Delaveau [3], qu'il conna?t bien, est mon professeur. C'est lui qui ordonne et consulte, c'est moi qui prépare les drogues, qui pose les sangsues, etc. Nous avons déjà opéré des cures fort heureuses. Smith [4], avec son jalap, me serait ici d'un grand secours.
Maurice n'a point oublié Guillery. Il y revient sans cesse, il sait les noms de tout le monde et parle surtout du gros Totor. Il a trouvé ici de quoi se consoler de l'absence de sa poule _favorite_, qu'il se rappelle aussi _à ce qu'il prétend_.
[1] La mort du baron Dudevant, beau-père de George Sand. [2] Pharmacien à Barbaste (Lot-et-Garonne). [3] Charles Delaveau, médecin à la Chatre, puis député, de 1846 à 1876. [4] Domestiques de la baronne Dudevant.
IX
A MADAME MAURICE DUPIN, A PARIS
Nohant, 13 juillet 1826.
Ma chère maman,
J'ai re?u votre aimable lettre il y a quelque temps, et j'ai vu depuis M. Duvernet, qui m'a dit vous avoir trouvée bien portante, et avoir passé la journée avec vous et l'ami Pierret[1]. Il m'a beaucoup parlé de vous. Vous savez que c'est une de vos conquêtes les plus dévouées. Il m'a dit que vous viendriez sans la crainte de nous voir partir au premier moment et d'avoir fait un voyage inutile. Ce serait une crainte bien mal fondée; car, outre que le plaisir d'être près de vous nous ?terait l'envie de courir, nous n'avons pas le moindre projet de voyage d'ici à bien longtemps.
Quand je dis _nous_, je parle de moi et de mon enfant; car mon mari n'a pas fait voeu de réclusion. Il est à Bordeaux dans ce moment pour une affaire indispensable: le payement d'une maison qu'il a vendue l'hiver dernier et dont l'échéance était le 10 de ce mois. Je pense qu'il reviendra par Nérac et qu'il passera quelques jours auprès de madame Dudevant. Je ne sais au juste quand il sera de retour. Il voulait assister à sa moisson. I1 faudra qu'il se dépêche; car les blés sont m?rs, et je vais les faire mettre à terre.
Quand il se sera reposé un peu de son voyage, il sera forcé de faire celui de Paris pour le placement de ses fonds. Alors il plaidera notre cause de vive voix auprès de vous, et peut-être vous décidera-t-il à revenir avec lui!
Vous avez d? voir Hippolyte[2] souvent. Il vous aura dit qu'il m'a laissé sa petite, dont je prends soin et qui se porte très bien. Nous avons eu des jours très brillants: d'abord la fête de Maurice, à l'occasion de laquelle j'ai régalé une centaine de paysans. Les danses, les coups de fusil, le carillon des cloches, le son de la cornemuse et les chansons des buveurs, auxquels se mêlaient les hurlements des chiens contrariés, out célébré avec bruit l'anniversaire de notre jeune homme, qui était charmé de ce tapage et de ces honneurs.
Nous avons eu ensuite mademoiselle George à la Chatre. Elle y a donné deux représentations qui ont fait courir tout le pays a mis la ville et les environs sens dessus dessous. Je vous conterais bien d'autres fêtes antérieures; mais Hippolyte vous aura conté notre chasse au sanglier; il vous aura dit que Nohant devenait chaque jour plus brillant. Nous serions bien heureux si cela pouvait vous donner l'envie d'y venir.
Adieu, ma chère maman; je vous embrasse tendrement et vous prie de me donner de vos nouvelles. Pardonnez-moi le long temps que j'ai mis à vous donner des n?tres. Je suis si occupée en l'absence de mon mari, que je suis forcée de remplacer, que je n'ai pas le courage d'écrire le soir, et que je vais me coucher bien lasse.
Vous saurez que je m'occupe beaucoup de médecine, non pas pour moi, car j'aime peu à y songer, mais pour mes paysans. J'ai fait de très heureuses cures; mais l'état a aussi ses désagréments.
[1] Pierret, ami de la famille. [2] Hippolyte Chatiron, frère de George Sand.
X
A LA MêME
Nohant, 9 octobre 1826.
Ma chère petite maman,
Pardonnez-moi d'avoir été si longue à vous remercier des peines que vous avez prises pour moi. J'ai été si occupée, si dérangée, et vous êtes si bonne et si indulgente, que j'espère ma grace.
Vous avez bien voulu courir pour vous occuper de ma toilette et de celle de Maurice. Ces emplettes étaient charmantes et font l'admiration _d'un chacun_ dans le pays. Quant à la parure d'or mat, je nomme Casimir pour l'aimable présent, et vous pour le bon go?t. Il m'a empêchée jusqu'à présent de vous écrire, disant qu'il voulait s'en charger. Mais ses vendanges l'occupent à tel point, que je me fais l'interprète de sa reconnaissance. C'est un sentiment que nous pouvons bien avoir en commun. Agréez-la et croyez-la bien sincère.
Vous nous avez mandé que vous étiez souffrante d'un rhume. Je crains que le froid piquant qui commence à se faire sentir ne contribue pas à le

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