Lassassinat du pont-rouge | Page 2

Charles Barbara
??tait veuve, qu'elle donnait des le?��ons de piano, qu'elle vivait avec sa m?��re, et que la m?��re et la fille recevaient journellement la visite d'un vieillard nomm?? Fr??d??ric, qui semblait tout entier ?? leur discr??tion.
??J'ai pressenti leur g?ane, ajouta Max, et je t?��che, sans le leur dire, de leur trouver des ??l?��ves.
--Comment se nomment-elles?
--Voici leur nom, ou du moins celui de la fille, dit Max en prenant une carte de visite sur sa table: Mme Thillard-Ducornet.??
Rodolphe ouvrit d??mesur??ment les yeux, et, de la porte qu'il entr'ouvrait d??j??, revint au milieu de la chambre.
??Ah! fit-il tout d'une haleine, on voit bien que tu ne lis pas les journaux. Tu conna??trais au moins de nom le mari de cette veuve. Il ??tait agent de change. On l'a retir?? de la Seine, un matin ou un soir, il n'y a pas de cela tr?��s-longtemps. La nouvelle, Dieu merci, a fait assez de tapage, car on a d??couvert dans la caisse du d??funt un d??ficit de plus d'un million. C'??tait un vrai siphon que cet homme-l??, ?? cheval sur deux urnes: la Bourse et le quartier Br??da; il pompait l'or dans l'une pour l'??pancher dans l'autre....??
Le visage de Max exprimait une stup??faction profonde.
??C'est ??trange! fit-il. Je pressentais bien quelque secret fun?��bre, mais je ne l'eusse jamais suppos?? si horrible.
--Attends donc, reprit Rodolphe, je me rappelle quelques d??tails. Il ??tait en tenue de voyage, en casquette et en manteau, avec un sac de nuit et un portefeuille gonfl?? de cent mille francs en billets de banque. A dire vrai, il n'y avait pas l?? de quoi plomber une de ses dents creuses; aussi a-t-on dit qu'il ne s'??tait noy?? que par remords de ne pas emporter davantage.??
Destroy n'??coutait d??j?? plus. Secouant la t?ate, l'air pensif, ?? mi-voix, il disait:
??Je m'explique actuellement leur m??lancolie. Ce n'est rien d'?atre pauvre; mais avoir grandi au milieu du luxe et tomber dans la mis?��re, je ne sache pas qu'il soit d'infortune plus grande.??
Cet attendrissement ramenait par une pente sensible ?? la conversation de tout ?? l'heure, et Rodolphe, qui s'en aper?��ut, en eut le frisson.
D'ailleurs, par le fait d'un tic singulier qui devait plus tard d??g??n??rer en maladie, il ??prouvait un besoin perp??tuel de locomotion, et ne semblait entrer dans un endroit que pour songer sur-le-champ au moyen d'en sortir. Pour la deuxi?��me fois, il invoqua la haute gravit?? de son rendez-vous, et se sauva, non moins satisfait de changer de lieu que d'??chapper ?? ce qu'il appelait ironiquement les douches philosophiques du docteur Max.

II.
Profil du h??ros.
Tout entier ?? la pr??occupation d'un fait qui lui donnait la clef des tristesses que Mme Thillard essayait vainement de dissimuler sous des mani?��res calmes et dignes, Destroy, comme il faisait presque quotidiennement, ?? une heure donn??e, se rendit au jardin du Luxembourg. Il s'y rencontra avec un autre de ses amis, un nomm?? Henri de Villiers, lequel, que ce f??t ?? cause de ceci ou de cela, de sa naissance ou de son entendement, ou d'autre chose encore, se posait en d??fenseur intr??pide du pass??. Bien que li?? avec lui, Max ne l'en trouvait pas moins tout aussi peu logique qu'un homme qui donnerait, ?? tout bout de champ, ses p??ch??s de jeunesse en exemple aux errements d'un autre ?��ge. De Villiers, outre cela, chez lequel le sentiment semblait faire d??faut, ??tait loin d'avoir l'humeur charitable. Mais il se piquait de mener une vie conforme aux principes qu'il confessait, et ses opinions et ses actes en recevaient un lustre d'honn?atet?? que Destroy ne pouvait m??conna??tre.
Causant de choses et d'autres, ils avaient d??j?? mesur?? nombre de fois, de bout en bout, ?? pas compt??s, l'all??e de l'Observatoire, quand ils se crois?��rent avec un promeneur qui d??via de son chemin pour venir ?? eux.
??Mais c'est Cl??ment!?? s'??cria Max en devan?��ant brusquement de Villiers pour ?atre plus t?��t aupr?��s du nouveau venu.
Dans les myst?��res de notre nature, ?? la vue de certains hommes, nous sommes parfois assaillis d'impressions p??nibles que nous ne saurions d??finir. Leur ext??rieur ne suffit pas toujours ?? justifier l'antipathie instinctive qu'ils soul?��vent; on dirait qu'il se d??gage de leur vie un fluide qui les enveloppe d'une atmosph?��re o?1 l'on ne peut respirer sans malaise. Destroy accostait pr??cis??ment un individu de ce genre. De taille moyenne et d??gag??e, ses jambes solides, ses bras d'athl?��te, sa carrure, ??veillaient des id??es de sant?? et de force que d??mentaient bient?��t une figure cadav??reuse dont les plans ?? vives ar?ates, les plis profonds, les ravages, l'impassibilit??, rappelaient ces joujoux en sapin qu'on taille au couteau dans les villages de la for?at Noire. Ses cheveux ch?��tains aux reflets rouge?��tres, sa moustache rare de couleur rousse, sa peau terreuse, parsem??e de taches vertes, composaient un ensemble de tons qui donnaient ?? sa t?ate une apparence sordide et venimeuse. Par instants, un regard ??teint, louche, sinistre, per?��ait le verre
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