il aurait considéré cette position
séduisante comme très dangereuse; les tendances vers des compromis
et le soi-disant «travail pratique» se seraient probablement «accentués»
ce qui aurait provoqué des scissions. Le reproche de l'opposition
actuelle est que l'on ait abandonné ces théories, et cela surtout à la suite
du succès obtenu.
Liebknecht prétend aussi que Wildberger n'avait que répété au Congrès
ce qui avait été déjà dit mille fois mieux et plus énergiquement. Il en
accepte même une grande partie. Ce qui ne l'empêche nullement
d'ajouter que, si l'on se place à ce point de vue, il faudra rompre
complètement avec le parlementarisme et avoir le courage de son
opinion en se disant carrément anarchiste.
Très adroitement Auerbach lui répond là-dessus: «Nous considérons
comme juste encore aujourd'hui une grande partie des idées
développées par Liebknecht dans sa brochure de 1869, et je ne crois
pourtant pas que l'on ait jamais reproché au député Liebknecht de
pencher vers l'anarchie ou qu'il ait voulu devenir anarchiste. Pourtant,
en 1869, on aurait pu lui reprocher, en se basant sur sa brochure, la
même tactique anarchiste dont aujourd'hui il nous fait un reproche!»
Cette accusation d'anarchisme paraît être une douce manie chez
Liebknecht: elle se manifeste envers chaque adversaire. L'anarchisme
qu'il assure toujours «n'avoir aucune importance»--on pourrait fourrer
tous les anarchistes de l'Europe dans une couple de _paniers à
salade_--semble être un cauchemar qui le poursuit partout. Dès que l'on
n'est pas du même avis que lui, on devient «anarchiste», et de là à être
traité de mouchard il n'y a qu'un pas. Nous n'avons pas besoin de
défendre les anarchistes, mais nous protestons contre une telle façon
d'agir et nous déclarons qu'on ne saurait considérer le mot anarchiste
comme une injure dont on aurait à rougir. Les noms des martyrs de
Chicago, d'Élisée Reclus, de Kropotkine et de tant d'autres devraient
suffire pour écarter à jamais ces insinuations malveillantes.
Nous laissons de côté toutes les questions personnelles, lesquelles, ne
nous touchant ni de près ni de loin, ne nous inspirent pas le moindre
intérêt et parce que, probablement, il y a des torts de part et d'autre.
Mais personne ne peut reprocher à Wildberger et à Auerbach de ne pas
avoir soutenu une discussion sérieuse et serrée.
Une preuve, par exemple, que l'on s'enfonce de plus en plus dans le
bourbier parlementaire: Wildberger citait entre autres l'attitude de la
fraction du Reichstag à propos de la journée de huit heures. Au Congrès
international de Paris, on avait décidé à l'unanimité d'entreprendre une
agitation commune pour l'introduction immédiate de la journée de huit
heures. Les députés socialistes au Reichstag y firent la proposition
d'introduire en 1890 la journée de dix heures, en 1894 celle de neuf et
finalement en 1898 celle de huit. Il aurait donc fallu attendre huit
années avant d'arriver par le Reichstag à la journée de huit heures!
Si nous voulions être méchants, nous demanderions s'il y a peut-être
corrélation entre cette année et la fixation, par Engels, de l'époque de la
«grande catastrophe» en 1898. S'il en était ainsi, on serait tenté de
croire que l'obtention de la journée de huit heures est considérée
comme l'heureux aboutissant de cette catastrophe. Nous laissons au
lecteur impartial le soin de juger si cela n'équivaut pas à l'abandon du
but final. Mais en tout cas nous considérons comme une faute
impardonnable d'avoir fait une pareille proposition de loi. Et le
bien-fondé des dires de l'opposition ressort indubitablement de la
déclaration de Molkenbuhr; celui-ci dénie à cette opposition toute
raison d'être, vu que la journée de dix heures serait actuellement déjà
un grand progrès. Molkenbuhr ajoute que le projet de loi de la fraction
socialiste est plus radical que ce qui est déjà appliqué en Suisse et en
Autriche! En d'autres termes: nous devons déjà être très contents si
nous obtenons la journée de dix heures, et celle de huit heures n'est
pour nous qu'une question secondaire! Et nous demandons encore si
après de telles paroles l'accusation d'avachissement par le
parlementarisme est tellement dénuée de vérité?
Tout le monde est de l'avis de Liebknecht lorsqu'il met si
judicieusement en garde contre l'opportunisme, en réclamant le
maintien du caractère révolutionnaire du parti et lorsqu'il déclare
«qu'un compromis entre le capitalisme et le socialisme n'est pas
possible, vu que tous les partis bourgeois se trouvent basés sur le
capitalisme. (Comme cela diffère de son discours «ministériel» de
Halle, où il dit «qu'en Allemagne les choses en sont là qu'une action
parallèle avec les partis bourgeois ne peut pas être évitée jusqu'à un
certain point!») Même en abandonnant pour un instant la phrase de «la
masse réactionnaire, une et indivisible», nous ne devons pourtant point
perdre de vue que tous les autres partis constituent une masse compacte,
formant une forteresse, qui ne peut être rasée ni par la douceur, ni

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