Monsieur Lecoq, vol 1, Lenquete | Page 3

Emile Gaboriau
la chemin��e, en travers, deux hommes ��taient ��tendus �� terre, sur le dos, les bras en croix, immobiles. Un troisi��me gisait au milieu de la pi��ce.
A droite, dans le fond, sur les premi��res marches d'un escalier conduisant �� l'��tage sup��rieur, une femme ��tait accroupie. Elle avait relev�� son tablier sur sa t��te, et poussait des g��missements inarticul��s.
En face, dans le cadre d'une porte de communication grande ouverte, un homme se tenait debout, roide et bl��me, ayant devant lui, comme un rempart, une lourde table de ch��ne.
Il ��tait d'un certain age, de taille moyenne, et portait toute sa barbe.
Son costume, qui ��tait celui des d��chargeurs de bateaux du quai de la Gare, ��tait en lambeaux et tout souill�� de boue, de vin et de sang.
Celui-l�� certainement ��tait le meurtrier.
L'expression de son visage ��tait atroce. La folie furieuse flamboyait dans ses yeux, et un ricanement convulsif contractait ses traits. Il avait au cou et �� la joue deux blessures qui saignaient abondamment.
De sa main droite, envelopp��e d'un mouchoir �� carreaux, il tenait un revolver �� cinq coups, dont il dirigeait le canon vers les agents.
--Rends-toi!... lui cria G��vrol.
Les l��vres de l'homme remu��rent; mais, en d��pit d'un visible effort, il ne put articuler une syllabe.
--Ne fais pas le malin, continua l'inspecteur de la s?ret��, nous sommes en force, tu es pinc��; ainsi, bas les armes!...
--Je suis innocent, pronon?a l'homme d'une voix rauque.
--Naturellement, mais cela ne nous regarde pas.
--J'ai ��t�� attaqu��, demandez plut?t �� cette vieille; je me suis d��fendu, j'ai tu��, j'��tais dans mon droit!
Le geste dont il appuya ces paroles ��tait si mena?ant, qu'un des agents, rest�� �� demi dehors, attira violemment G��vrol �� lui, en disant:
--Gare, G��n��ral! m��fiez-vous!... Le revolver du gredin a cinq coups et nous n'en avons entendu que deux.
Mais l'inspecteur de la S?ret��, inaccessible �� la crainte, repoussa son surbordonn�� et s'avan?a de nouveau, en poursuivant du ton le plus calme:
--Pas de b��tises, mon gars, crois-moi, si ton affaire est bonne, ce qui est possible, apr��s tout, ne la gate pas.
Une effrayante ind��cision se lut sur les traits de l'homme. Il tenait au bout du doigt la vie de G��vrol; allait-il presser la d��tente?
Non. Il lan?a violemment son arme �� terre en disant:
--Venez donc me prendre!
Et se retournant, il se ramassa sur lui-m��me, pour s'��lancer dans la pi��ce voisine, pour fuir par quelque issue connue de lui.
G��vrol avait devin�� ce mouvement. Il bondit en avant, lui aussi, les bras ��tendus, mais la table l'arr��ta.
--Ah!... cria-t-il, le mis��rable nous ��chappe.
D��j�� le sort du mis��rable ��tait fix��.
Tandis que G��vrol parlementait, un des agents--celui de la fen��tre--avait tourn�� la maison et y avait p��n��tr�� par la porte de derri��re.
Quand le meurtrier prit son ��lan, il se pr��cipita sur lui, il l'empoigna �� la ceinture, et avec une vigueur et une adresse surprenantes, le repoussa.
L'homme voulut se d��battre, r��sister; en vain. Il avait perdu l'��quilibre, il chancela et bascula par-dessus la table qui l'avait prot��g��, en murmurant assez haut pour que tout le monde p?t l'entendre:
--Perdu! C'est les Prussiens qui arrivent.
Cette simple et d��cisive manoeuvre, qui assurait la victoire, devait enchanter l'inspecteur de la S?ret��.
--Bien, mon gar?on, dit-il �� son agent, tr��s bien!... Ah! tu as la vocation, toi, et tu iras loin, si jamais une occasion...
Il s'interrompit. Tous les siens partageaient si manifestement son enthousiasme que la jalousie le saisit. Il vit son prestige diminu�� et se hata d'ajouter:
--Ton id��e m'��tait venue, mais je ne pouvais la communiquer sans donner l'��veil au gredin.
Ce correctif ��tait superflu. Les agents ne s'occupaient plus que du meurtrier. Ils l'avaient entour��, et apr��s lui avoir attach�� les pieds et les mains, ils le liaient ��troitement sur une chaise.
Lui se laissait faire. A son exaltation furieuse se avait succ��d�� cette morne prostration qui suit tous les efforts exorbitants. Ses traits n'exprimaient plus qu'une farouche insensibilit��, l'h��b��tude de la b��te fauve prise au pi��ge. ��videmment, il se r��signait et s'abandonnait.
D��s que G��vrol vit que ses hommes avaient termin�� leur besogne:
--Maintenant, commanda-t-il, inqui��tons-nous des autres, et ��clairez-moi, car le feu ne flambe plus gu��re.
C'est par les deux individus ��tendus en travers de la porte que l'inspecteur de la S?ret�� commen?a son examen.
Il interrogea le battement de leur coeur; le coeur ne battait plus.
Il tint pr��s de leurs l��vres le verre de sa montre; le verre resta clair et brillant.
--Rien! murmura-t-il apr��s plusieurs exp��riences, rien; ils sont morts. Le matin ne les a pas manqu��s. Laissons-les dans la position o�� ils sont jusqu'�� l'arriv��e de la justice et voyons le troisi��me.
Le troisi��me respirait encore.
C'��tait un tout jeune homme, portant l'uniforme de l'infanterie de ligne. Il ��tait en petite tenue, sans armes, et sa grande capote grise entr'ouverte laissait voir sa poitrine nue.
On le souleva avec mille pr��cautions, car il geignait pitoyablement �� chaque mouvement, et on le pla?a sur son s��ant, le dos appuy�� contre le mur.
Alors, il ouvrit
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