elle un peu morne.
Mais le mot essentiel sur la vie, la formule d'action, r��duite �� ce qu'en peut fournir une petite r��veuse de grande indigence intellectuelle, lui fut dit sous la galerie en demi-clo?tre du chateau.
Dans cette cour pleine de pierres tombales, de sculptures mutil��es, de verdures et des herbes violentes du Languedoc, elle vit un d��bris gothique dont l'��nergique symbolisme, ironie et v��rit�� trop crues, la frappa singuli��rement: c'��tait un monstre qui d'une main se mettait une pomme dans la bouche, et de l'autre, avec un doigt d��licat, d��signait le bas de son ��chine.
Cette attitude si simple et nullement ��quivoque fut un enseignement pour cette petite fille. Le cynique professeur lui fit voir qu'il y a une corr��lation entre la n��cessit�� de vivre et le geste de la sensualit��. De ce sphinx-gargouille elle re?ut le tour d'esprit qui lui fit accepter toute sa vie les familiarit��s des vieillards.
* * * * *
Ainsi l'enfant grandit durant dix ann��es, jusqu'�� la mort des siens; et chaque saison, elle faisait mieux voir les vertus que ce mus��e d��posait en elle. Elle ressentait tous les mouvements de ce pass�� compliqu��, ardent et jeune, auquel elle avait laiss�� prendre son coeur.
Mais si cette vapeur de mort, qui se d��gage des objets ayant perdu leur utilit��, purgeait le coeur de B��r��nice de toute parcelle de mesquin et de bas, peut-��tre a trop p��n��trer cette petite fille la rendait-elle maladroite �� supporter la vie. Une ame embrum��e, dans un corps infiniment sensible, telle ��tait celle que nourrissait ce tombeau orn��. Son masque ent��t�� offrait de grandes analogies avec le petit buste du mus��e d'Arles, o�� la l��gende voit ce m��lancolique Marcellus, le jeune prince qui ne put vivre. Quand elle descendait dans l'appartement des siens, une fa?on de loge de concierge, elle s'y sentait ��trang��re et comme une petite exil��e. Virgile, s'il est vrai qu'il pleura sur la pauvre race italiote, trop attach��e au pass��, incapable de supporter sans g��mir les temps nouveaux, e?t ��t�� entra?n�� vers cette fille qui, pour se pr��parer �� la dure vie des d��daign��es, ne savait que s'envelopper de la part originelle de sa race.
Parfois, �� la fra?cheur du soir, apr��s ces journ��es du Midi si grossi��res de sensualit��, sa m��re, jeune femme distraite et toute �� se d��soler de son vieux mari, la pr��parait pour sortir. Dans l'armoire �� glace, fortement parfum��e des herbes recueillies sur la garrigue, le soleil couchant envoyait quelques rayons, et sa m��re, pour la coiffer, en tirait un petit chapeau de velours rouge, qui remplissait l'enfant passionn��e du sentiment de la beaut�� et brisait ses nerfs d'une douceur d��licieuse, dont l'��branlement retentit jusqu'en sa ch��re agonie. Mais elle se contraignait jusqu'�� ce qu'elle f?t sur la route, o�� sa m��re s'��cartait pour rire avec des jeunes gens. Alors, dans l'obscurit�� descendue, elle sanglotait, comprenant confus��ment que la vie des ��tres sensibles est chose somptueuse et triste.
O ma ch��re B��r��nice, combien vous ��tes pr��s de mon coeur.
* * * * *
CHAPITRE CINQUI��ME
B��R��NICE A AIGUES-MORTES.--LES AMOURS DE PETITE-SECOUSSE ET DE FRAN?OIS DE TRANSE.
J'��tais �� Arles depuis quelques jours, et cependant que j'en visitais les m��lancoliques beaut��s, je m'��tais mis en relation avec les esprits les plus g��n��reux de l'arrondissement, avec ceux qui sont impatients de toute modification et avec ceux qu'on avait m��content��s. Nous causames ensemble des injures subies par la patrie, tant �� l'int��rieur qu'�� l'ext��rieur, et de politiques nos relations devinrent presque cordiales.
Au milieu de ces d��licates d��marches, c'est B��r��nice qui m'occupait. Arles, o�� rien n'est vulgaire, me parlait de l'enfant du mus��e du roi Ren��. Ses ar��nes et ses temples d��vast��s manifestent que les hommes sont des fl��trisseurs; or si j'ai tant aim�� ma petite amie, c'est qu'elle ��tait pour moi une chose d'amertume. Mon inclination ne sera jamais sinc��re qu'envers ceux de qui la beaut�� fut humili��e: souvenirs d��cri��s, enfants froiss��es, sentiments offens��s. Saint-Trophime, humide et ��cras��, dit une louange irr��sistible �� la solitude et s'offre comme un refuge contre la vie. J'y retrouve sentiment exact qui m'emplissait jadis, quand, m'��chappant de mes dures besognes ou d'��tudes abstraites, je courais, fort tard dans la soir��e, �� mes ��tranges rendez-vous avec Petite-Secousse. Ce n'��tait, vraiment, ni amour, ni amiti��; dans cette trop forte vie parisienne, qui cr��ait en moi la volont�� mais laissait en d��tresse des parts de ma jeunesse, c'��tait un besoin extr��me de douceur et de pleurs.
Ainsi r��vant �� l'enfant pitoyable et fine qui est devenue une fille ��clatante, je me prom��ne sous le clo?tre. Des colombes roucoulent sur son bas toit de tuiles, les ��coliers ��nerv��s tapagent dans la ruelle, et pourtant c'est la paix o�� mon r��ve est �� l'aise. Arles, visit��e tant d'hivers, toujours me fut une cit�� de vie int��rieure. Chevaux qui riez avec un entrain myst��rieux dans l'Adoration des rois de Finsonius, --petite vierge de quinze ans,

Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.