La maison de la courtisane | Page 2

Oscar Wilde
printemps jusqu'�� la pluie et la neige de l'hiver, sans jamais avoir un souci. Ces eaux, sans nul doute, sont celle du Leth��, et cette plante est celle qui donne �� l'homme l'oubli de sa patrie.
Oui! parmi les prairies sem��es de lotus, tu te dresses comme Proserpine, la t��te couronn��e de pavots, et tu gardes les cendres sacr��es des morts. Car bien que tu aies cess�� d'enfanter des g��n��rations guerri��res, tes nobles morts sont avec toi,--eux du moins, sont fid��les �� ta gloire.--Garde-les avec sollicitude, ? cit�� sans enfants. Car c'est un charme puissant pour ��veiller chez les hommes les r��ves de choses sublimes, que ces tombes solitaires o�� reposent les grandeurs du pass��.
III
Voyez ce pilier vo?t��, qui se dresse dans la plaine. Il marque la place o�� le plus brave des chevaliers de France re?ut le coup mortel. C'��tait le prince de la chevalerie, le seigneur de la guerre. C'��tait Gaston de Foix. Quelque ��toile de malheur l'entra?na contre ta cit�� et il tomba, combattant bravement, comme tombe un lion de la for��t. Il f?t ravi �� la vie alors que la vie et l'amour ��taient nouveaux pour lui. Il repose sous le voile bleu sans couture de Dieu. De hauts roseaux pareils �� des lances oscillent tristement sur sa t��te, et des nerpruns prennent un rouge plus vif l�� o�� s'��pancha sur le sol le sang pourpre de sa brillante jeunesse.
Portez vos regards un peu plus loin au nord, vers ce tertre ravag��. L�� g?t maintenant captif dans une tombe digne d'un prince, et ��lev��e par la main de sa fille, dans la profondeur t��n��breuse, Th��odoric, le roi goth �� la puissante membrure. C'est l�� qu'il dort, las enfin de ses victoires. Le temps n'a point ��pargn�� la ruine. Le vent et la pluie ont abattu sa forteresse, et nous voyons une fois de plus que la mort est le souverain ma?tre de toutes choses, et que roi et paysan doivent devenir de la poussi��re.
Sans doute, elle fut grande leur gloire �� eux! mais �� mes yeux, le roi barbare, le h��ros de la chevalerie, la grande reine elle-m��me ��taient chose mis��rable et vaine, �� c?t�� du tombeau o�� Dante se repose de ses peines. Sa tombe dor��e s'ouvre en plein air, et un sculpteur aux mains habiles y a grav�� le front blanc et calme, aussi calme que l'aube naissante, ces yeux o�� s'allumaient les ��clairs de l'amour et du d��dain, ces l��vres qui chant��rent le ciel et l'enfer, cette figure ovale que dessina si bien Giotto, la figure lasse du Dante. Jusqu'�� ce jour, il est rest�� au lieu o�� il a trouv�� le repos, bien loin de l'Arno qui pr��cipite ses flots jaunes sous les larges ponts de cette belle cit��, o�� le haut campanile de Giotto semble se dresser comme un lis de marbre sous des cieux de saphir. H��las! mon Dante, tu as connu la douleur des existences plus vulgaires, la cha?ne odieuse de l'esclavage, et combien il est p��nible de monter les degr��s dans les demeures des rois, et toutes les mesquines mis��res qui d��figurent la noble physionomie d'un homme sous le ressentiment de l'injustice. Et pourtant ce morne univers est reconnaissant de ton chant; nos nations te rendent hommage; et elle aussi, cette reine cruelle de la Toscane v��tue de vignobles, elle qui de ton vivant a mis sur ton front une couronne d'��pines, elle a maintenant couvert de lauriers ta tombe vide et redemande vainement les cendres de son fils.
O le plus grand des exil��s, ta souffrance est finie, ton ame est maintenant aupr��s de ta B��atrice. Ravenne garde tes cendres. Dors en paix.
IV
Comme ce palais est solitaire! Comme ces murs sont gris! Nul m��nestrel n'��veille d��sormais l'��cho dans ces salles. La cha?ne bris��e, rong��e de rouille, pend �� la porte, et les mauvaises herbes ont fendu le pav�� de marbre. Par ici se cache le serpent, et par l�� les l��zards courent pr��s des lions de pierre qui clignotent au soleil. C'est l�� que Byron logea, qu'il abrita son amour et ses plaisirs pendant deux longues ann��es, comme un autre Antoine, pour qui l'univers fut un autre Actium. Pourtant il ne laissa point se faner son ame royale, ni se briser sa lyre, ni s'��mousser la pointe de sa lance, grace aux arts perfides d'une reine d'��gypte. Car de l'Orient se fit entendre un grand cri. La Gr��ce se dressa pr��te �� combattre pour la libert��, et elle le fit venir de Ravenne. Jamais chevalier ne partit plus g��n��reusement pour les m��l��es des batailles, nul ne tomba plus bravement sur le sol ensanglant��, d'o�� on le rapporta sur son bouclier comme on e?t fait d'un Spartiate. O Hellade, Hellade! En ton heure de fiert��, en ton jour de puissance, rappelle-toi celui qui mourut pour arracher de tes membres les
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