ne le connaît pas encore et qui désire 
bien le voir, comme vous pensez. Je veux lui faire une surprise. Je ne lui parlerai de rien 
dans mes lettres et je lui enverrai Maurice sans dire qui il est. Nous, nous serons derrière 
la porte pour jouir de son erreur. Mais j'ai tort de vous dire cela, car je veux vous en faire 
autant. Ainsi n'attendez pas que je vous prévienne de mon arrivée. 
Adieu, ma chère maman; donnez-moi encore de vos nouvelles. Je vous embrasse de tout 
mon coeur, Casimir en fait autant; pour Maurice, quand on veut l'embrasser, il tourne la 
tête et présente son derrière; j'espère que vous le corrigerez de cette mauvaise habitude. 
[1] C'était le 17 mars 1824. [2] Oscar Cazamajou, neveu de George Sand. [3] Madame 
Cazamajou, soeur aînée de George Sand. 
 
V 
A LA MÊME 
Nohant, 29 juin 1825. 
Vous devez me trouver bien paresseuse, ma chère petite maman, et je le suis en effet. Je 
mène une vie si active, que je ne me sens le courage de rien, le soir en rentrant, et que je 
m'endors aussitôt que je reste un instant en place. 
Ce sont là de bien mauvaises raisons, j'en conviens; mais, du moment que nous sommes 
tous bien portants, quelles nouvelles à vous donner de notre tranquille pays, où nous 
vivons en gens plus tranquilles encore; voyant pen de personnes et nous occupant de 
soins champêtres, dont la description ne vous amuserait guère? J'ai reçu des nouvelles de 
Clotilde[1], qui m'a dit que vous vous portiez bien; c'est ce qui me rassurait sur votre 
compte et contribuait à mon silence puisque j'étais sans inquiétude. 
Si vous eussiez effectué le projet de venir à Nohant, nous aurions dans ce moment le 
chagrin de vous quitter. Je pars dans huit jours pour les Pyrénées. J'ai eu le bonheur 
d'avoir ici pendant quelques jours, deux aimables soeurs, mes amies intimes de couvent, 
qui se rendent aux mêmes eaux, avec leur père, et un vieil ami fort gai et fort aimable. En 
quittant Chateauroux, elles n'ont pu se dispenser de venir passer quelques jours à Nohant, 
qui était devenu pour moi un lieu de délices par la présence de ces bonnes amies. Je les ai 
reconduites un bout de chemin et ne les ai quittées qu'avec la promesse de les rejoindre 
bientôt. 
Nous allons donc entreprendre un petit voyage de cent quarante lieues d'une traite. C'est 
peu pour vous qui faites le voyage d'Espagne comme celui de Vincennes; mais c'est 
beaucoup pour Maurice, qui aura demain deux ans. J'espère néanmoins qu'il ne s'en 
apercevra pas, à en juger par celui de Nohant, qu'il trouve trop court à son gré. D'ailleurs, 
nous ne voyagerons que le jour et en poste. Nous sommes donc dans l'horreur des paquets. 
Nous emmenons Fanchou[2], et Vincent[3], qui est fou de joie de voyager sur le siège de 
la voiture. Pour moi, je suis enchantée de revoir les Pyrénées, dont je ne me souviens
guère, mais dont on me fait de si belles descriptions. Ne manquez pas de nous donner de 
vos nouvelles: car il semble qu'on soit plus inquiet quand on est plus éloigné. 
Adieu, ma chère maman, je vous embrasse tendrement et vous désire une bonne santé et 
du plaisir surtout; car, chez vous comme chez moi, l'un ne va guère sans l'autre. Maurice 
est grand comme père et mère et beau, comme un Amour. Casimir vous embrasse de tout 
son coeur. Pour moi, je me porte très bien, sauf un reste de toux et de crachement de sang 
qui passeront, j'espère, avec les eaux. 
Nous resterons deux mois au plus aux eaux; de là, nous irons à Nérac chez le papa[4], où 
nous demeurerons tout l'hiver. Au mois de mars ou d'avril, nous serons à Nohant, où nous 
vous attendrons avec ma tante et Clotilde. 
[1] Clotilde Daché, née Maréchal, cousine de George Sand. [2] Femme de chambre. [3] 
Cocher [4] Le baron Dudevant, beau-pére de George Sand. 
 
VI 
A LA MÊME 
Bagnères, 28 août 1825. 
Ma chère petite maman, 
J'ai reçu votre aimable lettre à Cauterets, et je n'ai pu y répondre tout de suite pour mille 
raisons. La première, c'est que Maurice venait d'être sérieusement malade, ce qui m'avait 
donné beaucoup d'inquiétude et d'embarras. 
Il est parfaitement guéri depuis quelques jours que nous sommes ici et que nous avons 
retrouvé le soleil et la chaleur. Il a repris tout à fait appétit, sommeil, gaieté et 
embonpoint. Aussitôt qu'il a été hors de danger, j'ai profité de sa convalescence pour 
courir les montagnes de Cauterets et de Saint-Sauveur, que je n'avais pas eu le temps de 
voir. Je n'ai donc pas eu une journée à moi pour écrire à qui que ce soit; tout le monde 
m'en veut et je m'en veux à    
    
		
	
	
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