Contes dAmérique

Louis Mullem
Contes d'Amérique, by Louis
Mullem

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Title: Contes d'Amérique
Author: Louis Mullem
Release Date: June 14, 2004 [EBook #12620]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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D'AMÉRIQUE ***

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LOUIS MULLEM
Contes d'Amérique

PARIS
M DCCC XC

A
ALPHONSE DAUDET
En toute affection pour l'homme,
En toute admiration pour l'écrivain.
L.M.

L'imagination ne pouvant que retrouver ou prévoir, les historiettes
suivantes devraient être, selon le désir de l'auteur, considérées comme
des chimères susceptibles de devenir réelles ou de l'avoir été.

UNE NOUVELLE ÉCOLE
--Étrange idée! Nous convoquer ainsi, ce soir même!... au risque de
nous faire expulser comme des bambins par le père Wallholm!
--Il est vrai, Gibb, le vieux gentleman est peu endurant pour les visites
en dehors du dimanche.
--Et ce sera comme j'ai dit, Fogg: il s'agit tout bonnement de nous
servir quelque nouvelle avalanche de prose de M. Wallholm fils.
--Oui, Andrew produit beaucoup!...
--C'est une rage! Passe encore de fabriquer, comme nous, quelques
poésies, entre les heures de bureau. Mais entasser poème sur prose,

roman sur comédie! Il deviendra fou!
--Bah! subissons encore cette petite corvée et nous aurons, en revanche,
le plaisir d'entrevoir Mlles Kate et Lizzie... L'une d'elles, je crois, ne
déplaît pas à celui de nous qui ne lui préfère pas sa soeur?
Cette insinuation subtile ramena chacun à ses préoccupations
personnelles, et les deux interlocuteurs continuèrent en silence de
gravir la montée.
L'automne agrémentait la soirée d'un petit froid vif, et de fines nuées
dansaient dans l'azur, sur la note gaie du clair de lune.
Tout rappelle l'Allemagne, du reste, dans cette région du Kansas où
l'émigration rhénane prédomine et impose ses moeurs. La nature
elle-même paraît se prêter à ce pastiche; elle se joue notamment à
l'entour de la petite ville de Humboldt, comme à une seconde édition du
grand-duché de Bade, et le faubourg grimpant où nous avons amené le
lecteur imite avec ses maisons en bois sculpté et ses sombres touffes de
sapins les plus pittoresques échappées de la Forêt Noire.
Gibb et Fogg, qui avaient parlé tout à l'heure, trahissaient aussi le type
tudesque blond, à large face rougeaude. Ils s'étaient exprimés avec une
gravité bien digne de citoyens de dix-huit ans, destinés au commerce,
ouverts pourtant à la littérature et livrés de coeur aux mystiques
rêveries d'un premier amour. Ils étaient sanglés dans des redingotes
noires très courtes, ils avaient des casquettes à visières vernies, ils
quittaient à l'instant le tiède cabaret du Grand Frédéric où l'on paie en
thalers et ils s'avançaient battant le chemin de leurs bottes sonores.
--Merci d'être venus à l'heure, dit tout à coup quelqu'un dans la nuit...
Andrew Wallholm, aux aguets près de la maison paternelle, avait fait
quelques pas au-devant de ses camarades.
--Silence, et suivez-moi comme des ombres, ajouta-t-il gaîment, mais à
voix basse.

Gibb et Fogg entrèrent après Andrew, en assourdissant autant que
possible les craquements de leurs cothurnes, et franchirent le vestibule,
non sans risquer, devant la porte vitrée de la chambre basse, le coup
d'oeil convenu sur miss Kate et miss Lizzie, qui brodaient et rêvassaient
à la clarté de la lampe. Dans le fond de la pièce, près de la cheminée
flamboyante, se tenaient la grosse dame Wallholm, tricotant, et la sèche
personne de M. Wallholm, perdu sous son bonnet fourré, absorbé dans
la fumée de sa pipe et fixant d'un air de mépris ses lunettes sur le vide.
M. Wallholm avait une réputation de misanthropie hargneuse, portée
par les mauvaises langues sur le compte d'anciennes prétendues
frasques de Mme Wallholm...
Gibb et Fogg tremblèrent d'avoir osé regarder.
Inaperçus par bonheur, ils montèrent à tâtons l'escalier et entrèrent avec
Andrew dans sa chambre d'étude à l'arrière de la maison.
Une lampe encapuchonnée d'un abat-jour illuminait une table
surchargée de papiers en désordre. Andrew, décidément, s'accordait la
fantaisie de donner une soirée littéraire.
Dans la pénombre on distinguait, installé déjà, M. Johann Schelm,
l'associé de M. Wallholm; le nostalgique, l'ironique et assez papelard M.
Johann, natif de Darmstadt, en Germanie, dont les mélancolies d'antan
passaient, encore selon les médisants, pour avoir exercé sur les
tendances intimes de Mme Wallholm une attraction décisive...
Gibb et Fogg, malgré leur jeunesse, étaient à peu près instruits de ces
cancans locaux...
Après un échange général de poignées de mains, Andrew invita
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