je ne le quittais pas d'une manière absolue, mais que je prenais seulement des 
arrangements pour passer, ainsi que Maurice et Lina, une partie de l'année à Paris. Le 
succès de Villemer me permet de recouvrer un peu de liberté dont j'étais privée tout à fait 
à Nohant dans ces dernières années, grâce aux bons Berrichons, qui, depuis les gardes 
champêtres de tout le pays jusqu'aux amis de mes amis, et Dieu sait s'ils en ont! voulaient 
être _placés_ par mon _grand crédit_. Je passais ma vie en correspondances inutiles et en 
complaisances oiseuses. Avec cela les visiteurs qui n'ont jamais voulu comprendre que le 
soir était mon moment de liberté et le jour mon heure de travail! j'en étais arrivée à 
n'avoir plus que la nuit pour travailler et je n'en pouvais plus. Et puis trop de dépense à 
Nohant, à moins de continuer ce travail écrasant. Je change ce genre de vie; je m'en 
réjouis, et je trouve drôle qu'on me plaigne. Mes enfants s'en trouveront bien aussi, 
puisqu'ils étaient claquemurés aussi par les visites de Paris et que nous nous arrangerons 
pour être tout près les uns des autres à Paris, et pour revenir ensemble à Nohant quand il 
nous plaira d'y passer quelque temps. On a fait sur tout cela je ne sais quels cancans, et on 
me fait rire quand on me dit: «Vous allez donc nous quitter? Comment ferez-vous pour 
vivre sans nous?» 
Ces bons Berrichons! Il y a assez longtemps qu'ils vivent de moi. Duvernet sait bien tout 
cela, et je m'étonne qu'il s'étonne. 
 
DLIV 
A M. HIPPOLYTE MAGEN, A MADRID 
Nohant, 24 avril 1864. 
Une absence de quelques jours m'a empêchée, monsieur, de répondre à votre excellente 
lettre et de vous dire toute ma gratitude pour les détails que vous me donnez. 
Vous adoucissez autant que possible la douleur de l'événement[1], en me disant que notre 
ami n'a pas eu à lutter contre la crise finale, et que les derniers temps de sa vie ont été
heureux. La compensation a été bien courte, après une vie de luttes et de souffrances. 
Mais je suis de ceux qui croient que la mort est la récompense d'une bonne vie, et la vie 
de ce pauvre ami a été méritante et généreuse. Les regrets sont pour nous, et votre coeur 
les apprécie noblement. 
J'ai envoyé votre lettre à madame Y..., soeur de Fulbert, et je lui ai fait le sacrifice, du 
portrait photographié. S'il vous était possible de m'en envoyer un autre exemplaire, je 
vous en serais doublement obligée. Madame Y... compte vous écrire pour vous remercier 
aussi de l'affection délicate que vous portiez à son frère et pour vous confier, je pense, la 
mission que vous offrez si généreusement de remplir. 
_Quant aux détails de l'enterrement, j'ignore ce qu'elle en pense_. Je la connais fort peu; 
mais je vous remercie, moi, pour mon compte, de la suprême convenance de votre 
intervention. 
Vous avez fait respecter le voeu qu'il eût exprimé, lui, s'il eût pu vous adresser ses 
dernières paroles. 
Merci, encore, monsieur, et bien à vous. 
G. SAND. 
[1] La mort de Fulbert Martin, ancien avoué à la Châtre, exilé après le coup d'État de 
1851. 
 
DLV 
A M. BERTON PÈRE, A PARIS 
Nohant, 5 mai 1864. 
Mon cher et charmant enfant, 
Voulez-vous vous charger de négocier avec M. Harmant[1] la reprise de Villemer pour le 
15 septembre prochain? M. de la Rounat m'écrit que vous consentez à nous assurer cette 
reprise, car, sans vous, que serait-elle? Il n'y aurait pas à y attacher la moindre importance. 
Si donc vous ne nous abandonnez pas, et je vous en remercie bien sérieusement, il faut 
que nous obtenions de M. Harmant qu'il vous laisse avec nous le plus longtemps possible, 
à la charge exclusive de l'Odéon, bien entendu, jusqu'au moment où il aura effectivement 
besoin de vous. Il m'a dit n'avoir besoin de vous en effet que pour jouer la pièce que je 
compte lui faire et où vous avez bien voulu accepter le premier rôle. Que cette pièce soit 
_Christian Waldo_[2], ou une autre, je me mettrai à ce travail le mois prochain, et je ferai 
de mon mieux pour arriver en temps utile, c'est-à-dire en janvier, ce qui est bien dans 
mon intérêt. Jusque-là, quand même vous joueriez encore _Villemer_, rien ne vous 
empêcherait de me répéter à la Gaieté. Si vous n'êtes pas effrayé de voir devant vous tant 
de prose de George Sand, ayez l'obligeance de communiquer ma lettre à M. Harmant en 
lui offrant tous mes compliments, et de lui demander s'il accepte cet arrangement si 
simple. Comme, avant tout, il faut que vous l'acceptiez, c'est à vous que je m'adresse pour 
que nous nous entendions sur toute la ligne et sans perdre de temps. Je ne veux faire une    
    
		
	
	
	Continue reading on your phone by scaning this QR Code
 
	 	
	
	
	    Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the 
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.
	    
	    
