de la chrétienté; il enrichit l'Université de nouveaux 
priviléges; il ordonna que sa cour ou son parlement se réunît désormais 
en lieu fixe à Paris; il y fit entrer, à côté des barons, des conseillers, 
tirés la plupart de la bourgeoisie, lui donna la direction supérieure de la 
police de la ville, et dota ainsi cette capitale de l'institution la plus 
importante, la plus féconde de l'État, qui fut pour elle une source de 
richesses et de puissance. Il accorda la liberté à tous les serfs de Paris 
qui étaient de son domaine, et cet exemple fut suivi par l'abbé de 
Saint-Germain-des-Prés, le plus riche des seigneurs ecclésiastiques, qui, 
en exemptant de la servitude les serfs de son bourg, se réserva 
seulement les droits utiles, c'est-à-dire ceux de justice et de seigneurie, 
les 
 rentes et les redevances, les droits perçus au four banal, au 
pressoir, aux vendanges. 
La prévôté de Paris, pendant la régence de Blanche de Castille, était 
devenue vénale et avait été acquise par des enchérisseurs cupides et 
ignorants; aussi, «le menu peuple, dit un contemporain, désolé par les 
tyrannies et les rapines, s'en alloit en d'autres seigneuries; la terre du roi 
étoit si déserte que, lorsqu'il tenoit ses plaids, il n'y venoit personne; en 
outre, la ville et ses environs étoient pleins de malfaiteurs.» Louis fit 
des ordonnances contre les vagabonds, les truands, les joueurs, les 
habitués des tavernes, «les folles femmes qui font mestier de leur 
corps,» et auxquelles il assigna des séjours[14] et des costumes
particuliers; il assura les subsistances de la ville en soumettant les 
boulangers à une surveillance rigoureuse et en donnant la grande 
maîtrise de ce métier à son panetier; enfin, il confia la prévôté de Paris 
à Étienne Boileau, bourgeois illustre par son savoir et sa probité, qui fut 
le principal conseiller du saint roi dans toutes ses oeuvres législatives; 
et, pour rehausser cet office, il alla lui-même quelquefois au Châtelet 
siéger à côté de son prévôt. Alors la prévôté devint la magistrature 
d'épée la plus utile et la plus redoutable, surtout lorsqu'on lui eut adjoint 
plus tard huit conseillers, chargés d'assister le prévôt, des enquesteurs 
qui devaient instruire les affaires et faire la police dans les quartiers; 
enfin, deux compagnies de sergents, l'une à pied, l'autre à cheval 
chargées de l'exécution des arrêts[15]. 
[Note 14: Les rues assignées aux prostituées étaient les rues aujourd'hui 
détruites de Mâcon, Froidmantel, Tiron, Robert, Baillehoi, Glatigny, du 
Grand-Heurleux, du Petit-Heurleux, etc.] 
[Note 15: De Lamare, Traité de la police, t. Ier, p. 210 et suiv.] 
Saint Louis avait en grande estime les bourgeois de Paris: il les appela 
à son conseil, il leur fit signer ses ordonnances, il  recueillit en 
un corps de lois les us et coutumes de métiers et leur donna des 
règlements qui ont été pratiqués jusqu'à l'époque de Colbert; il 
régularisa leurs corporations et confréries, dont l'origine remontait au 
temps des Romains, et transforma définitivement la marchandise ou 
hanse parisienne en une municipalité dont le chef prit le titre de prévôt 
des marchands[16]. 
[Note 16: Voyez l'Histoire des quartiers de Paris, liv. II, ch. I.] 
A tous ces bienfaits il ajouta le droit pour les habitants de Paris de se 
garder eux-mêmes. Jusque-là, la police de la ville avait été faite par 
soixante sergents, dont vingt à cheval, que commandait un chevalier: 
on appelait cette garde le guet du roi, et elle était occupée uniquement à 
faire des rondes. On lui adjoignit le guet des mestiers, ou guet 
bourgeois, origine de la garde nationale, qu'on appelait encore guet 
assis, parce qu'il était sédentaire dans les postes ou corps de garde, où il 
se tenait seulement pendant la nuit. Il y avait ordinairement cinq de ces
postes dans l'intérieur, outre ceux des portes: ces postes étaient au 
Palais, au Châtelet, sur la place de Grève, au cimetière des Innocents, 
près de l'église de Sainte-Madeleine (dans la Cité). Chacun d'eux était 
de six hommes: ce qui fait supposer que la force de la milice 
bourgeoise n'était, dans l'origine, que de deux mille hommes, les 
exemptions étant très-nombreuses. Cette milice était divisée en dizaines, 
quarantaines et cinquantaines d'hommes qui avaient pour chef des 
officiers appelés dizainiers, quaranteniers et cinquanteniers; elle était 
sous les ordres du prévôt des marchands; mais le chevalier du guet, qui 
avait le commandement de tous les postes bourgeois, relevait du prévôt 
de Paris. 
 
§ VII.  
Paris sous les successeurs de Louis IX jusqu'à Philippe VI.--Richesse et 
population de la ville à cette époque. 
Sous les successeurs de Louis IX, le progrès continue et se manifeste 
principalement par des fondations de colléges: on en compte quatre 
sous Philippe III, six sous Philippe IV, cinq sous les fils de Philippe IV, 
quatorze sous Philippe VI. En outre, l'on voit fonder l'abbaye des 
Cordelières-Saint-Marcel, devenue l'hôpital de Lourcine, l'hôpital 
Saint-Jacques,