais tellement distrait et étourdi, qu'on le
regardait comme un peu fou. Son gilet boutonné de travers, sa perruque
au vent, son chapeau sous le bras, il suivait les rives de la Seine, tantôt
rêvant, tantôt chantant, levé dès le matin, soupant au cabaret, et charmé
de traverser ainsi l'une des plus belles contrées de la France. Tout en
dévastant, au passage, les pommiers de la Normandie, il cherchait des
rimes dans sa tête (car tout étourdi est un peu poète), et il essayait de
faire un madrigal pour une belle demoiselle de son pays; ce n'était pas
moins que la fille d'un fermier général, mademoiselle Godeau, la perle
du Havre, riche héritière fort courtisée. Croisilles n'était point reçu chez
M. Godeau autrement que par hasard, c'est-à-dire qu'il y avait porté
quelquefois des bijoux achetés chez son père. M. Godeau, dont le nom,
tant soit peu commun, soutenait mal une immense fortune, se vengeait
par sa morgue du tort de sa naissance, et se montrait, en toute occasion,
énormément et impitoyablement riche. Il n'était donc pas homme à
laisser entrer dans son salon le fils d'un orfèvre; mais, comme
mademoiselle Godeau avait les plus beaux yeux du monde, que
Croisilles n'était pas mal tourné, et que rien n'empêche un joli garçon
de devenir amoureux d'une belle fille, Croisilles adorait mademoiselle
Godeau, qui n'en paraissait pas fâchée. Il pensait donc à elle tout en
regagnant le Havre, et, comme il n'avait jamais réfléchi à rien, au lieu
de songer aux obstacles invincibles qui le séparaient de sa bien-aimée,
il ne s'occupait que de trouver une rime au nom de baptême qu'elle
portait. Mademoiselle Godeau s'appelait Julie, et la rime était aisée à
trouver. Croisilles, arrivé à Honfleur, s'embarqua le coeur satisfait, son
argent et son madrigal en poche, et, dès qu'il eut touché le rivage, il
courut à la maison paternelle.

Il trouva la boutique fermée; il y frappa à plusieurs reprises, non sans
étonnement ni sans crainte, car ce n'était point un jour de fête; personne
ne venait. Il appela son père, mais en vain. Il entra chez un voisin pour
demander ce qui était arrivé; au lieu de lui répondre, le voisin détourna
la tête, comme ne voulant pas le reconnaître. Croisilles répéta ses
questions; il apprit que son père, depuis longtemps gêné dans ses
affaires, venait de faire faillite, et s'était enfui en Amérique,
abandonnant à ses créanciers tout ce qu'il possédait.
Avant de sentir tout son malheur, Croisilles fut d'abord frappé de l'idée
qu'il ne reverrait peut-être jamais son père. Il lui paraissait impossible
de se trouver ainsi abandonné tout à coup; il voulut à toute force entrer
dans la boutique, mais on lui fit entendre que les scellés étaient mis; il
s'assit sur une borne, et, se livrant à sa douleur, il se mit à pleurer à
chaudes larmes, sourd aux consolations de ceux qui l'entouraient, ne
pouvant cesser d'appeler son père, quoiqu'il le sût déjà bien loin; enfin
il se leva, honteux de voir la foule s'attrouper autour de lui, et, dans le
plus profond désespoir, il se dirigea vers le port.
Arrivé
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