Claude et Juliette

Alfred Assollant
Claude et Juliette

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Title: Claude et Juliette
Author: Alfred Assollant
Release Date: October 14, 2005 [EBook #16874]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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ET JULIETTE ***

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Alfred Assollant

CLAUDE ET JULIETTE

I
Où il est clairement prouvé que la vertu trouve toujours sa récompense,
et que le premier devoir d'un Français est de venir au secours de la
beauté.
En 1846, vivait à Paris, sur les hauteurs de la place du Panthéon, un
jeune peintre d'un laideur si rare, que ses camarades l'avaient
surnommé Quasimodo. Il avait le nez long et gros, les cheveux crépus,
les yeux petits et enfoncés sous l'arcade sourcilière, la bouche fendue
jusqu'aux oreilles, et le menton pointu. Sa taille était droite, ses bras
longs et nerveux, ses mains larges et fortes, et ses pieds d'une longueur
excessive.
_Le beau n'est pas toujours camarade du bon._ Quasidomo était la
douceur même. Il était instruit, habile dans son art, plein d'esprit, de
courage, et amoureux de la gloire. Un seul défaut déparait ses belles
qualités et le rendait insupportable à lui-même. C'était une tristesse
incurable dont il ne disait le secret à personne. Il aimait la beauté avec
une passion que Phidias, Raphaël et Titien seuls ont connue, et il ne
pouvait se regarder dans une glace sans frémir. Presque tous les
hommes sont laids, il faut l'avouer; mais l'habitude, la vanité,
l'ignorance des vrais principes de la beauté physique, le plaisir qu'on
éprouve à se tromper soi même, leur cachent ordinairement cette
cruelle infirmité. Malheureusement, le pauvre Quasimodo avait trop
étudié son art, et il était trop sincère avec lui-même pour se faire
illusion. Il n'était que laid, et il se croyait effroyable. Il ne s'en consolait
pas. Les railleries de ses camarades, qu'il supportait sans se plaindre,
mettaient le comble à sa douleur. Vingt fois il avait songé à se tuer;
mais il avait ving-deux ans, et à cet âge, peut-on désespérer de tout? On
veut vivre, ne fût-ce que par curiosité. Il n'espérait pas être aimé. Il
pouvait aspirer à la gloire; et qu'y a-t-il de plus désirable sur la terre?
Un soir, ces réflexions l'ayant occupé plus que de coutume, il s'accorda

un sursis, et résolut de vivre jusqu'à trente ans: à cet âge, pensa-t-il, si
je n'ai ni amour ni gloire, je me tuerai. Ayant pris cette sage résolution,
il vit que le temps était beau, que la lune éclairait Paris, et il alla se
promener aux Champs-Élysées.
Il avait à peine fait cent pas dans la grande avenue, lorsqu'il aperçut une
jeune fille, simplement vêtue et d'une tournure gracieuse, qui marchait
devant lui. Un gros homme, orné de breloques, d'une canne et d'épais
favoris, la suivait de près, en marmottant à voix basse quelques paroles
que le peintre n'entendit pas, mais dont il devina le sens. La jeune fille,
sans répondre, traversa la chaussée et continua sa route sur le trottoir
opposé. Le gros homme la suivit et recommença son discours. Pendant
ce temps, le peintre réfléchissait.
«Que fait là cette femme? il est minuit. Ce n'est pas l'heure où les
pensionnaires courent les rues. Cherche-telle les aventures? Mais elle
fuit ce gros homme. Peut-être est-il trop gros. A quoi tient la vertu des
femmes? Peut-être est-ce une femme vertueuse qui aime le clair de lune.
Cela se voit quelquefois. Dans tous les cas, il est clair que ce gros
homme la gêne fort. Qu'importe qu'elle soit vertueuse ou non?»
Il traversa la chaussée à son tour.
«Voilà, se dit-il, une belle occasion de faire le chevalier errant. Bayard,
sans peur et sans reproche, ne l'eût pas laissée échapper. Si j'allais au
secours de la beauté en danger! C'est une de ces occasions où, si l'on
n'est pas sublime, ou est tout à fait ridicule. Sublime ou ridicule, il y a
de quoi réfléchir. Attendons encore.... Décidément, ce gros homme est
insupportable. Quelle parole grossière a-t-il pu lui dire? La jeune fille
marche comme si elle courait. Elle regarde de tous côtés. Que
cherche-t-elle? un sergent de ville, sans doute. Hélas! Le sergent de
ville est aujourd'hui le successeur de Roland et de Bayard, et le
défenseur de la belle Angélique. O temps! ô moeurs!... Puisque le
sergent de ville n'est pas à son poste, faisons
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