Carinus 
surmonté, Et tout le monde en fin, ou soubsmis, ou dompté, Dans un si 
noble employ me rendant admirable, Je te rendray, Seigneur, à chacun 
adorable, Mesme à tes envieux tu paroistras parfait. 
DIOCLETIAN. 
Non, Amy, de ton art, je veux un autre effet, La Renommée icy parle 
assez de ma gloire, Et Rome de mes faits ne perd point la memoire, 
Rutile vous dira quelle est ma volonté. Donnez ordre, Aquillin, que tout 
soit appresté, Qu'il ne leur manque rien. 
 
SCENE III. 
Rutile. Genest. Pamphilie. Luciane. Anthenor. Aristide. 
RUTILE. 
Si vous desirez plaire, Apprenez, mes amis, ce que vous devez faire, 
Cesar est ennemy de ces lâches mortels, Qui refusent l'encens qu'on 
doit à nos autels, Et d'un nouveau Prophete approuvant l'imposture 
L'adorent comme autheur de toute la nature. Faites voir leurs abus, 
descouvrez leur erreur, Rendez les des humains & la honte, & l'horreur, 
Mocquez-vous de leur foy, riez de leurs mysteres, Des superstitions de 
leurs regles austeres, Et des appas trompeurs de tant d'illusions Qui 
seduisent leurs sens & leurs opinions. Rendez-les en un mot de tout 
poinct ridicules: Mais d'ailleurs exaltez Jupiter, nos Hercules, Nos Mars, 
nos Apollons, & tous les autres Dieux Qu'ont icy de tout temps adoré 
nos ayeux. Je ne vous puis donner de conseil plus utile. 
GENEST.
Ny prescrire d'employ qui nous soit plus facile, Ces Rebelles, des 
Dieux & des hommes hays, M'ont fait abandonner mon Pere, & mon 
Pays, Où ne pouvant souffrir leurs coupables maximes Je me suis par 
ma fuitte affranchy de leurs crimes De sorte que contre eux justement 
animé, Je feray voir l'abus dont ce peuple est charmé: Et que le vain 
espoir qui le flatte & le lie N'est rien qu'une chimere, un songe, une 
folie, Qui s'estans emparez de ces foibles esprits Les rend de l'univers 
la fable & le mespris. Est-il rien de plaisant comme l'erreur extreme 
D'un mystere nouveau qu'ils appellent Baptéme, Où de trois gouttes 
d'eau legerement lavez, Ils se pensent desja dans les cieux eslevez? 
Certes on ne peut trop admirer leurs manies De croire que deux mots, 
& des ceremonies Puissent en un moment les rendre glorieux, Au point 
que d'aspirer au partage des Cieux. C'est par cette action si digne de 
risée, Et des meilleurs esprits de tout temps mesprisée Que je veux 
commencer les divertissemens, Que l'Empereur attend de nos 
raisonnemens, Nous ne sçaurions choisir de plus belle matiere. C'est là 
que me donnant une libre cariere, Je mettray les Chrestiens en un si 
mauvais point Qu'ils seront insensez s'ils ne se changent point. Ces 
moyens, quoy que doux, peuvent plus que les gesnes, Et la honte 
souvent fait bien plus que les peines. 
RUTILE. 
C'est ce qu'à l'Empereur j'ay pû faire esperer, Ne perdez point de temps, 
allez vous preparer, Et taschez de remplir une si belle attente. 
GENEST. 
Nous rendrons sur ce poinct sa Majesté contente. 
RUTILE. 
Si Cesar est content, vous le serez aussi. 
GENEST. 
Nous pouvons sans sortir nous concerter icy, Et sans qu'il soit besoin 
d'aprests ny de theatre, Icy mesme Cesar de nostre art idolatre Peut voir
nos actions avec tant de plaisirs Qu'ils passeront l'espoir & vaincront 
ses desirs. 
RUTILE. 
Le permettent les Dieux! mais adieu, je vous laisse. 
GENEST. 
Dans deux heures au plus vous verrez nostre adresse. 
 
SCENE IV. 
Genest. Pamphilie. Luciane. Anthenor. Aristide. 
GENEST. 
Amys, c'est à ce coup qu'il faut que nos esprits Devant un Empereur se 
disputent le prix, Et que chacun de nous amoureux de la gloire Tasche 
sur son Rival d'emporter la victoire. Cet employ glorieux peut changer 
nostre sort, Combattons ses rigueurs par un illustre effort, Et par une 
action qui ne soit pas commune Acquerons pour amis Cesar, & la 
Fortune. Ce bon heur aujourd'huy ne depend pas de nous, Vous sçavez 
comme moy ce qu'on attend de vous, Et sans beaucoup resver il nous 
sera facile De reduire en effects les advis de Rutile. 
ANTHENOR. 
Mais quelle Histoire enfin peut servir de sujet Et propre & convenable 
à ce rare projet? 
ARISTIDE. 
Celle d'Ardaleon, ou celle de Porphire, Qui tous deux bien aymez des 
maistres de l'Empire, Furent par les Chrestiens tellement abusez Qu'ils 
suivirent des voeux qu'ils avoient mesprisez, Et par une folie à nulle 
autre seconde Se rendirent l'opprobre & la fable du monde.
LUCIANE. 
Tous deux ont exercé nostre profession. 
PAMPHILIE. 
Et le baptesme fut la premiere action Qui flattant de ces fous la ridicule 
envie Leur fit perdre à tous deux & les biens & la vie. 
GENEST. 
Des principes pareils ont souvent chez les grands Produit à leurs 
autheurs des succez differents, Nous pouvons profiter icy de leur 
exemple, Et les suivre au Theatre, & non pas dans le Temple Où leur 
aveuglement leur fit trouver dans l'eau, Le funeste poison qui les mit au    
    
		
	
	
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