Lassassinat du pont-rouge

Charles Barbara
L'assassinat du pont-rouge

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Title: L'assassinat du pont-rouge
Author: Charles Barbara
Release Date: October 20, 2004 [EBook #13808]
Language: French
Character set encoding: UTF-8
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L'ASSASSINAT DU PONT-ROUGE ***

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 L'ASSASSINAT DU PONT-ROUGE
PAR
CHARLES BARBARA
BIBLIOTHEQUE DES CHEMINS DE FER
LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET Cie PARIS, RUE
PIERRE-SARRAZIN, N° 14 Droit de traduction réservé
1859
TYPOGRAPHIE DE CH. LAHURE ET Cie Imprimeurs du Sénat et

de la Cour de Cassation Paris, rue de Vaugirard N°9.

L'ASSASSINAT DU PONT-ROUGE.

I.
Deux Amis.
Dans une chambre claire, inondée des rayons du soleil d'avril, deux
jeunes gens déjeunaient et causaient. Le plus jeune, d'apparence
frêle, avec des cheveux blonds, des yeux extrêmement vifs, une
physionomie à traits prononcés où se peignait un caractère
ferme, faisait, à côté de l'autre, qui avait des joues encore roses,
des buissons de cheveux bruns et cet oeil langoureux particulier aux
natures indécises qu'un rien abat et décourage, un contraste
saisissant. Le blond disait Rodolphe en s'adressant au brun, et ce
dernier appelait Max le jeune homme aux yeux bleus, dont le vrai nom
était Maximilien Destroy. C'étaient deux camarades d'enfance et
de collège; ils devisaient sur la littérature, et Rodolphe qui, dans un
état de marasme, était venu voir son ami avec l'espoir d'un
allégement, s'appesantissait sur les mécomptes, l'amertume, _les
épines sans roses_ de la vie d'artiste.
Au contraire, il semblait que Max se fît un jeu d'ajouter à cette
mélancolie.
«Les productions de ces rares élus que l'on compare justement aux
arbres à fruits exceptées, disait-il, les oeuvres d'art sont en
général des filles de l'obstacle et, notamment, de la douleur. Et,
par là je ne prétends pas que le bonheur stériliserait un homme
de génie; mais, dans ma conviction, nombre d'hommes supérieurs,
pour ne pas dire la grande majorité, doivent d'être tels ou au
mépris qu'on a fait d'eux, ou aux empêchements qu'on a semés
sous leurs pas, en un mot, à des souffrances quelconques.»
Pour Rodolphe, qui, à l'instar de tant d'autres, ne voyait guère dans
les arts qu'un moyen de satisfaire les appétits et les vanités qui
tenaillaient sa chair et gonflaient son esprit, cette sorte de profession de
foi était littéralement une ortie entre le cou et la cravate. D'un air
piteux il regardait alternativement son chapeau et la porte, et se remuait
à la façon d'un enfant tiraillé par la danse de Saint-Gui.
Les ressources de Max se bornaient présentement à une place de

second violon dans l'orchestre d'un théâtre de troisième ordre. La
misère ne lui causait ni impatience ni velléité de révolte. Loin
de là : dans la douce persuasion de porter en lui le germe d'excellents
livres, il puisait la patience héroïque de l'homme sûr de
lui-même et de l'avenir. Il n'avait ni horreur ni engouement pour la
pauvreté; il la regardait comme un mal utile et transitoire, et, au
grand scandale de beaucoup de ses amis, comme un stimulant
énergique contre l'engourdissement de l'âme et des facultés. Il
comprenait parfaitement la pantomime de Rodolphe. Il n'en continua
pas moins:
«Aussi, ne puis-je sans irritation entendre gémir sur les douleurs du
poëte et parler de l'urgence d'en empêcher le retour. J'en demande
pardon à ceux qui ont soutenu cette thèse: c'est un paradoxe, un
prétexte à déclamations contre une société à qui on peut
imputer des torts plus graves. En définitive, l'homme exempt de
douleurs ne sera jamais qu'un homme médiocre. Il n'y a pas de
milieu, il faut choisir ou d'être une borne, une végétation, un
manoeuvre, ou de souffrir....»
Il semblait décidément que Rodolphe fût dévoré par des
fourmis. Vraisemblablement sa vertu était à bout. Il se souvint
à point nommé d'un rendez-vous de conséquence, et se leva avec
l'étourderie d'un jouet à surprise. Mais au moment de sortir,
frappé par les sons d'un piano qui résonnait à l'étage
inférieur, il s'arrêta pour demander qui faisait ainsi rouler des
accords.
«Une femme avec qui je fais de la musique, répliqua Destroy.
--Est-elle jolie?»
A cette question, balbutiée avec un empressement qui la rendait
comique, Max fixa sur son ami des
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