Mon oncle et mon curé; Le voeu de Nadia

Alice Cherbonelle
Mon oncle et mon curé; Le voeu
de Nadia, by

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Title: Mon oncle et mon curé; Le voeu de Nadia
Author: Alice Cherbonelle (aka Jean de la Brète)
Release Date: November 17, 2007 [EBook #23520]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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ONCLE ***

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MON ONCLE ET MON CURÉ
ET

LE VOEU DE NADIA
PAR
JEAN DE LA BRÈTE
COURONNÉ PAR L'ACADÉMIE FRANÇAISE, PRIX MONTYON
L'auteur et les éditeurs déclarent réserver leurs droits de reproduction et
de traduction en France et dans tous les pays étrangers, y compris la
Suède et la Norvège.
Ce volume a été déposé au ministère de l'intérieur (section de la
librairie) en août 1889.
PARIS
LIBRAIRIE PLON
E. PLON, NOURRIT ET Cie, IMPRIMEURS-ÉDITEURS
RUE GARANCIÈRE, 10
Tous droits réservés

MON ONCLE ET MON CURÉ
I
Je suis si petite qu'on pourrait me donner la qualification de naine, si
ma tête, mes pieds et mes mains n'étaient pas parfaitement
proportionnés à ma taille. Mon visage n'a ni la longueur démesurée, ni
la largeur ridicule que l'on attribue aux nains et aux êtres difformes en
général, et la finesse de mes extrémités serait enviée par plus d'une
belle dame.
Cependant, l'exiguïté de ma taille m'a fait verser des larmes en cachette.

Je dis en cachette, car mon corps lilliputien renfermait une âme fière,
orgueilleuse, incapable de donner le spectacle de ses faiblesses au
premier venu..., et surtout à ma tante. Du moins, telle était ma façon de
sentir à quinze ans. Mais les événements, les chagrins, les soucis, les
joies, la pratique de la vie, en un mot, ont détendu rapidement des
caractères beaucoup plus rigides que le mien.
Ma tante était la femme la plus désagréable que j'aie jamais connue. Je
la trouvais fort laide, autant que mon esprit, qui n'avait jamais rien vu
ni rien comparé, pouvait en juger. Sa figure était anguleuse et commune,
sa voix criarde, sa démarche lourde et sa stature ridiculement élevée.
Près d'elle, j'avais l'air d'un puceron, d'une fourmi. Quand je lui parlais,
je levais la tête aussi haut que si j'avais voulu examiner la cime d'un
peuplier. Elle était d'origine plébéienne et, semblable à beaucoup de
gens de sa race, prisait par-dessus tout la force physique et professait
pour ma chétive personne un dédain qui m'écrasait.
Son moral était la reproduction fidèle de son physique. Il ne renfermait
que des âpretés, des aspérités, des angles aigus contre lesquels les
infortunés, qui vivaient avec elle, se cassaient le nez quotidiennement.
Mon oncle, gentilhomme campagnard dont la bêtise était devenue
proverbiale dans le pays, l'avait épousée par faiblesse d'esprit et de
caractère. Il mourut peu de temps après son mariage, et je ne l'ai jamais
connu. Quand je pus réfléchir, j'attribuai cette mort prématurée à ma
tante, qui me paraissait de force à conduire rapidement en terre non
seulement un pauvre sire comme mon oncle, mais encore tout un
régiment de maris.
J'avais deux ans, quand mes parents s'en allèrent dans l'autre monde,
m'abandonnant aux caprices des événements, de la vie et de mon
conseil de famille. D'une belle fortune, ils laissaient d'assez jolis débris:
quatre cent mille francs, environ, en terres, qui rapportaient un fort bon
revenu.
Ma tante consentit à m'élever. Elle n'aimait pas les enfants, mais, son
mari ayant mal administré, elle était pauvre et songeait avec satisfaction

que l'aisance entrerait avec moi dans sa maison.
Quelle laide maison! grande, délabrée, mal tenue; bâtie au milieu d'une
cour remplie de fumier, de boue, de poules et de lapins. Derrière
s'étendait un jardin dans lequel poussaient pêle-mêle toutes les plantes
de la création, sans que personne s'en souciât le moins du monde. Je
pense que, de mémoire d'homme, on n'avait vu un jardinier émonder les
arbres ou arracher les mauvaises herbes qui croissaient à leur guise,
sans que ma tante et moi nous eussions l'idée de nous en occuper.
Cette forêt vierge me déplaisait, car, même enfant, j'avais un goût inné
pour l'ordre.
La propriété s'appelait le Buisson. Elle était située au fond de la
campagne, à une demi-lieue de l'église et d'un petit village composé
d'une vingtaine de chaumières. Ni château, ni castel, ni manoir à cinq
lieues à la ronde. Nous vivions dans l'isolement le plus complet. Ma
tante allait quelquefois à C..., la ville la plus voisine du Buisson. Je
désirais vivement l'accompagner, de sorte qu'elle ne m'emmenait
jamais.
Les seuls événements de notre vie
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