Le Négrier, Vol. I

Édouard Corbière
Le Négrier, Vol. I

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Title: Le Négrier, Vol. I Aventures de mer
Author: Édouard Corbière
Release Date: February 8, 2006 [EBook #17714]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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NÉGRIER, VOL. I ***

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LE NÉGRIER
AVENTURES DE MER.

PAR
ÉDOUARD CORBIÈRE DE BREST
DEUXIÈME ÉDITION.
VOLUME I
PARIS A.-J. DÉNAIN ET DELAMARE ÉDITEURS DE L'HISTOIRE
DE L'EXPÉDITION FRANÇAISE EN ÉGYPTE 16. RUE VIVIENNE
1834.

A MONSIEUR
Henri Zschokke,
A ARAU.

Souvent je me suis rappelé l'émotion profonde que vous firent éprouver,
en ma présence, la vue de la mer et l'aspect de ces êtres hardis qui se
sont fait un métier d'en affronter les dangers. Les impressions d'un
homme comme vous sont presque toujours des jugemens portés sur les
objets qui les ont produites. Vous avez désiré connaître les moeurs de
ces marins, qui vous ont paru quelque chose de plus que des hommes
ordinaires. J'ai passé ma jeunesse au milieu d'eux: leur profession a été
vingt ans la mienne. Placé aujourd'hui en dehors de leur vie active, avec
d'autres sensations et d'autres travaux, j'ai voulu peindre, comme d'un
point de vue favorable à un artiste qui a parcouru le pays, leur caractère
aventureux, et les habitudes de leur vie nomade, au milieu d'un élément
dont ils se sont fait une patrie. J'ai fait un roman, enfin, avec quelques
matériaux d'histoire traditionnelle, et je vous le dédie, comme à un des
patriarches du genre.
N'allez pas croire toutefois, Monsieur, que la réputation élevée que vos
ouvrages vous ont acquise soit le seul motif qui m'ait déterminé à

placer sous l'égide de votre supériorité un essai trop peu digne de la
protection que je semble vouloir lui chercher. Si j'avais connu un
littérateur qui eût honoré plus que vous des fonctions publiques, ou un
homme public qui eût porté, dans la littérature, un caractère plus pur et
des prétentions plus modestes, c'est à lui que j'aurais offert le faible
hommage que je vous prie aujourd'hui d'agréer, avec la bienveillance
dont vous avez bien voulu m'honorer.
ED. CORBIÈRE.

Un jeune capitaine négrier, que j'avais connu à Brest dans mon enfance,
me rencontra, en 1818, à la Martinique. Il se mourait d'une maladie
incurable, contractée à la côte d'Afrique. «Si tu es encore ici quand je
filerai mon câble par le bout, me dit-il dans le langage qui lui était
ordinaire, tu ramasseras quelques paperasses que j'ai laissées au fond de
ma malle. C'est le journal de ma vie de forban, écrit sur l'habitacle de
ma goëlette, en style d'écumeur de mer. Tu m'arrangeras un peu tout ce
barbouillage, en ayant soin de cacher mon nom, par égard pour ma
pauvre mère. C'est bien assez que je lui aie ravi tout ce qui la consolait
de m'avoir mis au monde, sans que j'aille encore poursuivre les jours
qui lui restent, du souvenir d'un garnement comme moi.» Je ne compris
que plus tard le sens de ces derniers mots.
Cinq jours après notre rencontre, mon ami négrier expira dans mes bras,
chez une mulâtresse. Quelques minutes avant d'exhaler son dernier
souffle, ses lèvres charbonnées murmuraient encore une chanson de
gaillard d'avant. Il voulait, disait-il, _faire tête à la mort jusqu'au bout._
Il tint parole.
On ouvrit son testament. Il me léguait son brick-goélette, superbe
embarcation sur laquelle il avait fait trois voyages à la côte. Le reste de
sa fortune revenait à sa mère. Je savais qu'il avait un frère qu'il aimait
beaucoup, et je fus surpris de ne retrouver, dans l'expression de ses
dernières volontés, aucune disposition favorable à celui-ci.... Je ne
voulus accepter que le journal de mer de mon compatriote. C'est cet
écrit, aussi bizarre que les événemens qui l'ont produit, que je me suis

appliqué à mettre un peu en ordre, en traversant une douzaine de fois
l'Océan.

LE NÉGRIER

1.
LE DÉPART.
Vocation.--Le professeur athée.--Le corsaire le Sans-Façon.--Le
capitaine Arnandault.--Mal de mer.--Cure radicale.--Maître Philippe.
--Fil-à-Voile.--Combat.--Prise.--Coup de cape.--Contes du bord.--Le
protégé du capitaine d'armes.--Petit Jacques.
Les circonstances de ma naissance semblèrent tracer ma vocation. Je
reçus le jour en pleine mer, dans une traversée que mon père, vieil
officier d'artillerie de marine, faisait faire à une jolie créole qu'il avait
épousée aux Gonaïves, et qu'il ramenait en France à bord de sa frégate.
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