La nouvelle Carthage

Georges Eekhoud
La nouvelle Carthage

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Title: La nouvelle Carthage
Author: Georges Eekhoud
Release Date: April 5, 2005 [EBook #15558]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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Georges Eekhoud

LA NOUVELLE CARTHAGE

(1888)

Table des matières
PREMIèRE PARTIE: RéGINA I. LE JARDIN II. LE ?MOULIN DE PIERRE? III. LA FABRIQUE IV. LE ROBINSON SUISSE V. LE FOSSé VI. LE COSTUME NEUF VII. HéMIXEM VIII. DANS LE MONDE IX. ?LA GINA? X. L'ORANGERIE DEUXIèME PARTIE: FREDDY BéJARD I. LE PORT II. LA CASQUETTE III. RUCHES ET GUêPIERS IV. LA CANTATE V. L'éLECTION VI. TROUBLES VII. GENDRE ET BEAU-PèRE VIII. DAELMANS-DEYNZE IX. LA BOURSE TROISIèME PARTIE: LAURENT PARIDAEL I. LE PATRIMOINE II. LES éMIGRANTS III. LE RIET-DIJK IV. CONTUMACE V. LES ?RUNNERS? VI. CARNAVAL VII. LA CARTOUCHERIE Pièce justificative

PREMIèRE PARTIE: RéGINA

I. LE JARDIN
M. Guillaume Dobouziez régla les funérailles de Jacques Paridael de fa?on à mériter l'approbation de son monde et l'admiration des petites gens. ?Cela s'appelle bien faire les choses!? ne pouvait manquer d'opiner la galerie. Il n'aurait pas exigé mieux pour lui- même: service de deuxième classe (mais, hormis les croque-morts, qui s'y conna?t assez pour discerner la nuance entre la première qualité et la suivante?); messe en plain-chant; pas d'absoute (inutile de prolonger ces cérémonies crispantes pour les intéressés et fastidieuses pour les indifférents); autant de mètres de tentures noires larmées et frangées de blanc; autant de livres de cire jaune.
De son vivant, feu Paridael n'aurait jamais espéré pareilles obsèques, le pauvre diable!
Quarante-cinq ans, droit, mais grisonnant déjà, nerveux et sec, compassé, sanglé militairement dans sa redingote, le ruban rouge à la boutonnière, M. Guillaume Dobouziez marchait derrière le petit Laurent, son pupille, unique enfant du défunt, plongé dans une douleur aigu? et hystérique.
Laurent n'avait cessé de sangloter depuis la mortuaire. Il fut plus pitoyable encore à l'église. Les regrets sonnés au clocher et surtout les tintements saccadés de la clochette du choeur imprimaient des secousses convulsives à tout son petit être.
Cette affliction ostensible impatienta même le cousin Guillaume, ancien officier, un dur à cuire, ennemi de l'exagération.
-- Allons, Laurent, tiens-toi, sapristi!... Sois raisonnable!... Lève-toi!... Assieds-toi!... Marche! ne cessait-il de lui dire à mi-voix.
Peine perdue. à chaque instant le petit compromettait, par des hurlements et des gesticulations, l'irréprochable ordonnance du cérémonial. Et cela quand on faisait tant d'honneur à son papa!
Avant que le convoi funèbre se f?t mis en marche, M. Dobouziez, en homme songeant à tout, avait remis à son pupille une pièce de vingt francs, une autre de cinq, et une autre de vingt sous. La première était pour le plateau de l'offrande; le reste pour les quêteurs. Mais cet enfant, décidément aussi gauche qu'il en avait l'air, s'embrouilla dans la répartition de ses aum?nes et donna, contrairement à l'usage, la pièce d'or au représentant des pauvres, les cinq francs au marguillier, et les vingt sous au curé.
Il faillit sauter dans la fosse, au cimetière, en répandant sur le cercueil cette pelletée de terre jaune et fétide qui s'éboule avec un bruit si lugubre!
Enfin, on le mit en voiture, au grand soulagement du tuteur, et la clarence à deux chevaux regagna rapidement l'usine et l'h?tel des Dobouziez situés dans un faubourg en dehors des fortifications.
Au d?ner de famille, on parla d'affaires, sans s'attarder à l'événement du matin et en n'accordant qu'une attention maussade à Laurent placé entre sa grand'tante et M. Dobouziez.' Celui-ci ne lui adressa la parole que pour l'exhorter au devoir, à la sagesse et à la raison, trois mots bien abstraits, pour ce gar?on venant à peine de faire sa première communion.
La bonne grand'tante de l'orphelin e?t bien voulu compatir plus tendrement à sa peine, mais elle craignait d'être taxée de faiblesse par les ma?tres de la maison et de le desservir auprès d'eux. Elle l'engagea même à rencogner ses larmes de peur que ce désespoir prolongé ne par?t désobligeant à ceux qui allaient désormais lui tenir lieu de père et de mère. Mais à onze ans, on manque de tact, et les injonctions, à voix basse, de la brave dame ne faisaient que provoquer des recrudescences de pleurs.
à travers le brouillard voilant ses prunelles, Laurent, craintif et pantelant comme un oiselet déniché, examinait les convives à la dérobée.
Mme Dobouziez, la cousine Lydie, tr?nait en face de son mari. C'était une nabote nouée, jaune, ratatinée comme un pruneau, aux cheveux noirs et luisants, coiffée en bandeaux qui lui cachaient le front et rejoignaient d'épais et sombres sourcils ombrageant de gros yeux, noirs aussi,
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