Histoire de la Révolution française, IV | Page 2

Adolphe Thiers
des
demagogues, avec le secours des Hollandais et de son armee. Mais
cette addition etait une folie, ici comme au moment ou il etait sur le

Moerdik: ce qu'il y avait de sage, de possible et de vrai dans son plan,
c'etait de recouvrer son influence, de retablir nos armes, et d'etre rendu
a ses projets militaires par une bataille gagnee. L'ardeur renaissante de
son armee, sa position militaire, tout lui donnait une esperance fondee
de succes; d'ailleurs il fallait beaucoup hasarder dans sa situation, et il
ne devait pas hesiter.
Notre armee s'etendait sur un front de deux lieues, et bordait la petite
Gette, de Neer-Heylissem a Leaw. Dumouriez resolut d'operer un
mouvement de conversion, qui ramenerait l'ennemi entre Leaw et
Saint-Tron. Sa gauche etant appuyee a Leaw comme sur un pivot, sa
droite devait tourner par Neer-Heylissem, Racour et Landen, et obliger
les Autrichiens a reculer devant elle jusqu'a Saint-Tron. Pour cela il
fallait traverser la petite Gette, franchir ses rives escarpees, prendre
Leaw, Orsmael, Neerwinden, Overwinden et Racour. Ces trois derniers
villages, faisant face a notre droite, qui devait les parcourir dans son
mouvement de conversion, formaient le principal point d'attaque.
Dumouriez, divisant sa droite en trois colonnes aux ordres de Valence,
leur enjoignit de passer la Gette au pont de Neer-Heylissem: l'une
devait deborder l'ennemi, l'autre prendre vivement la tombe elevee de
Middelwinden, foudroyer de cette hauteur le village d'Overwinden et
s'en emparer, la troisieme attaquer le village de Neerwinden par sa
droite. Le centre, confie au duc de Chartres, et compose de deux
colonnes, avait ordre de passer au pont d'Esemael, de traverser Laer, et
d'attaquer de front Neerwinden, deja menace sur son premier flanc par
la troisieme colonne. Enfin, la gauche, aux ordres de Miranda, devait se
diviser en deux et trois colonnes, occuper Leaw et Orsmael, et s'y
maintenir, tandis que le centre et la droite, marchant en avant apres la
victoire, opereraient le mouvement de conversion, qui etait le but de la
bataille.
Ces dispositions furent arretees le 17 mars au soir. Le lendemain 18,
des neuf heures du matin, toute l'armee s'ebranla avec ordre et ardeur.
La Gette fut traversee sur tous les points. Miranda fit occuper Leaw par
Champmorin, il s'empara lui-meme d'Orsmael, et engagea une
canonnade avec l'ennemi, qui s'etait retire sur les hauteurs de Halle, et
s'y etait fortement retranche. Le but se trouvait atteint sur ce point. Au
centre et a droite, le mouvement s'opera a la meme heure, les deux
parties de l'armee traverserent Elissem, Esemael, Neer-Heylissem, et,

malgre un feu meurtrier, franchirent avec beaucoup de courage les
hauteurs escarpees qui bordaient la Gette. La colonne de l'extreme
droite traversa Racour, deborda dans la plaine, et au lieu de s'y etendre,
comme elle en avait l'ordre, commit la faute de se replier sur
Overwinden pour chercher l'ennemi. La seconde colonne de la droite,
apres avoir ete retardee dans sa marche, se lanca avec une impetuosite
heroique sur la tombe elevee de Middelwinden, et en chassa les
imperiaux; mais au lieu de s'y etablir fortement, elle ne fit que la
traverser, et s'empara d'Overwinden. La troisieme colonne entra dans
Neerwinden, et commit une autre faute par l'effet d'un malentendu,
celle de s'etendre trop tot hors du village, et de s'exposer par la a en etre
expulsee par un retour des Imperiaux. L'armee francaise touchait
cependant a son but; mais le prince de Cobourg ayant d'abord commis
la faute de ne pas attaquer nos troupes a l'instant ou elles traversaient la
Gette, et gravissaient ses bords escarpes, la reparait en donnant un ordre
general de reprendre les positions abandonnees. Des forces superieures
etaient portees sur notre gauche contre Miranda. Clerfayt, profitant de
ce que la premiere colonne n'avait pas persiste a le deborder, de ce que
la seconde ne s'etait pas etablie sur la tombe de Middelwinden, de ce
que la troisieme et les deux composant le centre s'etaient accumulees
confusement dans Neerwinden, traversait la plaine de Landen, reprenait
Racour, la tombe de Middelwinden, Overwinden et Neerwinden. Dans
ce moment, les Francais etaient dans une position desastreuse. Chasses
de tous les points qu'ils avaient occupes, rejetes sur le penchant des
hauteurs, debordes par leur droite, foudroyes sur leur front par une
artillerie superieure, menaces par deux corps de cavalerie, et ayant une
riviere a dos, ils pouvaient etre detruits, et l'auraient ete certainement si
l'ennemi, au lieu de porter la plus grande partie de ses forces sur leur
gauche, eut pousse plus vivement leur centre et leur droite. Dumouriez,
accourant alors sur ce point menace, rallie ses colonnes, fait reprendre
la tombe de Middelwinden, et marche lui-meme sur Neerwinden, deja
pris deux fois par les Francais, et repris deux fois aussi par les
Imperiaux. Dumouriez y rentre pour la troisieme fois, apres un horrible
carnage. Ce malheureux village etait encombre
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