En famille

Hector Malot
En famille, by Hector Malot

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Title: En famille
Author: Hector Malot
Release Date: October 19, 2004 [EBook #13793]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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FAMILLE ***

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Hector Malot
EN FAMILLE (1893)

Table des matières
TOME PREMIER I II III IV V VI VII VIII IX X XI XII XIII XIV XV
XVI XVII XVIII XIX XX XXI TOME SECOND XXII XXIII XXIV
XXV XXVI XXVII XXVIII XXIX XXX XXXI XXXII XXXIII
XXXIV XXV XXXVI XXXVII XXXVIII XXXIX XL

TOME PREMIER
I
Comme cela arrive souvent le samedi vers trois heures, les abords de la
porte de Bercy étaient encombrés, et sur le quai, en quatre files, les
voitures s’entassaient à la queue leu leu: haquets chargés de fûts,
tombereaux de charbon ou de matériaux, charrettes de foin ou de paille,
qui tous, sous un clair et chaud soleil de juin, attendaient la visite de
l’octroi, pressés d’entrer dans Paris à la veille du dimanche.
Parmi ces voitures, et assez loin de la barrière, on en voyait une
d’aspect bizarre avec quelque chose de misérablement comique, sorte
de roulotte de forains mais plus simple encore, formée d’un léger
châssis tendu d’une grosse toile; avec un toit en carton bitumé, le tout
porté sur quatre roues basses.
Autrefois la toile avait dû être bleue, mais elle était si déteinte, salie,
usée, qu’on ne pouvait s’en tenir qu’à des probabilités à cet égard, de
même qu’il fallait se contenter d’à peu près si l’on voulait déchiffrer les
inscriptions effacées qui couvraient ses quatre faces: l’une, en
caractères grecs, ne laissait plus deviner qu’un commencement de mot:
[image caractères grecs]; celle au-dessous semblait être de l’allemand:
graphie; une autre de l’italien: FIA; enfin la plus fraîche et française,
celle-là: PHOTOGRAPHIE, était évidemment la traduction de toutes
les autres, indiquant ainsi, comme une feuille de route, les divers pays
par lesquels la pauvre guimbarde avait roulé avant d’entrer en France et
d’arriver enfin aux portes de Paris.
Était-il possible que l’âne qui y était attelé l’eût amenée de si loin

jusque-là?
Au premier coup d’oeil on pouvait en douter, tant il était maigre, épuisé,
vidé; mais, à le regarder de plus près, on voyait que cet épuisement
n’était que le résultat des fatigues longuement endurées dans la misère.
En réalité, c’était un animal robuste, d’assez grande taille, plus haute
que celle de notre âne d’Europe, élancé, au poil gris cendré avec le
ventre clair malgré les poussières des routes qui le salissaient; des
lignes noires transversales marquaient ses jambes fines aux pieds rayés,
et, si fatigué qu’il fut, il n’en tenait pas moins sa tête haute d’un air
volontaire, résolu et coquin. Son harnais se montrait digne de la voiture,
rafistolé avec des ficelles de diverses couleurs, les unes grosses, les
autres petites, au hasard des trouvailles, mais qui disparaissaient sous
les branches fleuries et les roseaux, coupés le long du chemin, dont on
l’avait couvert pour le défendre du soleil et des mouches.
Près de lui, assise sur la bordure du trottoir, se tenait une petite fille de
onze à douze ans qui le surveillait.
Son type était singulier: d’une certaine incohérence, mais sans rien de
brutal dans un très apparent mélange de race. Au contraire de
l’inattendu de la chevelure pâle et de la carnation ambrée, le visage
prenait une douceur fine qu’accentuait l’oeil noir, long, futé et grave.
La bouche aussi était sérieuse. Dans l’affaissement du repos le corps
s’était abandonné; il avait les mêmes grâces que la tête, à la fois
délicates et nerveuses; les épaules étaient souples d’une ligne menue et
fuyante dans une pauvre veste carrée de couleur indéfinissable, noire
autrefois probablement; les jambes volontaires et fermes dans une
pauvre jupe large on loques; mais la misère de l’existence n’enlevait
cependant rien à la fierté de l’attitude de celle qui la portait.
Comme l’âne se trouvait placé derrière une haute et large voilure de
foin, la surveillance en eût été facile si de temps en temps il ne s’était
pas amusé à happer une goulée d’herbe, qu’il tirait discrètement avec
précaution, en animal intelligent qui sait très bien qu’il est en faute.
«Palikare, veux-tu finir!»

Aussitôt il baissait la tête comme un coupable repentant, mais dès qu’il
avait mangé son foin en clignant de l’oeil et en agitant ses oreilles, il
recommençait avec un empressement qui disait sa faim.
À un certain moment, comme elle venait de le
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