Discours Civiques de Danton | Page 3

Georges Jacques Danton
la Convention, du 31 juillet 1793.] et il parle cinq minutes. Mirabeau e?t parl�� cinq heures. Il n'a point non plus, comme Robespierre, ce don de l'axiome g��om��trique, cette logique froide qui tombe comme le couperet, ��tablit, ordonne, institue, promulgue et ne discute pas. Quand cela coule des minces l��vres de l'avocat d'Arras, droit et rigide �� la tribune, on ne songe pas que durant des nuits il s'est pench�� sur son papier, livrant bataille au mot rebelle, acharn�� sur la m��taphore, raturant, recommen?ant, en proie a toutes les affres du style. Or, Danton n'��crit rien [Note: P. AULARD, oevr. cit., tome I, p. 172.]. Paresse, a-t-on dit? Peut-��tre. Il reconna?t: "Je n'ai point de correspondance." [Note: S��ance de la Convention, du 21 ao?t 1793.]. C'est l'aveu implicite de ses improvisations r��p��t��es. Qui n'��crit point de lettres ne r��dige point de discours. C'est chose laiss��e �� l'Incorruptible et �� l'Ami du Peuple. Ce n'est point davantage �� Marat qu'on peut le comparer. L'��loquence de celui-ci a quelque chose de forcen�� et de lamentatoire, une ardeur d'apostolat r��volutionnaire et de charit��, de vengeur et d'implorant �� la fois. Ce sont bien des plaintes o�� pass��, suivant la saisissante expression de M. Vellay, l'ombre d��sesp��r��e de Cassandre. [Note: La Correspondance de Marat, recueillie et publi��e par Charles Vellay, intr. xxii; Paris, Fasquelle, 1896.] Chez Danton, rien de tout cela. Et �� qui le comparer sinon qu'�� lui?
Dans son style on entend marcher les ��v��nements. Ils enflent son ��loquence, la font hagarde, furieuse, furibonde; chez lui la parole bat le rappel et bondit arm��e. Aussi, point de longs discours. Toute col��re tombe, tout enthousiasme faiblit. Les grandes harangues ne sont point faites de ces passions extr��mes. Si pourtant on les retrouve dans chacun des discours de Danton, c'est que de jour en jour elles se chargent de ranimer une vigueur peut-��tre fl��chissante, quand, �� Arcis-sur-Aube, il oublie l'orage qui secoue son pays pour le foyer qui l'attend, le sourire de son fils, la pr��sence de sa m��re, l'amour de sa femme, la beaut�� molle et onduleuse des vifs paysages champenois qui portent alors �� l'idylle et �� l'��glogue ce grand coeur aimant. Mais que Danton reprenne pied a Paris, qu'il se sente aux semelles ce pav�� br?lant du 14 juillet et du 10 ao?t, que l'amour du peuple et de la patrie prenne le pas sur l'amour et le souvenir du pays natal, c'est alors Ant��e. Il tonne �� la tribune, il tonne aux Jacobins, il tonne aux arm��es, il tonne dans la rue. Et ce sont les lambeaux heurt��s et d��chir��s de ce tonnerre qu'il l��gue �� la post��rit��.
Ses discours sont des exemples, des le?ons d'honn��tet��, de foi, de civisme et surtout de courage. Quand il se sent parler d'abondance, sur des sujets qui lui sont ��trangers, il a comme une excuse �� faire. "Je suis savant dans le bonheur de mon pays", dit-il. [Note: S��ance de la Convention, du 31 juillet 1793.] Cela, c'est pour lui la supr��me excuse et le supr��me devoir. Son pays, le peuple, deux choses qui priment tout. Entre ces deux p?les son ��loquence bondit, sur chacun d'eux sa parole pose le pied et ouvre les ailes. Et quelle parole! Au moment o�� Paris et la France vivent dans une atmosph��re qui sent la poudre, la poussi��re des camps, il ne faut point ��tre surpris de trouver dans les discours de Danton comme un refrain de Marseillaise en prose. Sa m��taphore, au bruit du canon et du tocsin, devient guerri��re et marque le pas avec les sections en marche, avec les volontaires lev��s �� l'appel de la patrie en danger. Elle devient audacieuse, extr��me, comme le jour o��, dans l'enthousiasme de la Convention, d'abord abattue par la trahison de Dumouriez, il d��clare �� ses accusateurs: "Je me suis retranch�� dans la citadelle de la raison; j'en sortirai avec le canon de la v��rit�� et je pulv��riserai les sc��l��rats qui ont voulu m'accuser." [Note: S��ance de la Convention, du 1er avril 1793.] Cela, Robespierre ne l'e?t point ��crit et dit. C'est chez Danton un m��pris de la froide et ��l��gante sobri��t��, mais faut-il conclure de l�� que c'��tait simplement de l'ignorance? Cette absence des formes classiques du discours et de la recherche du langage, c'est �� la fi��vre des ��v��nements, �� la violence de la lutte qu'il faut l'attribuer, d��clare un de ses plus courageux biographes. [Note: Dr ROBINET. Danton, m��m. sur sa vie priv��e, p. 67; Paris, 1884.] On peut le croire. Mais pour quiconque consid��re Danton �� l'action, cette excuse est inutile. Son oeuvre politique explique son ��loquence. Si elle roule ces scories, ces ��clats de rudes rocs, c'est qu'il m��prise les rh��teurs, c'est, encore une fois, et il faut bien le r��p��ter, parce qu'il a la religion de l'action; et ce culte seul domine chez
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