[Note 14: Richard, _Traditions populaires._] 
C'est surtout au pays de Caux (Seine-Inférieure) qu'existe la légende 
des pierres tournantes. Ces pierres faisaient autrefois trois tours sur 
elles-mêmes pendant la Messe de minuit, et les monstres qui étaient 
censés y habiter exécutaient autour d'elles des danses folles qu'il eût été 
dangereux de troubler. Citons la chaise de Gargantua à Duclair, la 
pierre Gante à Tancarville, la pierre du Diable à Criquetot-sur-Ouville. 
A _Millières_, dans le Cotentin (Manche), au carrefour des Mariettes, 
se trouve un bloc de pierre pesant mille kilos, qui, dit-on, saute trois 
fois, le jour de Noël, à minuit. 
On croit encore, au pays de Caux, que les cloches perdues sonnent 
pendant la Messe de minuit. 
Certains affirment avoir entendu l'ancienne cloche de l'église des 
moines d'Ouville-l'Abbaye, qui passe pour être enfouie dans le 
«Bose-aux-Moines», à Boudeville. 
Mais il faut surtout lire les _légendes bretonnes._ 
Nombreuses autant qu'énormes sont les pierres qui se déplacent 
pendant la Messe de minuit, pour aller boire, comme des moutons 
altérés, aux rivières et aux ruisseaux. 
Un mégalithe, près de Jugon (Côtes-du-Nord), se rend à la rivière de 
l'Arguenon. Dans le bois de Couardes, un bloc de granit, haut de trois 
mètres, descend pour aller boire au ruisseau voisin et remonte à sa 
place de lui-même. 
Il y a, au sommet du mont Beleux, un menhir qui se laisse enlever par
un merle et qui met à découvert un trésor. 
Il faut entendre surtout, telle qu'elle nous est contée par Emile 
Souvestre, la jolie légende des pierres de Plouhinec qui vont boire à la 
rivière d'Intel[15]. 
[Note 15: Emile Souvestre, Le Foyer Breton, tome II. p. 181.] 
La plus célèbre était jadis la grosse pierre de Saint-Mirel, dont 
Gargantua se servit pour aiguiser sa faux, et qu'il piqua, après la 
fauchaison, comme on la retrouve encore aujourd'hui. Elle cachait un 
trésor qui tenta un paysan des alentours. Ce paysan était si avare qu'il 
n'eût pas trouvé son pareil: le liard du pauvre, la pièce d'or du riche, il 
prenait tout; il se serait payé, s'il eût fallu, avec la chair des débiteurs. 
Quand il sut qu'à la Noël les roches allaient se désaltérer dans les 
ruisseaux, en laissant à découvert des richesses enfouies par les anciens, 
il songea, pendant toute la journée, à s'en emparer. 
Pour pouvoir prendre le trésor, il fallait cueillir, durant les douze coups 
de minuit, le rameau d'or qui brillait à cette heure seulement dans les 
bois de coudriers et qui égalait en puissance la baguette des plus 
grandes fées. Lors, ayant cueilli le rameau, il se précipita de toute sa 
force vers le plateau où le rocher de Gargantua profilait sa masse 
sombre, et, lorsque minuit eut sonné, il écarquilla les yeux. 
Lourdement le bloc de pierre se mettait en marche, s'élevant au-dessus 
de la terre, bondissant comme un homme ivre à travers la lande déserte, 
avec des secousses brusques qui faisaient sonner au loin le terrain de la 
vallée. 
Jusqu'à ce moment la branche magique éclairait l'endroit que la pierre 
venait de quitter. Un vaste trou s'ouvrait, tout rempli de pièces d'or. 
Ce fut un éblouissement pour l'avare, qui sauta au milieu du trésor et se 
mit en devoir de remplir le sac qu'il avait apporté. Une fois le sac bien 
chargé, il entassa ses pièces d'or dans ses poches, dans ses vêtements, 
jusque dans sa chemise. Dans son ardeur, il oubliait la pierre qui allait
venir reprendre sa place. Déjà les cloches ne sonnaient plus. Tout à 
coup le silence de la nuit fut troublé par les coups saccadés du roc qui 
gravissait la colline et qui semblait frapper la terre avec plus de force, 
comme s'il était devenu plus lourd après avoir bu à la rivière. L'avare 
ramassait toujours ses pièces d'or. Il n'entendit pas le fracas que fit la 
pierre quand elle s'élança d'un bond vers son trou, droite comme si elle 
ne l'avait pas quitté. 
Le pauvre homme fut broyé sous cette masse énorme, et de son sang il 
arrosa le trésor de Saint-Mirel[16]. 
[Note 16: Lectures pour Tous, déc. 1903, p. 190.] 
Animaux Il existe, en France surtout, une croyance populaire dont les 
formes varient suivant les différentes contrées: c'est la conversation des 
animaux entre eux pendant la Messe de minuit et surtout pendant la 
lecture ou le chant de la Généalogie. 
C'est sans doute une réminiscence de la représentation de l'ancien 
«Mystère de la Nativité», pendant laquelle _on faisait parler les 
animaux._ 
Cette croyance si répandue, avec de nombreuses variantes, peut se 
résumer ainsi: un paysan, probablement ivre, ayant omis d'offrir à son 
bétail le réveillon traditionnel, entend ce dialogue entre les deux grands 
boeufs de son étable: 
Premier boeuf: «Que ferons-nous demain, compère»? 
Second boeuf: «Porterons notre maître en terre...» 
Le maître, furieux, en entendant cette prédiction, saisit une fourche 
pour frapper le prophète    
    
		
	
	
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