La tentation de Saint Antoine 
 
Project Gutenberg's La tentation de Saint Antoine, by Gustave Flaubert 
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Title: La tentation de Saint Antoine 
Author: Gustave Flaubert 
Release Date: February 8, 2004 [EBook #10982] 
Language: French 
Character set encoding: ISO Latin-1 
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TENTATION DE SAINT ANTOINE *** 
 
Produced by Anne Dreze and Marc D'Hooghe 
 
LA TENTATION DE SAINT ANTOINE 
PAR 
GUSTAVE FLAUBERT 
 
A LA MEMOIRE DE MON AMI ALFRED LEPOITTEVIN 
DECEDE A LA NEUVILLE CHANT-D'OISEL 
Le 3 avril 1848 
 
I. 
C'est dans la Thebaide, au haut d'une montagne, sur une plate-forme
arrondie en demi-lune, et qu'enferment de grosses pierres. 
La cabane de l'Ermite occupe le fond. Elle est faite de boue et de 
roseaux, a toit plat, sans porte. On distingue dans l'interieur une cruche 
avec un pain noir; au milieu, sur une stele de bois, un gros livre; par 
terre, ca et la, des filaments de sparterie, deux ou trois nattes, une 
corbeille, un couteau. 
A dix pas de la cabane, il y a une longue croix plantee dans le sol; et, a 
l'autre bout de la plate-forme, un vieux palmier tordu se penche sur 
l'abime, car la montagne est taillee a pic, et le Nil semble faire un lac au 
bas de la falaise. 
La vue est bornee a droite et a gauche par l'enceinte des roches. Mais 
du cote du desert, comme des plages qui se succederaient, d'immenses 
ondulations paralleles d'un blond cendre s'etirent les unes derriere les 
autres, en montant toujours;--puis au dela des sables, tout au loin, la 
chaine libyque forme un mur couleur de craie, estompe legerement par 
des vapeurs violettes. En face, le soleil s'abaisse. Le ciel, dans le nord, 
est d'une teinte gris-perle, tandis qu'au zenith des nuages de pourpre, 
disposes comme les flocons d'une criniere gigantesque, s'allongent sur 
la voute bleue. Ces rais de flamme se rembrunissent, les parties d'azur 
prennent une paleur nacree; les buissons, les cailloux, la terre, tout 
maintenant parait dur comme du bronze; et dans l'espace flotte une 
poudre d'or tellement menue qu'elle se confond avec la vibration de la 
lumiere. 
SAINT-ANTOINE 
qui a une longue barbe, de longs cheveux, et une tunique de peau de 
chevre, est assis, jambes croisees, entrain de faire des nattes. Des que le 
soleil disparait, il pousse un grand soupir, et regardant l'horizon: 
Encore un jour! un jour de passe! 
Autrefois pourtant, je n'etais pas si miserable! Avant la fin de la nuit, je 
commencais mes oraisons; puis, je descendais vers le fleuve chercher 
de l'eau, et je remontais par le sentier rude avec l'outre sur mon epaule, 
en chantant des hymnes. Ensuite, je m'amusais a ranger tout dans ma 
cabane. Je prenais mes outils; je tachais que les nattes fussent bien 
egales et les corbeilles legeres; car mes moindres actions me semblaient 
alors des devoirs qui n'avaient rien de penible. 
A des heures reglees je quittais mon ouvrage; et priant les deux bras 
etendus je sentais comme une fontaine de misericorde qui s'epanchait
du haut du ciel dans mon coeur. Elle est tarie, maintenant. Pourquoi?... 
Il marche dans l'enceinte des roches, lentement. 
Tous me blamaient lorsque j'ai quitte la maison. Ma mere s'affaissa 
mourante, ma soeur de loin me faisait des signes pour revenir; et l'autre 
pleurait, Ammonaria, cette enfant que je rencontrais chaque soir au 
bord de la citerne, quand elle amenait ses buffles. Elle a couru apres 
moi. Les anneaux de ses pieds brillaient dans la poussiere, et sa tunique 
ouverte sur les hanches flottait au vent. Le vieil ascete qui m'emmenait 
lui a crie des injures. Nos deux chameaux galopaient toujours; et je n'ai 
plus revu personne. 
D'abord, j'ai choisi pour demeure le tombeau d'un Pharaon. Mais un 
enchantement circule dans ces palais souterrains, ou les tenebres ont 
l'air epaissies par l'ancienne fumee des aromates. Du fond des 
sarcophages j'ai entendu s'elever une voix dolente qui m'appelait; ou 
bien, je voyais vivre, tout a coup, les choses abominables peintes sur 
les murs; et j'ai fui jusqu'au bord de la mer Rouge dans une citadelle en 
ruines. La, j'avais pour compagnie des scorpions se trainant parmi les 
pierres, et au-dessus de ma tete, continuellement des aigles qui 
tournoyaient sur le ciel bleu. La nuit, j'etais dechire par des griffes, 
mordu par des becs, frole par des ailes molles; et d'epouvantables 
demons, hurlant dans mes oreilles, me renversaient par terre. Une fois 
meme, les gens d'une caravane qui s'on allait vers Alexandrie m'ont 
secouru, puis emmene avec eux. 
Alors, j'ai voulu m'instruire pres du bon vieillard Didyme. Bien    
    
		
	
	
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