La Chèvre Jaune, by Paul De 
Musset 
 
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Title: La Chèvre Jaune 
Author: Paul De Musset 
Release Date: December 31, 2004 [EBook #14539] 
Language: French 
Character set encoding: ISO-8859-1 
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CHÈVRE JAUNE *** 
 
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SOUVENIRS DE SICILE. 
LA CHÈVRE JAUNE
PAR PAUL DE MUSSET. 
1848. 
 
TOME PREMIER. 
 
CHAPITRE I. 
On fait, en Sicile, une grande consommation de lait de chèvre. Tous les 
matins, quantité de troupeaux descendent des montagnes et parcourent 
les villes en distribuant le lait de maison en maison. Le dormeur, 
réveillé par le son joyeux des clochettes, ouvre sa fenêtre et s'amuse à 
regarder ces escadrons de nourrices qui apportent dans leurs mamelles 
le remède des poitrines malades et le déjeuner des enfants sevrés. Les 
chèvres possèdent la mémoire spéciale des localités. Le troupeau 
s'arrête avec un instinct merveilleux devant chaque porte où il y a un 
chaland, et la nourrice chargée d'alimenter la maison se détache aussitôt 
de la bande pour venir se faire traire avec un air soumis et grave, 
comme si elle comprenait l'importance de ses fonctions. Les chevriers, 
n'ayant pas de coups à donner ni de cris à pousser comme les 
conducteurs de boeufs, sont des gens d'humeur douce qui gagnent leur 
vie sans beaucoup de fatigue, finissent leur journée de bonne heure, et 
vivent plutôt en associés qu'en maîtres avec leurs compagnes cornues. 
En 1842, il y avait, dans la pauvre ville de Syracuse, un petit chevrier 
âgé de seize ans, qu'on appelait Cicio, par diminutif de Francesco. Il 
conduisait six mères chèvres, et comme chacune lui fournissait trois 
verres de lait à un grano, il gagnait dix-huit grani par jour, c'est-à-dire 
à peu près quinze sous de France. C'eût été un fort gros revenu si ses 
pratiques l'eussent payé exactement; mais il fallait faire crédit, sous 
peine de ne rien vendre, et le numéraire étant rare en Sicile, un bon tiers 
des consommateurs remettaient le paiement de semaine en semaine. 
Ajoutez à ces banqueroutes l'obligation où était Cicio de nourrir sa 
vieille mère, et vous comprendrez pourquoi il n'était pas vêtu comme 
un prince et ne mangeait point d'ortolans. Habitué au régime sobre de la
montagne, le petit chevrier mordait avec appétit dans un morceau de 
pain assaisonné d'un oignon. Son costume se composait d'un pantalon 
de toile si court des jambes, qu'on pouvait à la rigueur l'appeler culotte, 
et d'une veste qu'il portait pliée sur l'épaule en manière de manteau à 
l'espagnole. Ses chaussures étaient deux semelles en peau de buffle 
attachées par des ficelles, et son unique coiffure la forêt de cheveux 
hoirs que la nature lui avait donnée. Avec si peu de recherche dans sa 
mise, Cicio plaisait cependant à cause de sa bonne mine, car il 
descendait d'une race moitié grecque et moitié normande, renommée 
pour sa beauté. Quand il s'arrêtait sur le seuil d'une porte à causer avec 
quelque femme de chambre, il s'appuyait du coude sur la muraille, en 
croisant ses jambes comme le Joueur de flûte antique, et ses attitudes 
offraient cette grâce naturelle dont les arts cherchent sans cesse 
l'imitation. Sans aucune éducation, Cicio savait un peu par ouï-dire 
l'histoire de son pays, et logeait pêle-mêle, dans les magasins déserts de 
sa mémoire, les noms du siècle de Hiéron, les récits des marins de 
Catane, ceux des paysans du mont Rosso, et les instructions paternelles 
de son curé. Il était heureux, sans désirs et sans soucis. Le choléra de 
1837 lui avait enlevé son père, et depuis ce jour il avait accepté, 
quoique enfant, les charges et le travail d'un homme. Avant l'aurore, il 
appelait ses chèvres et descendait du hameau de Floridia, pour aller 
vendre son lait à Syracuse. Les fillettes alertes qu'il rencontrait 
l'agaçaient souvent au passage. 
--Qu'est-ce que tu me rapporteras de la ville? lui criait-on. 
--Je te rapporterai des nouvelles de l'amphithéâtre, et je te dirai si les 
soldats de Naples gardent toujours la porte. 
--Don Cicio, disait une autre plus hardie, quand donc commenceras-tu à 
faire ton lit de noces? 
--Quand j'aurai usé autant de nattes de jonc que tu as de dents de 
sagesse. 
Et il poursuivait son chemin sans regarder à droite ni à gauche. 
Cicio avait une amie. C'était une petite chèvre jaune qui se prélassait en
marchant comme si elle eût porté des souliers de satin. Elle s'appelait 
Gheta, c'est-à-dire Marguerite. Gheta aimait passionnément son jeune 
maître; tantôt    
    
		
	
	
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